Livestock Research for Rural Development 33 (3) 2021 LRRD Search LRRD Misssion Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Impact bioéconomique du projet de plantation pastorale sur les parcours steppiques de la wilaya de Djelfa, Algérie

Houari A, Djenane A-M1 et Chettouh B2

Département des Sciences Agronomiques et Vétérinaires, Faculté des Sciences de la Nature et de la Vie, Université Ziane Achour Djelfa, BP 3117, Djelfa 17000, Algérie B P 1644, Cité du 5 juillet, 17007 Djelfa, Algérie
kebbiryas2006@yahoo.fr
1 Département des Sciences Commerciales, Faculté des Sciences Economiques, Commerciales et Sciences de Gestion. Université Ferhat Abbas Sétif 1, Campus El Bez, Sétif 19000, Algérie
2 Haut-Commissariat au Développement de la Steppe. B P 3 81, Cité El Amir Abdelkader, Djelfa 17000, Algérie

Résumé

De vastes surfaces de parcours steppiques sont très dégradées dans la wilaya de Djelfa en Algérie. La technique de plantation pastorale à base d’Atriplex, Médicago et de Cactus, a été mise en œuvre sous forme d’un projet sur 30 ans. L’objectif de cette étude est d’évaluer en cours de projet, son impact sur la production et la qualité fourragère, et parallèlement sur les incidences économiques. La collecte des données sur le terrain a été effectuée aux printemps, sur 4 campagnes (2014-2017) correspondant au pic de croissance de la plupart des espèces steppiques. La méthodologie comparative des paramètres floristiques (quantitatifs et qualitatifs) des sites aménagés et de leurs témoins respectifs situés à proximité est adoptée dans notre étude. Les indicateurs économiques sont issus des données réelles sur les périmètres aménagés (1994-2017). Les résultats obtenus, comparés aux zones non aménagées, ont montré une amélioration de la flore (76 et 54 espèces, respectivement), du recouvrement (67 vs 54%), de la phytomasse (2.09 vs 0.25 t MS/ha) et de la production fourragère (374 vs 35 UF/ha). L’analyse économique au sein du projet a révélé des résultats positifs en matière de viabilité et de rentabilité du projet, ainsi que la réduction du coût de production de l’unité fourragère.

Mots clés : analyse économique, ovins, production fourragère, rentabilité, système fourrager


Bioeconomic impact of the pastoral plantation project on the steppe rangelands of the Djelfa province, Algeria

Abstract

Large areas of steppe rangelands have been much degraded in the Djelfa Province, Algeria. The pastoral planting technique based on Atriplex, Medicago and Cactus was implemented as a 30-year project. The objective of this study was to evaluate the impact of this project (during realization) on production and forage quality, and at the same time on the economic implication.

Data collection in the field was carried out in the spring, over 4 campaigns (2014-2017) corresponding to the growth peak of most steppe species. A comparative methodology of the floristic parameters (quantitative and qualitative) of the sites developed and their respective controls located nearby was adopted. The economic indicators were taken from actual data on the developed perimeters (1994-2017). The obtained results for developed sites, compared to unmanaged areas, showed an improvement in flora (76 vs 54 species, respectively), recovery (67 vs 54%), phytomass (2.09 vs 0.25 t DM/ha), and forage production (374 vs 35 FU/ha). Economic analysis within the project revealed positive results in terms of project viability and profitability, as well as a reduction in the cost of production of the forage unit.

Keywords: economic analysis, sheep, forage production, profitability, forage system


Introduction

La principale ressource des zones steppiques Algériennes reste le parcours. On désigne généralement par parcours, des pâturages formés par une végétation spontanée et exploitée de manière extensive en vue de l’alimentation d’un cheptel (Benrebiha et Bouabdellah 1992). Ce territoire constitue un espace vital pour une population estimée à plus de 7.2 millions d'habitants dont la majeure partie tire ses revenus de la pratique de l'élevage (Djellouli 1990). L’effectif du cheptel pâturant en zones steppiques est passé de 7 millions de têtes en 1980 à 11 millions en 1995 (HCDS 2018). D’après Bedrani (1994), parmi les causes de la forte croissance du cheptel steppique, c’est la haute rentabilité de l’élevage en zones steppiques. La steppe est donc nécessaire pour conserver un élevage ovin qui contribue largement à l'atténuation du déficit protéique.

La situation des parcours steppiques est alarmante, cet état de dégradation a été démontré par plusieurs études réalisées pour faire diagnostiquer l’état des lieux des parcours et mettre en évidence les caractéristiques de fragilité de l’écosystème steppique accentuée par les contraintes naturelles (aridité climatique, l’ensablement, etc.) combinées aux actions anthropiques (surpâturage, défrichement, etc.), exercent une forte pression sur les ressources naturelles (Boutonnet 1989). La dégradation est plus en plus accentuée, les surfaces pastorales et surtout leurs potentiels fourragers (le couvert végétal naturel et leur productivité fourragère) ont régressé de manière spectaculaire ces dernières décennies. Le déficit fourrager, estimait en 1994 à 50% des besoins annuels (HCDS 2018), posait d’ores et déjà le problème grave de couverture des besoins du cheptel. La diminution de la productivité des parcours, oblige les éleveurs à acheter de l'aliment concentré, non seulement pour les périodes de soudure, mais également pour beaucoup d'entre eux, tout au long de l'année. Selon Zirmi-Zembri et Kadi (2016), les ressources alimentaires sont les plus importantes et les plus coûteuses d’un point de vue input. Elles représentent la partie la plus importante des charges opérationnelles, de 25 à 70 % du coût total de production. L'augmentation des prix des inputs s'est, en effet, accompagnée d'une forte augmentation des prix du bétail (Abdelguerfi et Bédrani 1997).

Afin de faire face à la dégradation des parcours steppiques, réduire le déficit fourrager et améliorer les revenus des éleveurs, le Haut-Commissariat au Développement de la Steppe (HCDS), établissement public à vocation technique et scientifique a entrepris le projet de plantation pastorale (P_PP). De nombreux travaux ont décrit les effets de l’aménagement des parcours et du contrôle du pâturage, montrant l’amélioration de la richesse floristique et de la valeur fourragère dans les formations restaurées dans les milieux arides ou semi-arides (Nedjraoui et Bedrani 2009; Acherkouk 2013; Amghar et al 2016). Cependant, ces travaux ont négligé l'aspect économique du P_PP. Pourtant, ce type de données est fondamental pour prendre la décision adéquate en matière de gestion des parcours. II y a différents points de vue pour juger de l'opportunité de réalisation de ce projet, alors que la rentabilité financière constitue un indicateur important de la durabilité du projet (Lebailly et al 2000).

Cette étude visait à analyser les résultats du projet de plantation pastorale. Les aptitudes de ces plantations dans différents périmètres ainsi que leurs impacts sur la régénération floristique, le taux de recouvrement, le potentiel fourrager (en matière sèche et en énergie) et sa contribution au couvert végétal ont été élucidés et discutés. Aussi, l'impact de la mise en œuvre du projet de plantation pastorale sur les indicateurs économiques a été étudié.


Matériels et méthodes

Zone d’étude

La wilaya de Djelfa est située dans la partie centrale de l’Algérie du Nord au-delà des piémonts Sud de l’Atlas Tellien en venant du Nord dont le chef-lieu de Wilaya est à 300 kilomètres au Sud de la capitale. Elle est comprise entre 2° et 5° de longitude Est et entre 33° et 35° de latitude Nord (figure 1). L'étage bioclimatique s'étale du semi-aride inférieur frais au per-aride supérieur frais. Les sols sont caractérisés par la présence d'accumulations calcaires, la faible teneur en matière organique et une forte sensibilité à l'érosion et à la dégradation (HCDS 2018). Elle est limitée au Nord par l'isohyète 400 mm qui coïncide avec l'extension des cultures céréalières en sec et au Sud, par l'isohyète 100 mm qui représente la limite méridionale de l'extension de l'alfa (Djellouli 1990). La pluviométrie moyenne enregistrée pour la période (1994-2017) est égale à 308 mm/an. Les températures moyennes annuelles avoisinent 17°C avec des minima qui peuvent atteindre -4°C et des maxima en moyenne de l’ordre de 36°C (ONM 2018). Les parcours restent la principale occupation des terres de cette région. Cette catégorie de terre s’étend sur une surface de 2 122 428 ha, soit 66 % de la surface totale de la wilaya et constitue avec la surface alfatière les trois-quarts des terres de cette région agropastorale (DSA 2018). L’effectif du troupeau ovin est passé de plus de 1.3 millions de têtes en 1994 à plus de 3.5 millions de têtes (12 % du cheptel national) en 2016. Parallèlement, les caprins et les bovins occupent une place non-négligeable dans l’élevage avec 11.80 et 1% respectivement de l’effectif total pour la même période. L'élevage ovin est souvent présenté comme majoritairement pastoral.

Figure 1. Carte montrant la répartition des relevés floristiques dans la wilaya de Djelfa
Projet de plantation pastorale

Le présent projet vient en continuité de l’action de préservation et de protection des parcours steppiques et de lutte contre la dégradation du milieu. La plantation pastorale est favorisée en raison de son efficacité, de sa maitrise et du savoir-faire acquis par les populations rurales et pastorales impliquées dans le cadre de la démarche participative initiée et surtout dans son aspect recherche, formation et vulgarisation. Elle est aussi favorisée en raison de son activité génératrice d’emploi en milieu rural où les chances d’emplois sont minimes sinon inexistantes. Les parcours qui présentent un état de dégradation très avancé (couverture végétale pérenne inférieure à 20 %), mènent le HCDS à intervenir par l’action combinée de plantation pastorale suivie d'un pâturage contrôlé. Elle permet ainsi de protéger un territoire ou une parcelle contre toute exploitation inadéquate par l'homme et/ou les animaux domestiques. Subséquemment, le HCDS utilisait des arbustes pastoraux qui ont prouvé leur adaptation au milieu steppique et qui présentent des avantages considérables (constitution de réserves sur pied, bonne productivité, facilitée d’implantation, palatabilité, etc.) (Photo 1). On en trouve trois principales espèces cultivées : les Atriplex (Atriplex canescens, Atriplex nummularia), les Médicagos et les Cactus (HCDS 2018). La notion de palatabilité est le second critère à considérer. Chaque zone a été mise en défens pendant les trois à cinq années qui ont suivi sa plantation, leurs limites ont été matérialisées par des tumulus visibles de loin et leur protection a été assurée par un gardiennage.

Les frais d’exécution du projet, de contrôle et de suivi, sont repartis principalement en:

- Traçage, bornage et ouverture de potets;

- Semis, irrigation et gardiennage;

- Maintenance, réparation de potets, enlèvement des mauvaises herbes, irrigation et gardiennage;

- Encadrement et suivi technique.

Les Atriplex

Le semis en pépinière, puis la transplantation reste la technique la plus utilisée pour les Atriplex. Les plants ayant servi au repeuplement des stations étudiées ont été élevés en pépinière durant trois mois avant d’être transplantés sur les champs dans des trous de profondeur entre 50 et 60 cm. La densité moyenne des plantations a été estimée à 1000 plants/ha. Après plantation, trois arrosages ont été effectués à raison de 20 litres par plant sur une période de deux mois (HCDS 2002).

Atriplex canescens

Arbuste de 1 à 2 m de hauteur. Les périodes de semis en pépinière sont entre octobre et novembre ou juin à juillet. La transplantation des plants s’échelonne entre mi-février à avril ou septembre à novembre. Il rentre en production entre juillet et février. Les rameaux feuillés sont consommés frais, fanés ou séchés. Sa valeur fourragère varie de 0.25 à 0.68 UF/Kg MS. C’est l’un des Atriplex les mieux appétés par les ovins, avec une ingestion volontaire supérieure aux autres Atriplex (HCDS 2002), (Photos 1a et 1b).

Atriplex nummularia

Arbuste de 1 à 3 m de hauteur. La transplantation est effectuée à l’automne ou au printemps dans les zones gélives. C’est une espèce réputée très productive. Elle présente une très forte production en printemps et ralentie en été. Un pâturage modéré de cette espèce entraîne un accroissement de la production fourragère en saison suivante. Elle est surtout appréciée par les ovins en été et au printemps. Sa consommation par les caprins est nettement inférieure à celle des ovins, mais elle présente un pic en été. Cette espèce permet le maintien du poids des animaux même si elle est distribuée seule. Elle permet également des gains de poids journaliers considérables chez les ovins si elle est mélangée avec le Cactus. La valeur fourragère, selon Sarson, 1970 (In FAO 1989) est de 0.5 à 0.66 UF/Kg MS.

Les Médicagos

La période de semis en pépinière, est entre octobre et novembre. La transplantation des plants obtenus en pépinière par semis ou par bouturage peut se faire en zones non gélives aussi bien en printemps qu’en automne et de préférence au printemps dans les zones gélives, à des densités de plantation de 1000 à 2500 plants/ha en fonction de la pluviométrie et de la texture ou structure des sols. Les Médicagos, sont arrosez régulièrement pour favoriser la reprise, s'il ne pleut pas, tout en laissant la terre sécher entre deux arrosages. Par la suite, la luzerne arborescente se débrouille fort bien toute seule même face à la sécheresse. Medicago arborea est une espèce de 1 à 2 m de haut, elle est plus appréciée par les caprins que les ovins, elle a une valeur fourragère élevée, de 0.6 à 1.05 UF/Kg MS, et est riche en vitamines A, C, E et K (HCDS 2002).

Les Cactus

Le Cactus se multiple par bouturage des cladodes. Afin d’assurer une bonne reprise au bouturage, il est recommandé de planter des cladodes âgés de 3 à 5 ans sur un sol propre, dépourvu d’adventices. Parmi les techniques de plantation, on distingue : la plantation à raquette unique ou la plantation à doubles raquettes (Photo 1c). Les périodes de transplantation s’étalent de mi-février à mi-avril ou de mi-octobre à mi-décembre. La densité de plantation est fonction de l’aridité du milieu, sous les pluviométries allant de 150 à 500 mm/an. Elle est de 4000 pieds/ha dans les zones à pluviométrie annuelle de 400 mm et de 1000 pieds/ha dans les zones à pluviométrie de 150 mm. L’apport de la fumure, selon certains auteurs, influe positivement sur la production de Cactus ainsi que sur sa teneur en protéines. Elle est de l’ordre de 10 t/ha sous un apport de fumier ovin, 50 unité/ha de P2O2 et 20 unité/ha d’azote. L’arrosage des jeunes plantes de Cactus est nécessaire durant les deux premières années. Il est de 4 à 5 l/pied, a raison de deux fois pour la première année et une fois la deuxième année. La production des Cactus varie en fonction de plusieurs paramètres tels que : type de sol, irrigation, apport de fumure et fréquence de coupe. Du fait de sa faible valeur fourragère, les raquettes du Cactus sont distribuées à l’animal comme aliment supplémentaire, additionnées à un autre fourrage ou concentrés (HCDS 2002).

a) Atriplex canescens (Jeunes plantes) b) Atriplex canescens (Plantes adultes)
c) Semis des raquettes de Cactus en sillons
Photo 1. Périmètres aménagés avec plantation pastorale
Méthodologie
Aspect biologique

La collecte des données sur le terrain a été effectuée aux printemps, sur 4 campagnes (2014, 2015, 2016, 2017) correspondant au pic de croissance de la plupart des espèces steppiques ; après presque 21 à 24 ans du début d’exécution du projet. La méthode comparative a été utilisée pour comparer les paramètres floristiques des sites aménagés (32 relevés floristiques placés dans des périmètres de plantation pastorale, situation avec projet : SAP) et de leurs témoins respectifs situés à proximité (32 relevés placés dans des parcelles pâturées librement, situation sans projet : SSP). Les relevés ont été réalisés en 8 stations localisées dans la wilaya de Djelfa. Le choix des stations tenait compte de l’homogénéité de la physionomie de la végétation, d’une part ; d'autre part, il était basé sur la représentativité des stations échantillonnées. Après une description de la végétation, une fiche pour chaque relevé floristique a été élaborée, et en dernier lieu pour raffiner les résultats, un tableau récapitulatif est élaboré au moyen des stations. Les relevés ont été quantifiés en suivant la technique du relevé linéaire (Daget et Poissonet 1971). Une ligne de 100 points espacés de 10 cm, dont le point de départ et la direction ont été choisis de manière aléatoire, ensuite, on procède à une lecture le long de cette ligne des points de végétation. Les espèces ont été prélevées et mises dans des sacs codés, ensuite elles sont reconnues à l'aide de la flore de Quezel et Santa (1962).Pour la présente étude, l’aire minimale dans les steppes varie entre 64 et 132 m2. Dans l'étude des espèces naturelles, la mesure de la phytomasse consiste à couper la végétation au ras du sol sur une surface déterminée, 10 m² pour les espèces vivaces et 1 m² pour les espèces annuelles. Les vivaces ont été triées, espèce par espèce, puis pesées sur place, les annuelles prélevées sont également pesées, puis séchées à l’étuve (105°c) pendant 5 heures pour déterminer le poids sec de ces végétaux. Dans l'étude des plantations d'arbustes fourragers plusieurs paramètres dendrométriques (hauteur, diamètre) ont été utilisés, ainsi que le taux de réussite des plantations. L’évaluation de la biomasse par le biais de l’individu moyen suppose la mesure des biovolumes de tous les individus présents dans la placette. Le biovolume (BV) total d’une placette serait égal au biovolume de l’individu moyen (BVmoy) multiplié par le nombre d’arbustes dans la placette (n).

D'après Daget et Poissonet (1971):

BV=BVmoy ×n

Csi : contribution spécifique au tapis végétal. Fsi : fréquence spécifique d'une espèce i.

Vp : valeur pastorale.Isi: indice de qualité spécifique.

D’après Aidoud (1989):

Pu=6.74 Vpu+14.77

Pu : production pastorale. Vpu : valeur pastorale de la station u.

Aspect économique

La collecte des données a été effectuée au niveau du HCDS. L’échantillon a été composé de 269 périmètres répartis sur 32 communes de la wilaya de Djelfa. Les indicateurs économiques ont été issus des données brutes réelles (élaborées par le HCDS), sur les périmètres aménagés (1994-2017 : période d’analyse « sans prévision »), et des données prévisionnelles à partir du 2018, calculées par nous-mêmes en fonction de la tendance enregistrée avant la fin du 2017, jusqu’à l’achèvement de réalisation du projet (1994-2023 : période d’analyse « avec prévision »). D'après Dayan (1999), l'analyse financière permettait de calculer la rentabilité et de déterminer la viabilité du projet.

La valeur actuelle nette (VAN) d’un projet d’investissement est définie comme l’actualisation de l’ensemble des flux totaux de liquidité prévisionnels pour sa réalisation (Chrissos et Gillet 2008). Autrement, la VAN doit être positif pour que l'investissement soit jugé rentable du strict point de vue de placement financier. Pour calculer la VAN, le profil d’échéancier des flux financiers du P_PP est de type d’investissement ‘Continuous Inputs - Continuous Ouputs’. D’après Boughaba (2005):

R : Recettes. I : Dépenses. i: coefficient d'actualisation.

-Taux d'actualisation égal à 10% (admis actuellement en Algérie).

Le taux de rentabilité interne (TRI), est le taux d’actualisation tel que la VAN de l’investissement soit nulle (0) (Boughaba 2005). Si le TRI est supérieur au coût du capital, le projet répond aux critères de viabilité financière.

Le délai de récupération (DR), du capital investi est la période de temps au bout de laquelle le montant cumulé des cash-flows égalise les dépenses initialement engagées (Lasry 2007).

Le TRI et le DR ont été calculés à l’aide de la méthode d'interpolation linéaire.

L’indice de rentabilité (IR) représente la VAN par unité monétaire investie dans un projet particulier (Chrissos et Gillet 2008). Autrement dit, il nous permet de mesurer le gain que rapporte une unité monétaire investie dans un projet.

R : Recettes. I : Dépenses. i : coefficient d'actualisation.

Analyse des données

Pour l’analyse des résultats, les indicateurs figurant dans le tableau 1 (richesse spécifique, richesse en annuelles, richesse en vivaces, recouvrement végétal, valeur pastorale, phytomasse des espèces spontanées, phytomasse totale, et productivité pastorale), et dans la figure 2 (superficies réalisées, productions enregistrées, dépenses, et recettes) ont été considérés comme des variables. Les données obtenues ont été encodées dans le tableur Microsoft Office Excel 2010. Le test du khi-2a été utilisé pour comparer les distributions entre la SSP et la SAP pour la même variable. Les tests d’hypothèse et l’analyse descriptives (moyenne, écart-type, etc.) ont été réalisés par le logiciel SPSS.V19. Les analyses économiques (importance relative des coûts, prix de revient, revenu, valeur actuelle nette, taux de rentabilité interne, indice de rentabilité, délai de récupération) et la comparaison de l’évolution (valeur et signe) entre les deux situations pour la même variable, ont été exécutées par le tableur Microsoft Excel. Ainsi, les données obtenues à partir de ces conjectures ont permis d’estimer la rentabilité et la viabilité du P_PP par l’approche d’analyse financière.


Résultats

Aspect biologique
La diversité floristique

Entre les deux situations SSP et SAP, il a été constaté une augmentation des thérophytes (30 espèces vs 45), chaméphytes (11 espèces vs 13), phanérophytes (5 espèces vs 9), hémicryptophytes (5 espèces vs 6) et les géophytes ont été présentée avec 3 espèces chacune. Les résultats obtenus montrent que la SSP était moins riche en nombre de famille (17 familles) comparativement à la SAP (21 familles). Dans les deux situations, nous avons noté une forte présence des familles cosmopolites, Asteraceae et Poaceae. Les Asteracees sont représentées par16 espèces (21%) dans la SSP, et 19 espèces (25%) dans la SAP. La majorité des composées (Astéracées) était représentée par les espèces annuelles telles que celles des genre Astragalus et Centaurea. Les Poaceae sont représentées par 11 espèces (14%) dans la SSP et 13 espèces (17%) dans la SAP. La majorité des graminées (Poacées était représentée par les espèces vivaces telles que Stipa tenacissima, Lygeum spartum, Aristida pungens et Aeluropus littoralis. La SSP a été caractérisée par les espèces annuelles telles que : Bromus rubens, Cutandia dichotoma, Dactyloctenium aegyptium, Schismus barbatuset, Stipa parviflora ; alors que la SAP par les espèces annuelles telles que : Bromus rubens, Cutandia dichotoma, Cynodon dactylon, Dactyloctenium aegyptium, Hordeum murinum, Schismus barbatuset, Stipa parviflora, ce qui peut expliquer la différence entre les deux situations en terme de richesses floristiques et valeurs fourragères. Les Légumineuses (Fabacées), avec leur importance fourragère, sont omniprésentes dans tous les périmètres. Elles occupaient la troisième place avec 6 espèces (8%) dans la SSP et 10 espèces (13%) dans la SAP. En SSP, les familles des Amaranthaceae, Brassicaceae et Lamiaceae renfermaient chacune trois espèces (6%) et occupaient de ce fait, la quatrième place. Par contre en SAP, les familles des Lamiaceae avec 5 espèces (7%), Brassicaceae avec 4 espèces (5%) et Amaranthaceae avec 3 espèces (4%) occupaient la quatrième, cinquième et sixième place respectivement. Sur les 17 familles recensées en SSP, 9 familles n’ont été représentées que par une seule espèce chacune. En revanche, pour la SAP, sur les 21 familles recensées, 11 familles n’ont été représentées que par une seule espèce chacune. Entre autre, on a constaté l’absence des familles de Boraginaceae, Chenopodiaceae, Papaveraceae et Plantaginaceae en SSP comparativement au SAP. Cette richesse spécifique totale diffère significativement (p < 0.001) d’une situation à l’autre. A partir des relevés floristiques effectués, on a recensé une richesse spécifique dans la SSP (54 espèces), moins importante que celle inventoriée dans la SAP (76 espèces) avec un taux de variation moyen de l’ordre de + 41% et une nette dominance d'espèces éphémères (30 espèces en SSP et 45 espèces en SAP) par rapport aux espèces vivaces (24 espèces en SSP et 31 espèces en SAP). L’analyse floristique a permis de recenser 54 espèces communes dans les deux situations en plus de 22 espèces spécifiques uniquement à la SAP. Celui-ci a généré un important changement sur le plan floristique. Le projet semble améliorer le cortège floristique dans la SAP versus à la SSP (Richesse en annuelles : 42 espèces vs 21, avec une différence très hautement significative et un taux de variation moyen de 100% ; richesse en vivaces : 13 espèces vs 11, avec une différence non-significative et un taux de variation moyen de 11%).

Le taux de recouvrement

Du point de vue spatial, le tableau 1 montre une différence très hautement significative entre la SSP et la SAP en recouvrement végétal avec un taux de variation moyen de + 159%. Le taux de recouvrement de la SSP varie de 15 à 40%, avec une moyenne de l’ordre 26% et demeurait plus faible par rapport aux sites aménagés. Celui de la SAP, varie de 45 à 85% avec un taux moyen avoisinant 67% ; ce qui représente plus de deux fois et demie celui de la SSP. Selon les relevés floristiques, la flore végétale se répartissent inégalement entre les annuelles (30 et 59%, respectivement pour la SSP et SAP) et les vivaces (9 et 16%, respectivement pour la SSP et SAP). Les photos 2 et 3 donnent une idée sur la répartition spatiale de la biomasse verte et de l’intensité de l’activité végétative dans les périmètres aménagés. Elle fait ressortir une différence remarquable de cette activité entre SSP et SAP.

Le potentiel fourrager

Les plantations ont été caractérisées par une formation claire d’arbustes de petite taille avec une hauteur moyenne de 49 à 76 cm, et un diamètre moyen de 64 à 125 cm. La comparaison des deux situations (SSP, SAP) montre qu’il y a une différence significative de la phytomasse des espèces spontanées (p < 0.05) et de la phytomasse totale (p < 0.001) (tableau 1). La phytomasse des espèces spontanées enregistrée en SAP par rapport à la SSP est égale (0.66 vs 0.25 T Ms/ha), avec une différence significative (p < 0.05) et un taux de variation moyen de + 167%.La contribution moyenne de la plantation pastorale au tapis végétal était égale à 69%, cette supériorité était appuyée par la forte biomasse produite par l’espèce introduite par rapport aux espèces spontanées (1.44 vs 0.66 T Ms/ha). En outre, la phytomasse totale la plus élevée a été enregistrée en SAP, elle oscillait entre 1.36 et 2.91 T/ha. Il en ressort qu’à l’échelle de toute la zone, la production de la SAP en matière sèche était nettement supérieure (>8 fois) à celle de la SSP (2.09 contre 0.25 T MS/ha avec un taux de variation moyen de + 750%).Concernant, la production pastorale (unités fourragères), nous avons déterminé les indices de qualité spécifique de chaque espèce qui est de 1 à 9. La valeur pastorale présentait une hiérarchie différente et très hautement significative, avec des valeurs plus élevées pour les périmètres de plantations (53 en moyenne), et un taux de variation moyen de + 1644%.Les résultats liés à la valeur pastorale dans les périmètres étudiés varient entre 1 et 5 dans la SSP et de 33 à 70 dans la SAP, soit une augmentation moyenne de plus de 17 fois. La productivité pastorale moyenne des sites aménagés a été significativement supérieure à celle des sites témoins (p < 0.001), avec un taux de variation moyen de + 958%. En SSP, elle variait entre 22 et 55 UF/ha/an avec une moyenne de 35 UF/ha/an. Par contre, en SAP, la productivité pastorale, variait entre un équivalent énergétique de 237 à 534 UF/ha/an avec une moyenne de 374 UF/ha, soit une augmentation de 10.6 fois par rapport à la SSP (Photos 2 et 3).

Tableau 1. Impacts du projet de plantation pastorale sur les paramètres de la végétation

Variables

SSP
(n = 32)

SAP
(n = 32)

Taux de
variation (%)

khi-2

sig.

Richesse spécifique

54 (3.51)

76 (5.42)

+ 41

682

***

Richesse en annuelles/100

21 (4.45)

42 (3.58)

+ 100

1 212

***

Richesse en vivaces/100

11 (1.93)

13 (1.58)

+ 11

17

ns

Recouvrement végétal (%)

26 (7.26)

67 (12.4)

+ 159

2 593

***

Valeur pastorale/100

3.06 (1.14)

53.34 (12.9)

+ 1 644

28 280

***

Phytomasse des espèces spontanées (T Ms/ha)

0.25 (0.09)

0.66 (0.18)

+ 167

29

*

Phytomasse totale (T Ms/ha)

0.25 (0.09)

2.09 (0.45)

+ 750

52

***

Productivité pastorale (UF/ha)

35.39 (7.65)

374.31 (86.9)

+ 958

107 006

***

ns : non-significative (p > 0.05) ; SSP : situation sans projet ; SAP : situation avec projet ; les valeurs représentent les écarts-type sont entre parenthèses ; sig : significativité ; * indique le degré de significativité (*** : p < 0.001, * : p < 0.05) ; les différences sont testées par le test non paramétrique de (khi-2)



a) SSP b) SAP (Plantes adultes)
Photo 2. Photos comparative des deux situations (sans et avec projet), dans la wilaya de Djelfa


Photo 3. Images satellitaires comparative des deux situations (sans et avec
projet), dans la wilaya de Djelfa; Source: HCDS, 2018
Aspect économique

On a adopté une hypothèse simplificatrice selon laquelle les dépenses et les recettes subissaient de façon identique les effets de l'inflation.

Les dépenses

Le P_PP est un projet consenti par l’Etat (fonds public), réalisé par un établissement étatique (HCDS) exonéré de l’impôt sur le revenu et il n’y a pas de recours aux crédits. Une durée de 30 ans a été retenue pour établir un échéancier des investissements (chiffrage des salaires, des achats de plant et de services, etc.). Les données financières ont été établies à partir des engagements réels du HCDS. La plantation des périmètres se déroulait en plusieurs phases : l’ouverture des trous, l’approvisionnement en plant, le semis, l’irrigation et le suivi technique. Ainsi, à travers les facteurs de production possédés pour chacun des « périmètres », nous avons identifié une homogénéité des moyens de production utilisés (humains, matériels et financiers). La rémunération de la main-d’œuvre salariée pour le semis et le gardiennage est un élément important dans la structure des charges. Elle représentait 69.6 et 72.9% des charges totales pour les deux périodes (1994 – 2017) et (1994 – 2023) respectivement. Les charges liées aux postes de dépenses « plants » correspondent à 16.6 et 14.3%, celles de « l’encadrement et suivi technique » à 5.8 et 7.5%, « Outillages » à 3.0 et 2.1%, « Maintenance et gestion d'équipement mobile » à 2.6 et 1.7% et « Irrigation » à 2.4 et 1.5%, et occupaient le deuxième jusqu’au sixième rang pour les deux périodes (1994 – 2017) et (1994 – 2023) respectivement. Les terrains étant cédés au dinar symbolique, leur loyer est de 0%. Le prix de revient moyen a été estimé à 24 433 et 38 033 DA/ha pour les deux périodes (sans et avec prévision) respectivement.

"Dépenses (I)1 en DA/an =Superficie réalisée (ha/an) X Prix de revient moyen (DA/ha)"1 : figure 2.

Les recettes

Les recettes du P_PP proviennent exclusivement de la vente du fourrage. Un scénario de vente des produits finaux a été étudié, basé sur la vente de production sur pied. La recette a été directement paramétrée par une supposition d’adéquation des normes techniques des produits finaux à la commercialisation et une supposition de vente de toute la quantité produite. Après une opération d’évaluation pastorale, estimation de la production sur pied, on a procédé au calcul des revenus en tenant compte des prix de vente de l’orge sur le marché. Le potentiel fourrager (production) récapitulé dans la figure 2 montre que la disponibilité alimentaire de la région d'étude, suite à la réalisation du projet, a enregistré une augmentation en production des fourrages. La production en UF a été nettement augmentée, avec une moyenne annuelle exprimait en millions d’UF d’environ 20.5 et 26.2 avec une progression annuelle moyenne de 1.40 et 1.78% pour les deux périodes « sans prévision » et « avec prévision », respectivement. La productivité moyenne a été estimée à 421 et 488 UF/ha/an à la fin de chaque période d’analyse, elle a été donc, 14 à 16 fois plus élevée par rapport à la productivité initiale enregistrée au début de réalisation du projet (30 UF/ha/an). Donc, la capacité de charge moyenne ovine en SAP, était estimée d’environ 1 tête/ha contre presque 0 tête ovine/ha en SSP.

"Recettes (R)1 en DA/an =Production (UF/an) X Prix de vente en équivalent d’orge (DA/UF)"1 : figure 2

Analyse de rentabilité et de viabilité
Figure 2.  Estimation de la production fourragère et calcul de la valeur actuelle nette du P_PP.
Productions (chiffres estimatifs). Chiffres prévisionnels (période allant de 2018 à 2023)
calculés en fonction des taux de croissance enregistrés pour la période allant de 1994 à 2017.
DA: Dinar Algérien. Taux de change moyen (1994-2017): 1 DA = 0.0087 USD, source: http://fxtop.com/fr/historique-taux-change.php

Le P_PP se base sur une intervention relativement compliquée de mise en œuvre tout en affichant un taux de réussite élevé. Pour un coût de production moyen entre 24 433 en fin 2017 et 38 033 DA/ha à l’achèvement du projet, il a été considéré coûteux. Quant au prix de revient de l’UF, il oscillait, pour les deux périodes d’analyses, entre 5.29 et 3.99 DA, également en faveur de la période « avec prévision ». Le revenu brut procuré par 1 dinar investi est égal à 3.81 en fin 2017 et 6.72 DA à l’achèvement du projet, donc ce projet réalisera des résultats bénéficiaires (tableau 2). A partir de la quinzième année, la VAN dépasse la valeur 0 et la situation de ce projet s'améliore lentement. La valeur actuelle nette dégagée a été importante, elle était de 1 401 296 623 en fin 2017 et a atteint 2 204 643 386 DA à l’achèvement du projet. Le taux de rentabilité interne et le délai de récupération, ont été calculés à l’aide de la méthode d'interpolation linéaire. Le TRI calculé était largement supérieur au taux d’actualisation ; il a été estimé à 24.39 en fin 2017 et 25.52% à l’achèvement du projet. Le DR était égal à plus de quatorze ans, cette période représentait presque la moitié de la période d’analyse pour reconstituer le capital investi. L’indice de rentabilité (IR) était égal à 2.44 en fin 2017 et 3.18 à l’achèvement du projet, donc strictement positif.

Tableau 2. Comparatif financier du P_PP dans la wilaya de Djelfa

Indicateurs bio financiers

SSP

SAP

Sans prévision
(1994-2017)

Avec prévision
(1994-2023)

Productivité moyenne (UF/ha/an)

presque nulle

421

488

Importance relative des coûts moyens de production

Frais personnels
69.6%

Frais personnels
72.9%

Prix de revient de l’Ha (DA)

24 433

38 033

Prix de revient de l’UF (DA)

5.29

3.99

Revenu brut procuré par 1 dinar investi (DA)

3.81

6.72

VAN (DA)

presque nulle

1 401 296 623

2 204 643 386

TRI (%)

24.39

25.52

IR

2.44

3.18

DR

14 ans + 6 mois + 17 jours

SSP : situation sans projet ; SAP : situation avec projet ; DA : Dinar Algérien ; VAN : valeur actuelle nette ; TRI : taux de rentabilité interne ; IR : indice de rentabilité ; DR : délai de récupération ; la durée de vie du projet égale à 30 ans


Discussion

Pour la diversité floristique, la classification des types biologiques a été effectuée selon Raunkiaer (1934). Ce dernier considère les types biologiques comme une expression de la stratégie d’adaptation de la flore aux conditions du milieu. Le taux élevé des thérophytes peut être influencé par les plantations pastorales qui fixent le sol et permettent le développement des plantes annuelles. D’après les résultats obtenus, l’organisation de la structure végétale pourrait être représentée schématiquement comme suit : Th>Ch>Ph>He>Ge. C’est vers une thérophytisation que se dirigeaient les structures végétales de la zone de Djelfa.

La zone étudiée a connu une très grande différence de point de vue systématique, et une répartition des taxons très inégale au sein des différentes familles botaniques entre la SSP et la SAP. Cette différence peut être expliquée par le fait qu'il y a une compétition interspécifique vis-à-vis des graminées vivaces et des composées annuelles, celles-ci sont très denses au sein des périmètres aménagés. L’importance des familles qui détiennent les premières places (Poacées, Légumineuses) pourrait s’expliquer par sa contribution globale au sein de la flore algérienne et ont été très répandues sur toute la surface de la région d'étude, par leur aire de répartition et par leur capacité d’adaptation aux différents biotopes. Le projet semble améliorer le cortège floristique dans la SAP versus la SSP. D'après Aidoud (1989), la richesse floristique en zone aride dépend essentiellement des espèces annuelles, des conditions du milieu et de la corrélation de l'ensemble des caractères (climat, sol et exploitation) et aussi de l’action anthropique. Il apparaît ainsi que le pâturage soit la cause essentielle des modifications de la composition floristique du milieu. La SSP, soumise à une forte pression animale, montre un stade de dégradation très avancé conforté par la présence des espèces de faible valeur pastorale qui deviennent de plus en plus abondantes. La faible richesse floristique pourrait s’expliquer par la présence du faciès à Peganum harmala, caractéristique des milieux dégradés et à faible valeur fourragère. En effet, Nedjraoui et Bedrani (2009) considèrent que l’apparition du Peganum harmala montre l’ampleur de l’action anthropozoïque. Alors que d'autres espèces diminuent voire même disparaissent entre autres : Schismus barbatus, Plantago albicans, Helianthemum lippii, etc. Par contre, dans la SAP, on note une certaine régénération de la flore, avec la réapparition de certaines espèces à intérêt pastoral élevé notamment Cynodon dactylon, Eruca vesicaria, Hordeum murinum, Plantago albicans et Vicia monantha. L’augmentation de la richesse floristique dans les sites aménagés a été liée à la germination des graines après la pluie, et leur capacité de croître et de fleurir rapidement. Les espèces introduites possèdent un système racinaire très développé qui lui permet d’utiliser les réserves d’eau du sol de façon efficace et de former un réseau dense susceptible d’agréger le sol et de le rendre résistant à l’érosion et est favorable pour le développement des plantes. Ces espèce sont amélioré les conditions du milieu, ce qui a permet un développement important des espèces annuelles. La richesse floristique induite par la plantation pastorale permet une remontée biologique des espèces endémiques (pastorales).

Pour le taux de recouvrement

Le taux de couverture végétale est un indicateur fiable sur l’état de la végétation, le degré de protection du sol contre l’érosion et la lutte contre la désertification. En effet, plus ce taux est élevé plus le sol s’échappe aux effets agressifs du vent, de la pluie, du ruissellement, de l'exposition directe au soleil, du réchauffement et de l'assèchement. Le taux de recouvrement de la SSP restait le plus faible par rapport aux sites aménagés. La variabilité spatiale est une caractéristique des milieux arides où la végétation est éparse. De même, les animaux omniprésents ne laissent aucun répit à cette végétation, qui est constamment pâturée. Seules les espèces peu ou pas appétibles s’échappaient aux dents du cheptel. La supériorité de la SAP, revient essentiellement à la présence de plantations, présence d’espèces produisant beaucoup de graines colonisant rapidement les espaces libres et au processus de la remontée biologique. Celui-ci a été assuré par des arbustes à croissance plus ou moins cubique, à feuilles persistantes et présentant une grande canopée lui conférant une bonne couverture végétale. En outre, ce recouvrement est représenté, pour l’essentiel, par des espèces éphémères, et qui sont étroitement tributaires, des conditions pluviométriques de l’année et de l’action anthropique. Par ailleurs, il s’est avéré que les arbustes permettent un bon développement de la végétation (ou culture) intercalaire qui améliore davantage le taux de recouvrement (Acherkouk 2013). De plus, le système de gestion appliqué dans les deux situations pourrait expliquer ces différences, en effet, un pâturage raisonné et contrôlé dans les sites aménagés, permet le retour d’espèces importantes ; en d’autres termes, la végétation a le temps nécessaire pour reprendre et se développer entre les différentes périodes de sa mise au pacage (Acherkouk 2013). Par ailleurs, les périodes de repos végétatifs sont généralement plus favorables, permettant l'installation de jeunes plantes vivaces et favorisent ainsi la germination des espèces annuelles (Yahefdhou et al 2002; Floret 1981).

Pour le potentiel fourrager

Les périmètres aménagés présentaient un taux de réussite de 55 à 85% (HCDS 2018). Nous remarquons que la phytomasse évoluait dans le même sens que le biovolume de l’espèce. Dans les stations où le taux de réussite est important (85%), la phytomasse totale a été la plus élevée. Les conditions climatiques combinées au pâturage ont eu un impact négatif notable sur la phytomasse des espèces spontanées dans les sites témoins. Le pacage aurait diminué cette variable et il y a remplacement des espèces pastorales à qualité fourragère élevée par d’autres à intérêt pastoral médiocre. C’est le cas de la majorité des steppes nord-africaines pâturées en continu et où la production moyenne ne dépasse pas 0.2 T MS/ha (Le Houerou 1995). Les principales causes de cette faible production sont le surpâturage et le défrichement des terrains pastoraux (Bourbouze et al 2001). La contribution moyenne de la plantation pastorale au tapis végétal était la plus élevée, celle-ci reviendrait à la plantation pastorale et au mode de pâturage (supposé être) rationnel (ouverture et fermeture au pacage sont contrôlées), ce qui permet aux plantes de se restituer et de produire une nouvelle biomasse. La plantation a rendu les conditions édaphiques favorables à la restauration à un cortège floristique diversifié. La pluviométrie était importante (280 mm en moyennes annuelles entre 2014 et 2017). Il faut tout de même souligner que les espèces éphémères, auraient largement contribué à l'amélioration du taux de recouvrement végétal et à l'augmentation de la production en phytomasse. Des tendances semblables ont été rapportées par Aidoud & Touffet (1996) concluant que : en l'absence du pâturage, toutes les ressources semblent s'orienter vers le maintien d'une biomasse sur pied aux dépens de la production. L’accroissement de la valeur fourragère au sein de la SAP a été principalement dû aux espèces introduites plantées. On remarque dans quelques stations que malgré la diminution du couvert végétal, la valeur pastorale augmente, ce qui pourrait être expliquée par l’existence de nombreuses espèces à intérêt pastoral très important (Plantago albicans, Viciia monantha, Eruca vesicaria, Hordeum sp, etc.). En SSP, la dégradation des parcours par l’effet du pâturage a été suivie par la baisse de la richesse spécifique, par un appauvrissement du sol et par la régression de superficies qui étaient occupée par les bonnes espèces pastorales, et a été inconfortablement accompagnée d’une baisse remarquable en quantité, en qualité et en productivité des ressources pastorales. La supériorité des sites aménagés (1 vs 0 tête ovine/ha) a été affichée grâce au projet de plantation (présence des espèces pastorales, accroissement du taux de recouvrement et de la biomasse), à la mise en repos et au mode de pâturage plus ou moins rationnel (le contrôle des espèces et effectifs des animaux, le choix de la bonne période de pacage et la maîtrise de la durée de pâturage). Le P_PP a été envisagé comme une étape vers la mise en valeur et la gestion de l'espace pastoral très dégradé. En effet, il permettait la protection de petites superficies et représentait une réserve sur pied d’aliment généralement de bonne qualité (les Atriplex, les Médicagos, et les Cactus) pour les périodes de sécheresse ou de soudures, avec une aptitude à utiliser les pluies hors saison.

La répartition spatiale de la biomasse verte et de l’intensité de l’activité végétative dans les périmètres aménagés reflète l'effet prépondérant de la technique de plantation pastorale qui est considérée comme une variable explicative de la récupération du couvert végétal. L’analyse de la dynamique de la végétation s’est révélé un excellent moyen d’investigation pour évaluer l’intensité des facteurs anthropiques (P_PP) qui contribuent à la progression de la steppe de la wilaya de Djelfa.

Aspect économique

Le HCDS s’est intervenu en parcours qui présentaient un état de dégradation très avancé, d’où en SSP, la productivité pastorale était presque nulle et par conséquent la recette enregistrée était nulle. Par contre, la production en UF a été nettement augmentée suite à la réalisation du P_PP. L’accroissement de la superficie aménagée et le facteur temps (Facteur influençant la biologie de l'espèce : développement et croissance des plantes spontanées et cultivées) semblent donc influencer positivement la croissance de la production des fourrages et par conséquent la recette enregistrée. La capacité de charge moyenne ovine en SAP, était estimée à environ 1 tête/ha. D’après Lapeyronie (1971), l'exploitation rationnelle des périmètres de plantation, sous-entend quant à elle un contrôle de la charge du bétail et des périodes de pacage en fonction des possibilités offertes par la végétation (Mars, avril et septembre).Le prix de revient de l’UF a été plus faible en période « avec prévision ». Donc, à un accroissement de la production accompagné par une baisse du prix de revient en deuxième période d’analyse, le projet réalisera de l’économie d’échelle. Il réalisera des résultats bénéficiaires, avec une valeur actuelle nette dégagée très importante, l’IR est strictement positif, donc le projet est rentable et acceptable, et il dégage une richesse très intéressante. Nous avons obtenu une différence entre le taux d’actualisation (10%) et le TRI ; cela signifie que ce projet répond aux critères de viabilité. Cette différence, étant significative, représentait une marge de sécurité. En outre, il a été clair que cette même marge peut couvrir les charges d’un éventuel recrutement selon les besoins en main-d’œuvre pour le projet. Le temps de retour sur investissement est plus de 14 ans, il s’agit donc, d’une période longue où l’investisseur a pu récupérer son argent engagé. Le DR montre seulement que ce type d'activité ne peut pas attirer des investisseurs dont l'objectif unique est un placement financier. II s'agit d'un phénomène fréquent en agriculture où la valeur du capital est plus liée à la notion d'outil de production et de patrimoine à transmettre qu'à celle de placement financier. Du fait que ce projet arrive à récupérer ses dépenses dans la quinzième année d’exploitation, ce dernier est acceptable. À la fin de la période d’analyse « avec prévision », avec un prix de revient égal à 3.99 DA/UF et sachant bien que le prix moyen de vente d’1 Kg d’orge sur le marché local pour la même période a été égal à 23.43 DA ; la marge de manœuvre a été égale à 19.44 DA, donc elle a été très importante et avec laquelle ce projet a été protégé et soutenu financièrement contre n’importe quelles perturbations financières ou fluctuations du marché en matière de l’offre et de la demande. Ainsi, le P_PP engendrait une incidence financière importante sur les périmètres aménagés.


Conclusion


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