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Analyse de la variabilité chez 3 races caprines locales dans la région d’Agadir au Maroc

El Kheyyat Houda et El Madidi Said

Laboratory Biotechnologies and Valorization of Natural Resources (BVRN) Faculty of Sciences, University Ibn Zohr, Agadir, Morocco
s.elmadidi@uiz.ac.ma

Résumé

Dans l’arganeraie d’Agadir au Maroc, la différenciation et la variabilité de certains caractères morpho-biométriques de 3 races caprines locales ont été étudiés sur 344 animaux adultes (318 femelles et 26 mâles): Atlas (155 femelles, 12 mâles), Barcha (99 femelles, 9 mâles) et Ghazalia (66 femelles, 5 mâles). On a étudié 14 variables morphométriques dont 9 variables quantitatives: poids vif (PV), hauteur au garrot (HG), longueur du corps (LC), profondeur du thorax (PT), tour de poitrine (TP), largeur du bassin (LB), longueur des oreilles (LO), longueur des cornes (LCo), hauteur au sacrum (HS) et 6 variables qualitatives : couleur de la robe (CR), présence des cornes (PC), présence des pendeloques (PP), présence de la barbiche (PB), forme des cornes (FC), forme des oreilles (FO). L’analyse de la variance pour les variables quantitatives et le test Kruskal-Wallis pour les variables qualitatives ont montré des différences importantes entre les races pour plusieurs caractères mesurés. Le coefficient de variation de tous les caractères chez l’ensemble des 3 races variait de 6,2 % à 36,7 %. L’utilisation de l’analyse discriminante factorielle (ADF) a montré une différence très significative entre les trois races caprines. Les traits les plus discriminants chez les races étudiées étaient : CR, PV, LB, TP et LO. Ainsi, tous les caprins Atlas étaient noirs ; les Barcha étaient tous noir pies et les Ghazalia étaient noirs et d'une autre couleur : blanc (35,2 %), beige (33,8 %), rouge (24,0%) ou gris (7%). La plus grande distance de Mahalanobis (17,2) a été observée entre les races Atlas et Ghazalia, tandis que la plus petite distance (2,6) a été enregistrée pour les races Atlas et Barcha.

Mots-clés : analyse discriminante, arganeraie, Atlas, Barcha, caractère morpho-biométrique, différentiation, Ghazalia, mensuration corporelle


Analysis of variability for 3 local goat breeds near Agadir in Morocco

Abstract

In the arganeraie of Agadir in Morocco, the differentiation between 3local goat breeds was evaluated using multivariate analysis of morpho-biometric traits of 344 adult animals (318 females and 26 males): Atlas (155 females, 12 males), Barcha (99 females, 9 males) and Ghazalia (66 females, 5 males). We studied14 morphometric traits, 9 quantitative variables : live weight (PV), height at withers (HG), body lenght (LC), thorax depth(PT), heart girth (TP), pelvis width (LB), ear lenght (LO), horn lenght (LCo), sacrum height (HS) and 6 qualitative variables : coat colour (CR), horn presence (PC), cervical appendage presence (PP), goatee presence (PB), horn form (FC), ear form (FO).The analysis of variance for quantitative variables and the Kruskal-Wallis test for qualitative variables showed significant breed differences for several traits measured. The coefficient of variation of all characters in all 3 breeds ranged from 6,2 % to 36,7 %. Discriminant factor analysis (DFA) showed a very significant difference between the three goat breeds. The results obtained showed the existence of a differentiation between the 3 local goat breeds with highly significant differences for pelvic width (PW), heart girth (HG), live weight (LW), ear length (EL) and coat color (CC). So all Atlas goats were black, all Barcha were black and white and the Ghazalia were black with another colour: white (35,2 %), beige (33,8 %), red (24,0%) or grey (7%).The greatest Mahalanobis distance (17.2) was observed between the Atlas and Ghazalia, while the smallest distance (2.6) was recorded for the Atlas and Barcha.

Keywords: argan grove, Atlas, Barcha, body measurement, Ghazalia, morpho-biometric trait, multivariate-analysis


Introduction

L’élevage des chèvres est particulièrement important dans les zones agricoles marginales, en particulier dans les zones arides et semi-arides etenviron 95 % de la population caprine se trouvent dans les pays en voie développement. Le continent africain représente une grande part et la population caprine connaît une croissance marquée depuis plusieurs années, avec environ 38,7 % en 2016 (Faostat 2017) et 41,9 % en 2018 (Faostat 2020). L’élevage de chèvres occupe de plus en plus de place dans les économies nationales car il constitue un facteur de développement économique et social, notamment dans les zones rurales (Boyazoglu et al 2005, De Vries 2008). Au Maroc, le cheptel caprin compte un effectif de près de 5 731 000 de têtes en 2018 (Faostat 2020). Il est caractérisé par son adaptation aux conditions climatiques du pays et se trouve concentré essentiellement dans les zones de montagne et de parcours dégradés. Le système d'élevage le plus répandu est le système extensif basé presque exclusivement sur l'utilisation des parcours et des forêts. La vocation première de cet élevage est la production de viande et joue un rôle important dans l'économie rurale et la chèvre est un élément clé du système agricole dans plusieurs régions au Maroc (Bourbouze et El Aïch 2005).

De nombreuses races caprines ne sont pas caractérisées car la plupart des caprins et des races se trouvent dans des pays en développement et / ou dans des systèmes de production extensifs où la caractérisation devient plus exigeante (Galal 2005). Malgré le rôle important de l’élevage des caprin d'un point de vue socio-économique pour les zones rurales pauvres et arides du monde entier et dans les pays en voies de développement, plus de la moitié des races locales dans le monde sont menacées et n'ont pas été pleinement caractérisées (Arandas et al 2017). La compréhension de la structure morphologique et des variations des races locales est cruciale pour l’identification des races et leur préservation. De nombreux outils statistiques sont disponibles pour évaluer le profil phénotypique des races et, dans ce contexte, les techniques multivariées peuvent être utiles, car elles considèrent toutes les variables simultanément. L’analyse de la variabilité des caractères morphologiques des animaux peut constituer un système efficace pour la préservation et la sélection des races locales (Sowande et al 2010). La connaissance de l'étendue de la variation génétique des populations est essentielle pour le développement d'objectifs et de programmes d'élevage appropriés pour les populations de chèvres (Dossa et al 2007). Le cheptel caprin marocain est caractérisé par l'existence de différents phénotypes répartis sur divers sites géographiques. L'objectif de cette étude était d'analyser les caractères morpho-biométriques qui différencient les races locales élevées dans la zone de l’étude.


Matériels et méthodes

Cette étude a été réalisée sur un total de 344 individus qui ont été échantillonnés auprès de 35 éleveurs de chèvres répartis dans 9 villages de l'arganeraie de la région d'Agadir. L’identification des races de la population locale de la commune par nous-même était basée sur les critères pris en considération et établies par l’ANOC en 2006 (Anonyme 2008, Mihi et al 2012). 14 variables qualitatives et quantitatives ont été utilisées dont 9 variables quantitatives: poids vif (PV), hauteur au garrot (HG), longueur du corps (LC), profondeur du thorax (PT), tour de poitrine (TP), largeur du bassin (LB), hauteur au sacrum (HS), longueur des cornes (LCo) et longueur des oreilles (LO) et 6 variables qualitatives : couleur de la robe (CR), présence des cornes (PC), présence des pendeloques (PP), présence de la barbiche (PB), forme des cornes (FC) et forme des oreilles (FO).

Pour les caractères quantitatifs, une analyse de la variance des caractères a été réalisée par la procédure GLM (General Linear Model Anova) pour étudier la variation de ces mensurations selon la race, le sexe et l’âge de l’animal selon le modèle :Yijk = m + Ai + B j + Ck + eijk. Avec Yijk: les valeurs mesurées pour les races (i), le sexe (j) et l’âge (k), m: moyenne des valeurs totales observées, Ai: effet de la race (i = 3), B j: effet du sexe (mâle ou femelle), Ck: effet de l’âge de l’animal et eijk: erreur résiduelle. Pour les caractères qualitatifs étudiés, les comparaisons ont été réalisées à l’aide d’un test non paramétrique (Kruskal-Wallis test).

Une analyse en composantes principales (ACP) de tous les animaux appartenant aux trois populations a été effectuée sur la base de toutes les variables mesurées pour l’exploration statistique et la compréhension de la structure des données. L'analyse factorielle discriminante (FAD) a été utilisée pour effectuer une analyse canonique pour déterminer les fonctions canoniques, les combinaisons linéaires des variables quantitatives qui résument la variation entre les différentes races et calculer la matrice de distance de Mahalanobis. Les analyses univariées et multivariées ont été effectuées à l'aide du système d'analyse statistique (SAS 9.4, 2014) et de SPSS version 24 (IBM SPSS 2016).


Résultats et discussion


Figure 1. Chèvre Atlas (femelle) Figure 2. Bouc Atlas


Figure 3. Chèvre Barcha (femelle) Figure 4. Bouc Barcha


Figure 5. Chèvre Ghazalia (femelle) Figure 6. Bouc Ghazalia

Au sein des troupeaux des 3 races, nous notons que les femelles sont numériquement plus importantes que les mâles avec un pourcentage de femelles de 93,9 % pour Atlas, 91,7 % pour Barcha et 92,9 % pour Ghazalia. Ce déséquilibre de sexe ratio en faveur des femelles s’explique par le fait que les abattages pour l’autoconsommation et la vente concernent beaucoup plus les caprins mâles.

Variables qualitatives

Tableau 1. Couleur de la robe, forme des cornes et forme des oreilles de 3 races caprines au Maroc : Atlas, Barcha et Ghazalia

Race

 Atlas

Barcha

Ghazalia

Caractère

Effectif

Fréq. (%)

Effectif

Fréq. (%)

Effectif

Fréq. (%)

Effectif total

167

100,0

108

100,0

71

100,0

Couleur
de robe

Noire

165

100,0

0

0,0

0

0,0

Noire et blanche

0

0,0

108

100,0

25

35,2

Noire et rouge

0

0,0

0

0,0

17

24,0

Noire et beige

0

0,0

0

0,0

24

33,8

Noire et grise

0

0,0

0

0,0

5

7,0

Forme des
oreilles

Pédonculée non tombante

39

23,6

27

25

10

14,1

Pendante courte

82

49,7

67

62,0

37

52,1

Pendante longue

37

22,4

9

8,3

23

32,4

Dressée longue

3

1,8

0

0,0

1

1,4

Tombante

1

0,6

0

0,0

0

0,0

Tombante pédonculée

3

1,8

5

4,6

0

0,0

Forme des
Cornes

Enroulée

50

30,3

33

30,6

18

25,4

Spiralée

77

46,7

38

35,2

24

33,8

Tirée vers l’arrière

34

20,6

33

30,6

29

40,9

En croissant

4

2,4

4

3,7

0

0,0

Enroulée

50

30,3

33

30,6

18

25,4

Pour la couleur de la robe, tous les animaux de la race Atlas avaient une couleur de robe exclusivement noire. Le noir et blanc est la couleur de robe observée chez tous les animaux de la race Barcha (noir-pie), avec souvent des poils rougeâtres. Chez la race Ghazalia, on a une association variable de deux couleurs : 35,2 % des animaux noirs et blancs, 33,8 % noirs et beiges, 24,0% noirs et rouges et 7,0 % noirs et gris.

Les cornes sont présentes chez les deux sexes et peuvent présenter des formes différentes. La forme des cornes « spiralée », est majoritairement observée chez les races Atlas (46,7 %) et Barcha (35,2 %). La forme «enroulée » est présente chez 30,3 % des individus chez les Atlas, 30,6 % chez les Barcha et 25,4 % chez les Ghazalia alors que la forme « tirée vers l’arrière» est la plus représentée chez les Ghazalia (40,9 %).

Figure 7. Atlas,
cornes spiralées
Figure 8. Barcha,
cornes enroulées
Figure 9. Ghazalia, cornes
tirées vers l’arrière

Pour la forme des oreilles, nous avons noté que la forme «pendante courte » est la forme dominante chez les trois races avec 49,7 %, 62,0 % et 52,1 % chez les Atlas, les Barcha et les Ghazalia respectivement. La forme « pendante longue » a été observée chez 22,4 % pour les Atlas, 8,3 % chez les Barcha et 32,4 % chez les Ghazalia. Par contre les formes « dressée » et « tombante » sont très peu représentées chez les animaux des 3 races.

Figure 10. Ghazalia : oreilles
pendantes courtes
Figure 11. Barcha : oreilles
pendantes longues


Figure 12. Atlas mâle, oreilles
dressées longues
Figure 13. Atlas,
oreilles tombantes

Figure 14. Ghazalia : oreilles pédonculées, cornes spiralées
Variables quantitative

Tableau 2. Moyennes ajustées ± écart-types et coefficients de variation (%) des caractères morphologiques quantitatifs par races et sexes

SV LC HG

TP

LB

HS

PT

LO

LCo

PV

A

55,7 ± 4,9
8,7

63,1 ± 4,3
6,8

67,7 ± 6,4
9,4

12,6 ± 1,4
11,1

63,9 ± 4,3
6,7

26,7 ± 2,5
9,4

13,7 ± 1,7
12,1

17,3 ± 6,33
36,7

17,0 ± 4,4
25,8

B

56,3 ± 4,9
8,7

63,1 ± 3,8
6,0

68,4 ± 6,6
9,6

12,8 ± 1,7
12,4

63,8± 3,8
6,2

26,6 ± 2,6
9,8

13,8 ± 1,5
11,1

16,6 ± 5,2
31,2

17,3 ± 4,0
22,9

G

56,1 ± 6,1
11,3

63,2 ± 4,2
6,9

70,2 ± 8,0
11,5

13,3 ± 1,7
12,7

63,8± 4,7
7,4

26,9 ± 3,0
11,6

14,1 ± 1,6
12,8

16,1 ± 4,1
27,1

19,1 ± 4,5
23,6

F

55,9 ± 5,1

62,9 ± 4,0

68,2 ± 6,9

12,8 ± 1,6

64,2± 4,1

26,6 ± 2,6

13,9 ± 1,6

16,1 ± 4,4

17,5 ± 4,3

M

56,3 ± 5,3

65,2 ± 5,3

68,5 ± 6,7

12,3 ± 1,3

68,1± 6,6

27,6 ± 3,2

13,4 ± 1,2

26,6 ± 9,4

18,2 ± 4,6

A : Atlas (noire), B : Barcha, G : Ghazalia, F : femelle et M : mâle
SV : source de variation, PV : poids vif, LC : longueur du corps, HG : hauteur au garrot, TP : tour de poitrine, LB : largeur du bassin, HS : hauteur au sacrum, PT : profondeur du thorax, LO : longueur des oreilles, LCo : longueur des cornes

Une variabilité modérée à élevée a été observée pour toutes les mesures morphologiques quantitatives (CV compris entre 6,2 et 36,7 %) (Tableau 2). Les coefficients de variation (CV) les plus faibles sont observées pour la hauteur au garrot (HG) et la hauteur au sacrum (HS), tandis que les CV les plus élevés ont été trouvés pour le poids vif et la longueur des cornes (25,8 et 36,7 respectivement pour la race Atlas), (22,9 et 31,2 pour la race Barcha) et (23,7 et 27,1 pour les Ghazalia).

Les moyennes arithmétiques des caractères morphologiques des chèvres par race sont présentées dans le Tableau 2. Les mensurations corporelles suggèrent que les 3 races sont de petite taille. Leurs mesures sont similaires pour les trois races, avec un léger avantage pour la race Ghazalia pour le poids vif (PV) (19,1 ± 4,5), la longueur des oreilles (LO) (14,1 ± 1,6), le tour de poitrine (TP) (70,2 ± 8,0) et la largeur du bassin (LB) (13,3 ± 1,7). La moyenne la plus élevée pour la longueur des cornes (LCo) est enregistrée pour la race Atlas tandis que la moyenne la plus élevée pour la longueur du corps (LC) est observée chez la race Barcha (56,3 ± 4,9).

Bien que les effectifs des mâles étaient faibles, des différences ont été notées entre les mâles et les femelles pour les mensurations corporelles. Les moyennes des mâles étaient plus élevées que celles des femelles pour tous caractères mesurés sauf pour la largeur du bassin (LB) et la longueur des oreilles (LO).

Entre les 3 races, l'analyse de la variance a montré un effet significatif pour la longueur des oreilles (p-value <0,05) et un effet hautement significatif (p-value <0,01) pour TB, LB et PV (Tableau 2). Pour ces trois caractères, les valeurs les plus faibles ont été observées chez la race Atlas (TB : 67,7 ± 6,4, LB: 12,8 ± 1,4 et PV : 17,0 ± 4,4) tandis que les valeurs les plus élevées étaient enregistrées chez la race Ghazalia (TB : 70,2 ± 8,0, LB: 13,3 ± 1,7 et PV: 19,1 ± 4,5) (Tableau 1). Le sexe des animaux avait un effet très hautement significatif (p-value <0,001) pour la hauteur au garrot (HG), la hauteur au sacrum (HS), la profondeur du thorax (PT) et la longueur des cornes (Lco) (Tableau 2). Les valeurs moyennes des mâles étaient significativement plus élevées que ceux des femelles pour tous les caractères mesurés sauf pour la largeur du bassin (LB) et la longueur des oreilles (LO). L’âge des animaux a montré un effet très hautement significatif (p-value <0,001) pour tous les caractères mesurés.

Tableau 3. Résultats de l’Anova (GLM) : valeurs Fisher-Snedecor et niveaux  de signification

SV

ddl

LC

HG

TP

LB

HS

PT

LO

LCo

PV

Race

2

1,3

0,4

5,6**

6,1**

0,1

2,4

3,5*

0,6

7,4**

Sexe

1

4,6*

20,6***

4,3*

0,04

22,1***

20,9***

0,02

9,2***

5,0*

Age

5

7,1***

10,1***

10,2***

5,1***

10,7***

20,7***

7,2***

8,1***

7,0***

Erreur

335

Total

394

***, **, * : différences significatives aux niveaux de 0,001, 0,01 et 0,05 respectivement

Pour les variables qualitatives, les résultats du test de Kruskal – Wallis pour la comparaison des trois races étaient significatifs pour la forme des oreilles (FO) (H = 7,68 ; p-value = 0,022) et très hautement significatifs pour la couleur de la robe (CR) (H = 27,7; p-value <0,001). L’âge des animaux avait un effet hautement significatif pour la forme des cornes (FC) (H = 18,8; p-value = 0,002) et significatif pour la présence de la barbiche (PB) (H = 11,0; p-value = 0,021) (Tableau 4).

Tableau 4. Résultats du test de Kruskal-Wallis pour les variables qualitatives

Variables

CR

FC

FO

PC

PB

PP

Race

27,7***

4,0

7,7*

0,0

0,1

0,4

Sexe

2,8

0,01

1,6

0,0

0,7

0,02

Age

3,2

18,8**

8,7

0,0

11,0*

3,7

CR :Couleur de la robe, FC : Forme des cornes, FO : Forme des oreilles, PC : Présence des cornes, PB : Présence de la barbiche, PP : Présence des pendeloques

Pour la forme des oreilles, Nous avons noté que la forme «pendante courte » est la forme dominante chez les trois races avec 49,7 %, 62,0 % et 52,1 % respectivement chez Atlas, Barcha et Ghazalia. La forme «pendante longue » est observée chez 22,4 % pour Atlas, 8,3 % chez Barcha et 32,4 % chez Ghazalia. Par contre, les formes dressée et tombante sont très peu représentées chez les animaux des trois races. Pour la couleur de la robe, la couleur noire est prédominante chez la race Atlas. Tous les animaux de cette race ont une couleur de robe exclusivement noire. Le noir-blanc est la couleur de robe observée chez tous les animaux de la race Barcha alors que chez Ghazalia, on a une association variable de deux couleurs avec 35,2 % des animaux ont une couleur de robe (noire-blanche), 24,0 % (noire-rouge), 33,8 % (noire -beige) et 7,0 % (noire -grise). Les cornes sont présentes chez les deux sexes et peuvent présenter des formes différentes. La forme des cornes «Spiralée », est majoritairement observée chez Atlas (46,7 %) et Barcha (35,2 %). La forme «enroulée » est présente chez 30,3 % des individus chez Atlas, 30,6 % chez Barcha et 25,4 % chez Ghazalia alors que la forme «Tirée vers l’arrière» est la plus représentée chez Ghazalia (40,9 %).

Tableau 5. Analyse discriminante : Lambda de Wilk, F-stat et signifiant la différence entre les moyennes des groupes

Lambda de Wilks

F

ddl 1

ddl 2

p-value

CR

0,926

9,32

2

339

0,000

FC

0,990

1,77

2

339

0,173

FO

0,995

0,83

2

339

0,435

PB

1,000

0,02

2

339

0,977

PP

0,999

0,21

2

339

0,812

LC

0,996

0,60

2

339

0,549

HG

0,999

0,12

2

339

0,890

TP

0,978

3,74

2

339

0,025

LB

0,946

6,17

2

339

0,002

HS

1,000

0,06

2

339

0,943

PT

0,997

0,51

2

339

0,601

LO

0,953

5,13

2

339

0,009

LCo

0,995

0,92

2

339

0,398

PV

0,965

6,11

2

339

0,002

L’analyse en composantes principales (ACP) a été effectuée sur les mesures morphologiques et a révélé que les deux premières composantes principales représentaient 62,3 % de la variance totale. Les deux premièrescomposantes principales, PC1 et le PC2 représentaient respectivement 36,5 et 25,8 % de la variance phénotypique totale.

L'analyse factorielle discriminante (FDA) montre une différence très significative entre les 3 races de chèvres (Wilks’s Lambda: 0,222, Chi-Square: 509 et p-value: P <0,0001). L'AFD a permis d’identifier les variables les plus distinctives parmi les populations des individus analysés. Les variables couleur de la robe (CR), poids vif (PV), tour de poitrine (TP), largeur du bassin (LB) et longueur des oreilles (LO) ont été identifiées comme ayant un plus grand pouvoir discriminatoire pour expliquer la variation entre 3 races et étaient les plus importantes pour définir le profil phénotypique des races étudiées. Les valeurs discriminatoires élevées de ces variables sont en accord avec les résultats rapportés par plusieurs études. L’analyse de la différenciation morphologique entre les races caprines marocaines Barcha et Atlas a permis de monter que le poids du corps, la longueur du corps et la largeur des oreilles étaient parmi les traits morpho-biométriques les plus importants permettant la discrimination entre les chèvres des deux races (Boujenane et al2016). La caractérisation de la chèvre Draa indigène marocaine basée sur une analyse multivariée a permis l’identification des traits les plus discriminants entre les populations étudiées qui étaient le poids vif, la longueur du corps, le tour de poitrine, la longueur des poils, la longueur de la corne et la longueur des oreilles (Ibnelbachyr et al 2015). L’analyse multivariée des données de 8 caractères morphologiques de 4 races caprines locales dans le centre de Java-Indonésie, a révélé que le tour de poitrine était la variable la plus influente pour la différenciation des races (Kurnianto et al 2013). Travaillant sur des populations de chèvres saoudiennes, Aziz et Al-Hur (2013) ont rapporté que la longueur de l'oreille et la circonférence du canon étaient les variables les plus discriminantes entre les trois races locales. Zaitoun et al (2005) ont indiqué que les variables les plus discriminantes permettant de différencier les races de chèvres indigènes de Jordanie sont la hauteur du garrot, le poids corporel, le type d'oreille et la forme du nez.

Tableau 6. Distances de Mahalanobis entre les 3 races

Atlas

Barcha

Ghazalia

Atlas

0,0

2,6 (**)

17,2 (***)

Barcha

2,6

0,0

7,8 (***)

Ghazalia

17,2

7,8

0,0

***, ** : différences significatives aux niveaux de 0,001 et 0,01 respectivement

Les distances de Mahalanobis estimées entre les trois races impliquant les 14 variables étudiées sont présentées dans le Tableau 6. Les distances entre toutes les comparaisons par paires étaient hautement significatives (p-value<0,01). Les plus grandes distances ont été trouvées entre les Ghazalia et les races Atlas et Barcha (17,2) et (7,8) respectivement. Les deux distances étaient très hautement significatives (p-value <0,001) et indiquent une différenciation morphologique relativement importante et une séparation claire surtout entre entre les Ghazalia et les Atlas. La plus faible distance (2,6) a été enregistrée entre les races Atlas et Barcha suggérant qu’elles sont plus étroitement liées l'une à l'autre et présentant des faibles variations morphologiques peut-être dues à l'adaptation aux mêmes conditions environnementales et à un flux génétique qui tend à réduire les différences génétiques entre les populations. La valeur de cette distance est en accord avec celle trouvée par Boujenane et al (2016) qui ont rapporté une distance de 3,83 entre les races Barcha et Atlas. Des valeurs similaires de distances ont été rapportées par plusieurs auteurs. En Jordanie, la différenciation entre 4 races de chèvres indigènes utilisant 20 variables morpho-structurales a permis d’estimer les distances Mahalanobis, la petite distance était de 2,5 tandis que la plus grande distance était 22,3 (Zaitoun et al 2005). L'application de l'analyse discriminante multifactorielle dans la différenciation morphologique entre les races caprines andalouses (Herrera et al, 1996) montre que la plus grande distance était 26,3 et la plus faible 2,0. Les distances de Mahalanobis entre les 4 populations de chèvres du Bénin révélées par l'analyse multivariée des traits morphologiques (Dossa et al 2007) ont montré que la plus grande distance était entre GCZ et NSZ (17,6), tandis que la distance la plus petite était entre GCZ et SGZ (2,0).

Les résultats de plusieurs études indiquent que l'analyse multivariée des caractères morpho-biométriques permet de fournir une base scientifique pour la caractérisation et la différenciation des races caprines. L'analyse multivariée des caractères morphologiques a été utilisée avec succès pour estimer la diversité au sein et entre les races locales (Zaitoun et al 2005, Dossa et al 2007, Jimcy et al 2011, Pires et al 2012, Boujenane et al 2016). Plusieurs études ont évalué l'utilité des caractéristiques morphologiques pour distinguer les races de chèvres indigènes. Au Nigéria, une étude a indiqué que les caractéristiques morpho-métriques peuvent être utilisées avec succès comme un outil discriminant sur le terrain pour séparer les races locales de chèvres (Yakubu et al 2010). Une analyse discriminante canonique basée sur 16 mesures corporelles s'est avérée utile et informative pour différencier les 3 races de chèvres saoudiennes (Aziz and Al-Hur 2013). Une autre étude basée sur l'analyse morphologique discriminante et canonique a montré que les 6 populations de chèvres locales indonésiennes constituaient 6 races distinctes de chèvres (Batubara et al 2011). L'analyse multivariée s'est avérée efficace pour caractériser le profil morphométrique d’une race locale gravement menacé au Brésil, et ces résultats peuvent être la première étape d'un programme de conservation de la race (de Medeiros et al 2020).


Conclusion

Plusieurs traits morpho-biométriques étudiés présentent une variation significative entre les races étudiées et peuvent être utilisés pour la différentiation entres les trois races caprines locales de l’arganeraie d’Agadir au Maroc. L’analyse de la variance pour les variables quantitatives et le test Kruskal-Wallis pour les variables qualitatives ont montré des différences importantes entre les races pour plusieurs caractères mesurés. L’utilisation de l’analyse discriminante factorielle (ADF) a montré une différence très significative entre les trois races caprines. La plus petite distance de Mahalanobis (2,6) a été enregistrée entre les races Atlas et Barcha, tandis que la grande distance de (17,2) a été observée entre les races Atlas et Ghazalia. Les traits les plus discriminants chez les races étudiées étaient : couleur de la robe (CR), poids vif (PV), largeur du bassin (LB), tour de poitrine (TP) et longueur des oreilles (LO).

L’analyse de cette variabilité peut contribuer à définir le standard phénotypique des races et à orienter les programmes d'amélioration dans le futur. Les informations de cette étude serviront de base à l'établissement de nouvelles stratégies pour la caractérisation, la conservation et la sélection des 3 races. Les résultats actuels vont être complétés par une caractérisation par des marqueurs moléculaires pour consolider les résultats de la différenciation sur la base des traits morpho-biométriques.


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