Livestock Research for Rural Development 22 (11) 2010 Notes to Authors LRRD Newsletter

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Stratégie alimentaire des coquelets en zone tropicale: Ration complète comparée au système cafétéria

C A A M Chrysostome, F M Houndonougbo et C C Kpomasse

Laboratoire de Recherche Avicole et de Zoo-Economie, Département de Production animale, Faculté des Sciences Agronomiques de l’Université d’Abomey-Calavi,
République du Bénin Adresse: 01 BP 526 Cotonou, République du Bénin
fredericmh@gmail.com

Résumé

Une étude a été menée afin d’évaluer l’effet du système d’alimentation sur les performances bioéconomiques des coquelets en région tropicale. 150 coquelets d’un jour de la souche pondeuse ISA Brown ont été  répartis en six répétitions. Ils ont été élevés pendant huit semaines en phase démarrage et six semaines en phase croissance. Trois répétitions ont été nourries avec une ration complète (Ro) et les trois autres par le système cafétéria (Rc). La ration Rc comprenait trois pré-mélanges d’aliments qui sont respectivement énergétique, protéinique et minérale vitaminé.

 

Les résultats ont démontré que l’ingestion d’aliment et spécifiquement l’ingestion d’énergie métabolisable des coquelets Rc étaient supérieures à celles des coquelets Ro. Les coquelets Rc ont consommé moins de protéine brute que les coquelets Ro. L’ingestion des substances minérales a varié selon la ration et la phase d’élevage. Le système d’alimentation n’a pas eu d’effet significatif (P > 0,05) sur le gain de poids, l’indice de consommation, le coût alimentaire et l’indice d’efficience alimentaire des coquelets. A 14 semaines d’âge, les poids moyens des coquelets Ro et Rc étaient similaires (1311 contre 1214 g). L’indice de consommation, le coût alimentaire et l’indice d’efficience alimentaire des coquelets des rations Ro et Rc, étaient respectivement de : 5,12 contre 5,52 kg d’aliment/kg de gain de poids, 1163 contre 1184 FCFA d’aliment/kg de gain de poids et 1,60 contre 1,48 FCFA de gain de poids/FCFA d’aliment. Aucune mortalité de coquelet n’a été enregistrée dans les deux traitements alimentaires.

Mots clés: Bénin, efficience système alimentaire, ingestion de nutriments et d’énergie



Cockerels’ feeding strategy in tropical region: Complete diet compared to cafeteria system

Abstract

An experiment was carried out to evaluate the feeding system effect on bio-economic performances of cockerels in tropical region. 150 day old ISA Brown cockerels were split in six repetitions of 25 chicks each. Chicks were kept respectively during height and six weeks at starter and grower phases. Three repetitions were fed with a complete diet (Ro), and the three other were fed by the cafeteria feeding system (Rc). Three separate feeders providing mainly energy, protein and mineral plus vitamin constituted the Rc diet.

 

The results demonstrate that the feed intake and specifically, metabolisable energy intake of Rc cockerels were higher than that of Ro cockerels. The protein intake of Rc cockerels was lower than that of Ro cockerels. The intake of mineral and vitamin had varied according to the feeding system and the phase. However, the feeding system had no significant effect (P > 0.05) on the body weight gain, feed conversion ratio, feed cost and economic feed efficiency. At 14 weeks old, the average body weights of Ro and Rc cockerels were similar (1311 versus 1214 g). Feed conversion ratio, feed cost and economic feed efficiency in Ro and Rc diets were respectively 5.12 versus 5.52 kg feed/kg weight gain, 1163 versus 1184 FCFA feed / kg weight gain and 1.60 versus 1.48 FCFA feed / FCFA weight gain. No mortality was recorded in both dietary treatments.

Keywords: Benin, efficiency of feeding system, nutrients and energy intake


Introduction

Au Bénin, la volaille constitue la seconde source de viande (21%) après les bovins (38%) et avant les ovins/caprins (13%) et les porcins (7%) (Fanou 2006). La chair de coquelet  est particulièrement appréciée par les consommateurs béninois par rapport à celle des poulets de chair. Mais, les coquelets issus de souches de poules pondeuses ont une croissance lente. Malgré cela, ils sont très élevés dans les pays en développement où la disponibilité et le prix des poussins d’un jour de qualité constituent souvent des contraintes. Cependant, l’alimentation efficiente de cette catégorie animale est très peu abordée dans les activités de recherche. Or, l’alimentation représente 60 à 80% du coût des inputs en aviculture commerciale (Branckaert et al 2000).

 

L’une des stratégies permettant de réduire le coût alimentaire est le choix d’un mode approprié d’alimentation. Actuellement, la pratique de la ration complète prédomine dans les élevages, parce qu’elle est facile à gérer dans les loges d’élevage et dans le cas des mangeoires automatiques (Leeson et Summers 1979). Or, pour constituer leur ration selon leurs besoins réels et leur niveau de production, les poulets sont capables de sélectionner parmi les différents ingrédients alimentaires qui leur sont offerts séparément (Das 2005). Ainsi, l’efficience alimentaire est améliorée (Henuk et Dingle 2002 ; Olver et Malan 2000 et  Belyavin 1994) et les intrants excessifs de composantes coûteuses d’une ration complète sont évités (Emmans 1978). Toutefois, selon d’autres travaux en élevage des poulets, l’efficience du système cafétéria est similaire (Dana et Ogle 2002) ou même inférieure (McDonald et Emmans 1980) à celle d’une ration complète. Le système cafétéria d’alimentation est plus naturel (Pousga et al 2005) car chaque poulet peut choisir ses nutriments selon ses besoins physiologiques, exprimant ainsi ses appétits naturels. Des tests de préférence nutritionnelle ont montré que les oiseaux ont des appétits spécifiques surtout pour l’énergie (McDonald et al 2002) et le calcium (Larbier et Leclercq 1994), mais moins pour la protéine (Noblet et al 2007, National Research Council 1994).

 

La présente étude vise à déterminer sur la base de performances bioéconomiques, entre la pratique de la ration complète et le système cafétéria d’alimentation, la stratégie alimentaire la plus indiquée pour l’élevage des coquelets dans les conditions tropicales du Bénin.

 

Matériels et méthodes 

Rations alimentaires

 

Les traitements expérimentaux étaient constitués de deux rations ayant la même composition (Tableau 1).


Tableau 1.  Composition en ingrédients et en nutriments des rations et des pré-mélanges

Ingrédients/nutriments

Rations complètes  (Ro)

Pré-mélanges  (PM) des rations cafétéria (Rc) 

Démarrage

Croissance

Démarrage et Croissance

Ingrédients, %

 

 

Source essentiellement énergétique

(PM1)

Maïs

62

65

Son de blé

5

9,60

Huile de palme1

-

1

Tourteaux de soja

26

14

Source essentiellement protéinique

(PM2)

Tourteaux de coton

4

7

Lysine

0,10

0,10

Méthionine

0,10

0,10

Coquille d’huître

1,60

1,70

Source essentiellement Minérale et vitaminée (PM3)

Phosphate calcique

0,70

1

Sel

0,30

0,30

Prémix 2

0,20

0,20

Composition nutritionnelle

Démarrage

Croissance

Démarrage

 

Croissance

PM1

PM2

PM3

 

PM1

PM2

PM3

Matière Sèche, %

87,0

     86,9

85,0

90,5

97,0

86,3

91,2

96,6

Energie Métabolisable, kcal/kg MS

2815

2857

3161

2370

0

3139

2282

0

Protéine brute, %

18,9

15,9

8,91

44,0

0

9,09

42,7

0

Lysine, %

0,98

0,80

0,26

2,81

0

0,27

2,72

0

Méthionine, %

0,40

0,40

0,2

0,92

0

0,19

1,06

0

Acide aminé soufré, %

0,70

0,70

0,39

1,61

0

0,38

1,73

0

Calcium, %

0,80

0,90

0,03

0,32

26,2

0,03

0,29

25,8

Phosphore total, %

0,60

0,70

0,37

0,74

4,53

0,42

0,79

5,65

Sodium, %

0,10

0,14

0,01

0,02

0,12

0,01

0,01

0,10

1Huile non raffinée et non traité issue des transformations artisanales

2Composition du prémix par kg: Vitamines: A 4000000 UI; D3 800000 UI; E 2000 mg; K 800 mg; B1 600 mg; B2 2000 mg; niacine 3600 mg; B6 1200 mg; B12 4 mg; chlorure de choline 80000 mg, Minéraux: Cu 8000 mg; Mn 64000 mg; Zn 40 000 mg; Fe 32000 mg; Se 160 mg


La Ration témoin (Ro) a été servie  sous la forme complète alors que la Ration cafétéria (Rc) était faite de trois pré-mélanges d’ingrédients séparés sur la base des nutriments essentiels qu’ils contiennent. Les ingrédients ont été moulus ensemble pour la ration complète et par pré-mélange pour la ration cafétéria. Tous les aliments sont présentés sous forme farineuse. Les coquelets ont été nourris et abreuvés ad libitum. L’aliment démarrage a été distribué de 0 à 8 semaines d’âge et l’aliment croissance de 9 à 14 semaines d’âge.

 

Animaux et habitat

 

Des poussins mâles d’un jour d’âge de la souche pondeuse ISA Brown ont été achetés auprès d’un couvoir au Bénin. Dès leur arrivée, ils ont été aléatoirement répartis en deux lots de 75 poussins. Chaque lot a été ensuite divisé en trois répétitions de 25 poussins (Tableau 2).


Tableau 2.  Dispositif expérimental au début de l’essai

 

Traitements alimentaires

Ro

Rc

Nombre de poussins

75

75

Nombre de répétitions

3

3

Poids vif moyen, g

38,2 ± 0,62

38,3 ± 0,55


Ces coquelets ont été conduits sur litière de copeaux de bois. Le chauffage de la poussinière était assuré pendant deux semaines. Dans la poussinière, la température et l’humidité relative étaient respectivement, entre 30 et 33°C et entre  59 et 77%. La poussinière était éclairée 24 heures sur 24 heures. A quatre semaines d’âge, les coquelets ont été transférés dans des loges d’un même poulailler avec le maintien des trois répétitions par traitement jusqu’à la fin de l’essai à 14 semaines d’âge. Les loges étaient sous la lumière du jour. La température dans les loges était entre 26 et 30°C alors que l’humidité relative variait de 73 à 91%. La densité au sol était de 25 et 8 coquelets par mètre carré respectivement, pendant la phase démarrage et celle croissance. Les coquelets étaient pesés hebdomadairement.

 

Calcul de variables et analyses statistiques

 

A partir des données collectées, les variables suivantes ont été obtenues : Le poids vif à différents âges, le gain moyen quotidien (GMQ), la consommation journalière d'aliment, la consommation d’énergie métabolisable, de protéine brute, de calcium et de phosphore, l’indice de consommation (IC), le taux de mortalité, le coût alimentaire et l’indice d’efficience alimentaire (IEA) calculé selon Houndonougbo et al (2009) comme ci-après :


Avec :

GP : Gain de poids pendant une période donnée (kg)

PrV : Prix de vente des coquelets (FCFA/kg Poids vif) ;

Q : Quantité d’aliment consommé pendant la période de gain de poids (kg) ;

PrA: Prix de l’aliment (FCFA/kg).

Les variables ont été analysées dans le logiciel SAS version 9.1 par la procédure du General Linear Model (GLM) selon le model suivant :

Yi = μ + Ri + εi

Yi = Observation des variables dépendantes

μ = moyenne générale

Ri = Effet fixe de la ration

εi = Erreur résiduelle

 

Les valeurs moyennes des variables ont été présentées dans des tableaux avec les erreurs standards (ES) et les probabilités (P) issues de la comparaison des moyennes. L’effet de la ration alimentaire est dit significatif si P < 0,05.

 

Résultats  

Ingestion alimentaire

 

À la phase démarrage, les coquelets soumis au système cafeteria (Rc) ont consommé plus d’aliment que ceux soumis à la ration complète (Ro) (Figure 1).


 

Figure 1.  Variation de l'ingestion journalière d’aliment par les coquelets


En moyenne, l’ingestion journalière d’aliment dans ces deux rations était respectivement de 48,4 g/j contre 44,3 g/j à la phase démarrage et 91,8 g/j contre 90,1 g/j à la phase croissance. Toutefois, aux deux phases la l’ingestion d’aliment n’était pas significativement différente entre rations (P > 0,05).

 

Ingestion d’énergie métabolisable

 

Relativement à leur poids vif (PV), l’ingestion d’énergie métabolisable (EM) des coquelets décroît avec l’âge (Figure 2). A la phase démarrage, les coquelets Rc ont ingéré 21% d’énergie par gramme de poids vif de plus que ceux Ro (0,46 versus 0,38 kcal EM/g PV) alors qu’à la phase croissance la différence entre les ingestions en EM était de 16% (0,29 versus 0,25 kcal EM/g PV).



Figure 2.
  Energie métabolisable (EM) ingérée par gramme de poids vif (g PV)

Figure 3.
  Energie métabolisable (EM) ingérée par gramme de gain de poids vif

D’après la Figure 3, à la phase démarrage les coquelets Rc ont eu une plus faible efficacité en EM comparativement aux coquelets Ro (15,3 versus 12,9 kcal EM/g de gain de poids). Les coquelets Rc ont ainsi ingérée 19% de EM par gramme de gain de poids de plus que les autres. Par contre, à la phase croissance, cette différence d’efficacité en EM n’était que de 5,6% entre les deux rations Rc et Ro (17,1 versus 16,2 kcal EM/g de gain de poids).

 

Ingestion de protéine brute

 

Pendant la phase démarrage, les coquelets soumis à la ration complète ont ingérée 50% de protéine brute (PB) par gramme de poids vif de plus que ceux du lot cafétéria (0,03 versus 0,02 g PB/g PV). Par contre, à la phase croissance, l’ingestion moyenne d’aliment  était identique dans les deux lots de coquelets (0,02 g PB/g PV). La tendance initiale s’est même inversée à partir de la onzième semaine d’âge (Figure 4). Les résultats ont révélé qu’à la phase démarrage, la forte ingestion de PB dans Ro par rapport à Rc n’était pas suivie d’une meilleure efficacité protéinique. En effet, il fallait respectivement, 0,86 et 0,71 g PB/g de gain de poids ; soit environ 21% de différence (Figure 5).



Figure 4.
 Protéine brute (PB) ingérée par gramme de poids vif (g PV)


Figure 5.
 Protéine brute (PB) ingérée par gramme de gain de poids vif


Par contre, à la phase croissance, l’efficacité protéinique était presque similaire entre les coquelets Ro et Rc (respectivement, 1,10 versus 1,07 g PB/g de gain de poids) avec une différence d’environ 2,8%.
 
Ingestion de calcium et de phosphore

 

L’ingestion de calcium par gramme de poids vif et par gramme de gain de poids n’étaient pas similaire dans les deux rations Ro et Rc pendant la phase démarrage (respectivement, 1,16 versus 1,04 mg Ca /g PV et 34,0 versus  38,9 mg Ca /g de gain de poids). Les différences respectives entre rations étaient donc de 12 et 14%.

 

Mais, à la phase croissance, une ingestion plus élevée en calcium a été notée chez des coquelets Rc (1,0 versus 0,76 mg Ca/g PV), d’où une inversion de l’allure initiale de la courbe à partir de la dixième semaine d’âge (Figure 6). Il s’en est suivi une plus faible efficacité calcique (24% de différence) chez ces coquelets par rapport à ceux Ro (61,8 versus 49,8 mg Ca/g de gain de poids (Figure 7).


Figure 6.  Calcium (Ca) ingéré par gramme de poids vif (g PV) Figure 7.  Calcium (Ca) ingéré par gramme de gain de poids vif

Les données concernant l’ingestion de phosphore (Figure 8) ont montré une similarité entre les coquelets Ro et Rc à la phase démarrage (0,81 versus 0,82 mg/g PV) contre une différence de 15% à la phase croissance (0,53 versus 0,61 mg/g PV). L’efficacité  du phosphore ingéré (Figure 9) était semblable chez les deux lots de coquelets Ro et Rc à la phase démarrage (respectivement, 27,2 versus 26,7 mg P/g de gain de poids). Par contre, à la phase croissance cette tendance s’est inversée avec une légère différence de 7,2% (respectivement 34,5 versus 37,0 mg P/g de gain de poids).


Figure 8.  Phosphore total (P) ingéré par gramme de poids vif (g PV) Figure 9.  Phosphore total (P) ingéré par gramme de gain de poids vif

Croissance pondérale et indice de consommation

 

Les gains moyens quotidiens (GMQ) des coquelets étaient similaires entre rations (Tableau 3).


Tableau 3. Gain moyen quotidien (GMQ) et indice de consommation (IC) des coquelets

Ration

GMQ, g/j

IC, kg aliment/kg gain poids vif

Démarrage

Croissance

Démarrage

Croissance

Ro

10,1

16,8

4,57

6,00

Rc

9,43

15,4

5,16

6,66

ES1

0,63

1,25

0,64

0,55

Probabilité

0,43

0,44

0,52

0,41

1ES : Erreur standard


En conséquence, à la fin de chaque phase, la différence entre le poids vif moyen des coquelets Ro et Rc n’était pas significative (P > 0,05). Toutefois, les coquelets de Ro ont connu une croissance un peu plus rapide que ceux de Rc. Ainsi, le poids vif moyen étaient respectivement de  606 g versus 567g à la fin de la phase démarrage contre 1311 g versus 1214 g (soit environ 8% de différence) à la fin de l’expérimentation à quatorze semaines d’âge (Figure 10).


Figure 10.  Evolution de la croissance pondérale des coquelets


Les GMQ des coquelets étaient plus élevés en phase croissance qu’en phase démarrage. Cependant, l’indice de consommation était plus élevé à la phase croissance qu’à la phase démarrage (Tableau 3).

 

La similarité globale de l’ingestion alimentaire et des performances de croissance pondérale entre rations est renforcée par l’absence de mortalité de coquelet au cours de l’étude. Ainsi les deux systèmes d’alimentation n’avaient pas eu d’effet sur le taux de mortalité.

 

Coût et indice d’efficience alimentaires

 

A la phase démarrage le coût alimentaire par kg de gain de poids était plus faible dans la ration cafétéria que dans la ration complète (Tableau 4). Cette tendance s’est inversée à la phase croissance. Mais, à chaque phase la différence de coût alimentaire entre rations (respectivement, 8,6 et 7,3%) n’était pas significative (P > 0,05).


Tableau 4.  Coût alimentaire (CA) et Indice d’efficience alimentaire (IEA) des coquelets

Ration

CA, FCFA aliment/ kg GP1

IEA, FCFA de GP/FCFA aliment

Démarrage

Croissance

Démarrage

Croissance

R0

1069

1362

1,87

1,25

RC

984

1461

1,89

1,18

ES2

149

131

0,16

0,10

Probabilité

0,69

0,60

0,94

0,66

1 Gain de poids ; 2ES : Erreur standard


L’indice d’efficience alimentaire (IEA) qui exprime le montant gagné par unité de monnaie investie dans l’alimentation, a été légèrement plus élevé dans la ration complète que dans celle cafétéria à la phase croissance (Tableau 4). Toutefois, aux deux phases la différence entre les IEA des deux rations n’était pas significative (P > 0,05). Elle était seulement de 1,1% contre 5,9% respectivement, à la phase démarrage et croissance.

 

Discussion 

Les publications sur la nutrition et les stratégies alimentaires adoptées en élevage des coquelets sont rares. De ce fait, plusieurs résultats de cette étude ont été discutés à travers des performances obtenues en élevage de poulettes et de poules pondeuses qui sont des catégories animales issues du même processus d’amélioration génétique que les coquelets. Toutefois, le cas des poulets de chair est évoqué par moment.

 

Ingestion d’aliment et de nutriments

 

La différence d’ingestion alimentaire entre les deux types de rations serait liée à l’ingestion élevée de la source essentielle d’énergie par les coquelets du système cafétéria. L’ingestion d’aliment est fortement régulée par le niveau énergétique de l’aliment (McDonald et al 2002 ; Smith 1996) et sa présentation (Jensen 2000) car la granulation permet d’améliorer la prise d’aliment chez le poulet (Nir et al 1994 ; Quentin et al 2004). La forme farineuse de la ration complète ne permettait pas donc aux coquelets d’ingérer suffisamment d’aliment afin de satisfaire leur besoin énergétique. Les coquelets du système cafétéria tentaient donc de corriger ce déficit en consommant davantage la source essentiellement énergétique constituée surtout de petits grains de maïs qui représentait 86% du PM1. La similarité de l’ingestion alimentaire globale entre les rations est en conformité avec les résultats de Olver et Malan (2000) qui n’ont pas noté une différence significative dans l’ingestion journalière des poules pondeuses soumises aux deux systèmes d’alimentation testés.

 

Toutefois, ces résultats sont en contradiction avec ceux de Das (2005) et Henuk et al (2000) qui rapportaient respectivement que les poulettes et les poules pondeuses soumises à une ration complète avaient significativement consommé plus d’aliment que celles soumises au système cafétéria d’alimentation. Par contre, Cowan et Michie (1979) avaient démontré que l’ingestion alimentaire des poules était significativement plus élevée en système cafétéria qu’en système d’alimentation par la ration complète.

 

La forte consommation d’énergie métabolisable des coquelets du système cafétéria par rapport aux autres à la phase démarrage (21% de différence par gramme de gain de poids vif), s’est traduite par une baisse (19%) de l’efficacité énergétique. Ainsi, les coquelets, disposant des pré-mélanges essentiellement énergétique, protéinique et minérale vitaminée, ont montré une préférence accrue pour la source énergétique. Cette tendance peut être aussi due à la compensation du besoin en énergie lié aux multiples déplacements de ces coquelets en vue de s’alimenter notamment lorsqu’ils sont jeunes. Ces résultats sont similaires à ceux de Bouvarel et al (2004) qui ont noté qu’en alimentation séquentielle les poulets développaient une préférence pour l’énergie dont dans l’aliment guidait leur consommation d’un jour à l’autre. Ils contredisent par contre les travaux de Ramlah et al (1989) qui ont montré que la consommation en énergie métabolisable est réduite chez les poules pondeuses en système cafétéria.

 

Pendant la phase de croissance, les coquelets du système cafétéria ont une ingestion de 21% de protéine brute par gramme de gain de poids de moins que ceux nourris par une ration complète. Cette meilleure efficacité protéinique du système cafétéria confirme les travaux de Forbes et Covasa (1995) et de Rose et Kyriazakis (1991) sur les poulettes, et ceux de Ramlah et al (1994) sur les poules pondeuses. En effet, ces derniers ont démontré que chez les poulettes ou les pondeuses l’avantage économique majeur du système cafétéria d’alimentation était la réduction de la consommation en protéine.

 

La faible ingestion de protéine brute (PB) concomitamment avec la forte ingestion d’énergie métabolisable (EM) des coquelets du système cafétéria indique que le ratio EM/PB n’est pas similaire dans les deux traitements. Les coquelets du système cafétéria n’ont donc pas pu réguler à travers leur ingestion d’aliment, le ratio EM/PB conformément aux recommandations nutritionnelles suivies pour la formulation des rations complètes Ro (153 et 185 kcal EM/g PB respectivement à la phase démarrage et croissance). Cette défaillance de régulation est plus importante chez les jeunes coquelets. En effet, alors que l’ingestion de PB par gramme de poids vif est similaire entre les deux rations à la phase croissance (0,02 g PB/g PV), à la phase démarrage une différence de 50% est notée, ce qui a induit une faible efficacité protéinique dans Ro par rapport à Rc à cette phase de jeune âge.

 

A la phase croissance les coquelets Rc ont consommé plus de calcium par rapport à ceux Ro. Entre les deux rations, la différence de consommation de calcium par gramme de poids vif était de 23% contre seulement 8% en ce qui concerne la consommation de calcium par gramme de gain de poids. Ceci indique que relativement à leur croissance pondérale les coquelets Rc ont valorisé le surplus de calcium consommé à partir de la dixième semaine d’âge. Par contre, en ce qui concerne le phosphore, les différences étaient semblables et de l’ordre de 6% à cette même phase. La régulation de l’ingestion de calcium était donc plus effective chez les jeunes coquelets car à la phase démarrage les ingestions étaient similaires entre rations. La tendance à une surconsommation de calcium à la phase croissance par les coquelets du système cafétéria a désorganisé le ratio calcium sur phosphore (Ca/P) par rapport aux normes considérées dans Ro et qui était de 1,5 g Ca/g P aux deux phases. Elle peut s’expliquer par un besoin de consolidation du squelette chez les coquelets.

 

Croissance pondérale et indice de consommation

 

Nonobstant la différence en ingestion globale d’aliment, le gain moyen quotidien et le poids vif des coquelets Rc étaient légèrement plus faibles que ceux des coquelets Ro, sans que la différence ne soit significative. Cette légère différence de croissance pondérale pourrait être liée au surplus de protéine brute ingérée par les coquelets Ro par rapport à ceux Rc. Ces résultats sont similaires à ceux de Das (2005) qui n’avait pas enregistré de différence significative entre les poids vifs des poulettes soumises à une ration complète et au système cafétéria.

 

L’indice de consommation était légèrement meilleur chez les coquelets soumis à la ration complète par rapport à ceux du système cafétéria. Ces résultats confirment aussi ceux de Dana et Ogle (2002) qui ont rapporté des indices de consommation similaires dans les deux modes d’alimentation chez les poulettes. Ils contredisent par contre, les travaux de Olver et Malan (2000) et Ramlah et al (1989) selon lesquels le système cafétéria d’alimentation améliore l’indice de consommation chez les poules pondeuses.

 

Efficience alimentaire et rentabilité de l’élevage de coquelet

 

Globalement, on investit plus de ressource financière par kilogramme de gain de poids chez les coquelets Rc que chez ceux Ro pendant les deux phases d’élevage. De même, en investissant une unité de monnaie dans l’alimentation, la recette tirée de l’élevage des coquelets Rc était légèrement plus faible comparativement à celle tirée des coquelets Ro. Ce résultat peut s’expliquer par le prix du maïs qui est très utilisé dans l’alimentation humaine et par l’ingestion alimentaire un peu élevée chez les coquelets Rc sans qu’il ait un gain de poids conséquent. Ces résultats contredisent ceux de Emmans (1978)  et de Tauson et al (1991) qui ont trouvé que comparativement à la ration complète, le système cafétéria a permis de réduire le coût alimentaire chez les poulettes. Ils sont par contre en adéquation avec ceux de Cowan et Michie (1979) qui rapportaient que chez les poules, le coût alimentaire est plus élevé en système cafétéria qu’en ration complète.

 

Au regard des valeurs de l’indice d’efficience alimentaire (IEA) obtenues dans cette étude, l’élevage de coquelets n’est pas une activité suffisamment rentable au Bénin quelque soit le système alimentaire adopté. En effet, en considérant que le coût alimentaire représente environ 60 à 80% du coût total de production (Branckaert et al 2000), il fallait au minimum environ 1,67 FCFA de gain de poids/FCFA d’aliment investi, afin que le coût total de production soit couvert. Sur cette base, seules les valeurs des IEA de la phase démarrage (1,87 et 1,89 FCFA de gain de poids/FCFA d’aliment) permettraient d’obtenir une marge bénéficiaire. Par contre, à la phase croissance les valeurs des IEA étaient nettement plus faibles (1,25 et 1,18 FCFA de gain de poids/FCFA d’aliment) engendrant sur la même base des pertes financières. Il apparaît donc que dans les conditions commerciales de la période d’étude, la production de coquelets n’était pas suffisamment rentable comparativement à celle de poulets de chair qui selon Amoussa (2009), permettait d’obtenir respectivement, 2,43 et 1,98 FCFA de gain de poids/FCFA d’aliment, respectivement à la phase démarrage et à celle croissance dans la même période au Bénin.

 

Conclusion 


Références

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Received 13 April 2010; Accepted 9 September 2010; Published 1 November 2010

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