Livestock Research for Rural Development 22 (10) 2010 Notes to Authors LRRD Newsletter

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Valeur alimentaire pour l’ovin, des chaumes et de la jachère sur les hauts plateaux algériens

A Yahiaoui, R Chabaca* et A Larwence**

Université de Mascara. Route de Mamounia BP 305, Mascara, Algérie
* Ecole National Supérieure Agronomique, Département de Zootechnie, 16200 El Harrach, Alger
** Institut des régions chaudes de SUPAGRO, BP 5098, 34033 Montpellier Cedex, France
alarwence@yahoo.fr

Résumé

Dans le but de connaître la productivité en unité fourragère (UFL) des chaumes et de la jachère sur les hauts plateaux algériens, 100 antenaises tirées d’un troupeau de 320 sujets pâturant sur 45 hectares (charge de 7 brebis par hectare) pendant trois mois ont été utilisées en année de pluviométrie moyenne. Il apparaît que la productivité varie selon le mois d’exploitation. Elle est maximale au mois de mai pour la jachère (533 UFL/hectare) et minimale au mois d’avril (391 UFL/hectare) ; pour les chaumes, elle est maximale au mois de juillet (654 UFL/hectare) et minimale au mois de septembre (294 UFL/hectare). Néanmoins sur chaumes, des pertes de poids sont observées dès le mois d’août.

 

La valeur moyenne retenue est de 464 et 415 UFL/hectare respectivement pour la jachère et pour les chaumes.

Mots clés: bilan nutritionnel ovins, charge à l’hectare, chaumes, jachère, productivité



Evaluation of nutritive value for sheep of stubbles and fallow of Algerian highlands

Abstract

Fallow and cereal stubble represent two important resources for small ruminants grazing in dry Mediterranean. In order to know the productivity of forage stubble and fallow in the highlands of Algeria, 100 yearling sheeps are selected from a flock of 320 animals grazing on 45 hectares (stocking rate: 7 sheeps per hectare) during three months, was used in a year of average rainfall. It appears that productivity varies according to time. It reaches a maximum in May for the fallow (533 lactation feed unit / ha) and a minimum in April (391 lactation feed unit/ h! a), for stubble, the maximum IS in July (654 lactation feed unit/ ha) and the minimum in September (294 lactation feed unit/ ha). However with the stubbles, weight losses are observed in the month of August.

The average values proposed was 464 and 415 lactation feed unit / ha respectively for the fallow and stubble.

Key words: fallow, nutritional assessment, productivity, sheep, stocking rate, stubbles


Introduction

Dans toutes les zones arides et semi arides de la planète où la culture de céréales est possible (isohyète minimale de 300-350), l’élevage ovin est étroitement lié à la céréaliculture (Landau et al 2000). En Algérie, des trois systèmes de production ovine pratiqués, oasien, pastoral et agropastoral (Rondia 2006) ce dernier est dominant. Il associe pleinement la céréaliculture à son système alimentaire (Kanoun et al 2007). Cette pratique qui succède au séjour des animaux sur les parcours steppiques assure généralement du mois de mars au mois d’octobre, jachère et chaumes au troupeau (Houmani 2002). Ils fournissent entre 2,5-3,0 milliards d’unités fourragères sur les 8 milliards annuellement produits (MADER 2007).

 

Afin d’assurer une meilleure gestion de ces parcours, la connaissance de la valeur alimentaire des chaumes de céréales et de la jachère est importante, car elle permettrait à l’éleveur de calculer la charge de sujets à l’hectare, de prévoir des compléments éventuels afin d’assurer la régularité de la production et de mieux négocier le prix de location de l’hectare de chaumes ou de jachère. 

 

De nombreuses méthodes plus ou moins complexes existent, les revues de Holechek  et al (1982) et de Khinouche (1992), en présentent les principales. Elles passent par la connaissance de la quantité de biomasse produite, la composition botanique et chimique du bol alimentaire, sa digestibilité et l’ingestibilité des espèces végétales peuplant le parcours. En règle générale, ces études sont contraignantes pour l’animal (méthode des piquets; sac de récolte des fèces; appareillages divers) et parfois invasives (fistules du rumen, fistule oesophagienne). Certes, l’approche phytoécologique (Hirche et al 1999) permet d’estimer la valeur pastorale du parcours (Nedjraoui 2002) mais l’animal est alors moins impliqué.

 

Dans ce travail, nous étudions pour l’année 2004 (année à pluviométrie moyenne selon la définition de Hirche et al (2007)) et pour une charge de 7 sujets à l’hectare, la valeur alimentaire des chaumes et de la jachère dans la région de Tiaret située à 350 km à l’ouest d’Alger, au point d’isohyète 400-450 mm.

 

Matériel et méthode 

Dans un troupeau de 320 sujets, sont tirées de façon aléatoire, 2 lots de 50 antenaises de race Ouled djellal âgées de 15 mois pesant 24 à 27 kg. Les animaux des 2 lots constitués ont un poids homogène d’environ 25 kg. Identifiées par des boucles aux oreilles, elles sont réintroduites dans le troupeau d’origine. Les deux lots d’animaux ainsi constitués ont été suivis durant leur séjour sur jachère (fin mars-fin juin) et sur chaumes (fin juin, fin septembre).

 

La superficie de chaumes et de jachère visitée par le troupeau est de l’ordre de 45 ha dans un rayon de 5 km, soit une charge de 7 moutons par ha. Durant toute cette période (mars-septembre), les animaux n’étaient pas complémentés le soir lorsqu’ils rentraient sous abri couvert ou en enclos mais y étaient obligatoirement abreuvés.

 

Aucune modification n’a été apportée aux pratiques traditionnelles des éleveurs, entre autres : nombre d’heures pâturées, mélange de catégories d’animaux, présence permanente des béliers.

 

Mesures

 

Les animaux sont rentrés sur jachère fin mars après une double pesée sur deux jours successifs, le 8 et le 9 avril (le poids moyen constituant le poids initial), après 15 jours d’adaptation.

 

Chaque mois, à partir de fin avril, le matin avant la sortie au pâturage, les antenaises sont pesées à jeun en commençant toujours par le même lot. Les pesées sont arrêtées au mois de septembre, les animaux étant sur chaumes. A cette période, certaine antenaises anonymes étaient gestantes de deux mois environ sans que cet état puisse néanmoins introduire des erreurs dans les résultats des pesées.

 

Calculs          

 

Le GMQ (gain moyen quotidien) est calculé pour les 2 lots. Les besoins d’entretien en énergie (BE-E) sont calculés sur la base de 0,03 UFL/kgP 0,75 (INRA 1989). Cette valeur a été globalement confirmée pour la race Ouled djellal par Triki et Larwence (2008). Afin de calculer la quantité d’UFL (Unités fourragères lait) consommée en moyenne par mois, la valeur calorifique de 100 g de gain de poids a été estimée à 0,32 UFL et à 0,27 UFL pour 100 g de pertes de poids (INRA 1978). Les besoins en PDI pour 100 g de gain ou de pertes de poids sont fixés de façon égale  à 22 g/ kgP 0.75 (INRA 1978). Le niveau alimentaire (NA) atteint par les animaux chaque mois, est déduit.

 

S’agissant d’animaux pâturant dans un rayon de 5 km de leur point d’enclos, une provision supplémentaire d’UFL a été prévue en sus des besoins d’entretien de base sur deux niveaux : provision de 10 % (BE-E10) à titre d’observation  et de 30 % (BE-E30). Cette dernière valeur ayant été indiquée par l’INRA (1978).

 

Traitement statistique des données

 

Une analyse de variance à un facteur (XL. STAT) a été appliquée aux résultats selon le modèle:

Y i j = m + a i + e i j;

Où :

Yi j: est la variable expliquée;
m: la moyenne générale,
a i: l’effet facteur et
e i j: l’erreur résiduelle du modèle.

Puis, le test de Student a comparé les facteurs deux à deux.

                                                          

Résultats et discussion                                                                                             

La région céréalière de Tiaret où s’est déroulée l’expérience, fournit traditionnellement, jachère et chaumes en pâture aux ovins. Elle constitue une zone d’accueil pour les troupeaux venant des zones steppiques, au cours des migrations d’été dites de «Achaba». Au cours de l’expérience, 3 mortalités par Coenuroses ont été enregistrées: 1 dans le lot 1 et 2 dans le lot 2, l’effectif expérimental était donc respectivement de 49 et de 48 sujets.

 

Variation de poids des animaux durant la phase de croissance

 

Les pesées ont été arrêtées fin septembre pour les deux lots. De fin mars à fin septembre c'est-à-dire de l’entrée en jachère jusqu’à la sortie des chaumes, le gain moyen de poids des lots 1 et 2 était respectivement de 5,8 et de 5,1 kg (Tableau 1), soit un GMQ faible sur toute la période de 35 et de 32 g (p > 0,05).

 

Analysées par support alimentaire, les variations de poids ne sont pas les mêmes. Sur jachère (fin mars-fin juin), le gain de poids moyen a été de 3,9; le lot 1 étant supérieur au lot 2: 4,3 kg contre 3,4 (p< 0,05). Sur toute la période, le GMQ enregistré sur jachère a été de 55 g  (Tableau 1).  Il a été maximum au mois de mai (87 g) puis est tombé à 29 g fin juin.

 

Sur chaumes (entrée fin juin, sortie fin septembre), le poids des sujets des lots 1 et 2 a été croissant. Il est passé de 28,6 kg fin juin à 32,3 fin juillet, soit des GMQ de 125 g en moyenne pour les deux lots (120 et 130 g, respectivement pour les lots 1 et 2).


Tableau 1.  Variations de poids des antenaises selon le support : jachère ou chaumes

 

Poids, kg

GMQ, g

Moyenne GMQ
Lot 1+Lot 2

Lot 1

Lot 2

Lot 1

lot 2

Période jachère

9 avril (1)

24,9 a

24,6 a

-

-

-

27Avril

25,5 a

25,6 a

35 a

59 a

47 a

28 Mai

28,7 b

27,1 b

107 b

67 b

87 b

21 Juin

29,2 b

28,0 b

21 c

38 c

29 c

Moyenne Jachère

27,2

26,3

62

49

55

Gain de poids

4,3

3,4

-

-

3,9

Période chaumes

20 Juillet

32,8 a

31,9 a

120 a

130 a

125 a

19 Août

32,2 a

31,2 a

- 20 b

- 24 b

-22 b

21 Septembre

30,7 b

29,7 b

-50 c

-50 c

-50 c

Moyenne chaumes

31,9

30,9

17

19

18

Gain de poids, kg

- 2,1

- 2,2

-

-

- 2,1

Moyenne générale

Mars-sept

29,9

28,9

35

32

33

Gain de poids, kg

5,8

5,1

-

-

-

 (1) entrée sur jachère le 25 mars, double pesée de début d’expérience 9 avril après 15 jours d’adaptation ;
GMQ : gain moyen quotidien ; Dans une même colonne et pour chaque période, les valeurs non suivies d'au moins une lettre commune, diffèrent significativement au seuil de 5%.


Puis, le GMQ a décru : – 22 g en fin août et – 50 g en fin septembre à la sortie des chaumes. Sur ce support, le poids des animaux est plus fluctuant que sur jachère. Néanmoins, grâce à la forte croissance réalisée en juillet, le bilan entrée-sortie de chaumes est positif (+ 1,5 et + 1,7 respectivement pour le lot 1 et 2).

 

Sur l’ensemble de la période mars-septembre, le bilan global a été de 33 g de GMQ se décomposant en moyenne à 55 g pour la période jachère et 18 g pour la période chaumes.

 

Bilans nutritionnels des animaux sur jachère et sur chaumes

 

Sur la base de trois hypothèses de besoins en énergie d’entretien (BE-E) des animaux au pâturage (0,03; 0,033 et 0,039 UFL/kgP0, 75, respectivement 0; +10 et +30 % d’allocation), nous avons calculé les besoins d’entretien et les quantités d’UF ingérées, tenant compte du GMQ réalisé et mesuré ; il en est découlé le calcul du niveau alimentaire atteint par les animaux sur jachère et sur chaumes. Les résultats apparaissent dans le Tableau 2.


Tableau 2.  Bilans nutritionnels des animaux sur jachère et sur chaumes

Paramètres nutritionnels et GMQ

Lot 1

BE-E30

Lot 2

BE-E30

Hypothèses BE (moyenne 2 lots)

BE-E30

BE-E10

BE-E0

Période jachère

P 0.75moyen, kg

12,1

11,8

11,9

11,9

11,9

BE en UFL                                                             

0,47

0,46

0,47

0,39

0,36

UFL pour GMQ

0,20

0,16

0,18

0,18

0,18

UFL totale ingérée (UFLTI)

0,67 a

0.62 a

0,65 a

0,57 a

0,54 a

NA ration

1,42 a

1,35 a

1,39 a

1,46 a

1,50 a

GMQ, g

62

49

56

56

56

BE en PDI, g/j

31

30

31

31

31

PDI pour GMQ, g

14

11

13

13

13

Total PDI ingéré, g

45

41

43

43

43

Période chaumes

P 0.75moyen, kg

13,4

13,1

13,3 b

13,3

13,3

BE en UFL                                                             

0,52

0,51

0,52

0,44

0,40

UFL pour GMQ

0,05

0,06

0,06

0,06

0,06

UFL totale ingérée

0,57 b

0,57 a

0,58 b

0,50 b

0,46 b

NA ration

1,10 b

1,12 a

1,11 b

1,14 b

1,15 b

GMQ, g

17

19

18 b

18 b

18 b

GMQ : gain moyen quotidien ; BE-E : besoin d’entretien de base (0), +10 et 30 %. GMQ ;  NA : UFLTI/BE.
Dans une même colonne et pour chaque période, les valeurs  non suivies d'au moins une lettre commune, diffèrent significativement au seuil de 5%


Sur jachère, le NA était de 1,39 pour un BE-E30  à 1,46 et 1,50 respectivement pour un BE-E10 et pour BE-E0 En moyenne, les UFL ingérées étaient plus importantes au mois de mai puisqu’elle approchait 0,80 en BE-E30.

 

Sur chaumes, en moyenne  le NA est resté proche de 1 (1,10 à 1,15) en relation avec  la faible performance de croissance réalisée (inférieure à 20 g de GMQ). Mais, il a approché 2 au mois de juillet pour BE-E0.

                                                  

Capacité productive en ULF des chaumes et de la jachère

 

Les résultats du Tableau 3 montrent que pour un GMQ donné, si les besoins en énergie d’entretien de la race Ouled djellal sont de 0,03 UFLkgP0,75 d’une part et que d’autre part ces besoins ne sont pas modifiés au pâturage lorsqu’ils parcourent 10 km par jour, la production d’UFL par la jachère et par les chaumes seront respectivement de 384 et de 348. Cette production serait de 412 et 374 pour une augmentation de 10 % des BE-E et de 464 et 415 pour une augmentation de 30 %. Les variations observées selon la période de pâture étaient attendues. Néanmoins, elles sont importantes: - 30 % pour la jachère entre le mois de mai et fin juin, - 60 % entre juillet et septembre pour les chaumes.


Tableau 3.  Productivité (UFL/ha) des soles jachère et chaumes selon trois hypothèses de besoin énergétique d’entretien des moutons

Mois

GMQ

Besoins totaux

Production UFL/ha

BE-E30

BE-E10

BE-E0

BE-E30

BE-E10

BE-E0

Jachère

Avril

56 a

0,66 a

0,58 a

0,54 a

469 a

412 a

384 a

Mai

87 b

0,75 b

0,68 b

0,64 b

533 b

483 b

455 b

Juin

24 c

0,55 a

0,48 c

0,44 c

391 c

341 c

313 c

Moyenne

56 a

0,66 a

0,58 a

0,54 b

464 a

412 a

384 a

Chaumes

Juillet

125 a

0,92 a

0,84 a

0,80 a

654 a

597 a

568 a

Août

-22 b

0,47 b

0,44 b

0,40 b

334 b

313 b

284 b

Sept

-50 c

0,36 c

0,30 c

0,27 c

256 c

213 c

192 c

Moyenne

18 b

0,58 b

0,53 a

0,49 b

415 b

374 b

348 b

GMQ: gain moyen quotidien; BE-E: besoin d’entretien de base (0), +10 et 30%.
1. Pour une sole donnée (jachère ou chaumes) et par mois, les valeurs  non suivies d'au moins une  lettre commune, diffèrent significativement au seuil de 5%. 2. Entre soles, pour leur moyenne respective, les valeurs  non suivies d'au moins une lettre commune, diffèrent significativement au seuil de 5%.


Discussion

Sur la valeur alimentaire des chaumes et de la jachère

Les chaumes ne sont pas constitués que des résidus de céréales restant au sol après la récolte. Ils sont composés également d’adventices qui peuplent le sol et que les animaux broutent avec profit (Gerbaud et al 2001). Leur valeur alimentaire dépend en outre de la localisation géographique (la valeur des chaumes et de la jachère suit le gradient de pluviosité) et de la hauteur de coupe. Elle dépend aussi, du précédent cultural, de la composition floristique de la sole qui résulte elle-même de la nature et de la quantité des intrants utilisés (engrais, produits phytosanitaires, irrigation) et de la pluviométrie.

 

Elle dépend enfin de la composition de la biomasse laissée sur le terrain et en particulier de : la proportion de grains, très variable, qui peut atteindre exceptionnellement certaines années, 20 à 30 % de la biomasse au Maroc (Guessous 1992), 10 % en Algérie (Houmani 2002), 7 % en Afrique du Sud (Brand et al 1999); elle est en général de 2 à 3% en Israël, en Espagne, au Portugal, en Syrie et au Maroc (Landau et al 2000); la proportion de feuilles de rachis et de tiges. La composition chimique donnée par les auteurs est comparable: 4-6 % pour les matières azotées, 48-59 % pour ADF au moment de l’entrée dans les chaumes. Après un mois de passage, Houmani 2002, indique pour l’Algérie, une teneur en cellulose en forte augmentation (50 à 58 %) et celle des matières azotées en diminution (teneur passant de 4,7 à 2,2 %). Ces variations ont été rapportées par tous les auteurs, elles sont d’autant plus fortes et rapides que la charge animale est élevée (Brand et al 1999).

                                                                                                                 

De même que pour la composition des chaumes, la digestibilité de la matière organique est très variable,  tout comme les quantités de matière sèche ingérées. Elles varient chronologiquement avec la composition chimique (Brand et al 1999; Landau et al 2000 ; Houmani 2002; Tedjari et al 2008).  

Ainsi, la valeur est maximale au mois de juillet,  durant lequel, la consommation d’UFL est au total de 0,92 UFL (BE-E30). La biomasse était alors riche en grains, en feuilles de blé et en espèces spontanées jeunes. Cette valeur était de 0,47 en août et de seulement 0,36 en septembre (Tableau 3) contre des besoins théoriques de 0,52 UFL (BE-E30). Dans ces conditions, les pertes de poids constatées, étaient inévitables.

 

De même, Guessous (1992) observe au Maroc que si avec une charge correcte (12 sujets à l’hectare), les ovins gagnent du poids pendant les 4 premières semaines de pâturage sur chaumes de céréales, à partir de la 5ème semaine, de pâturage, tous les sujets ne recevant pas de complémentation perdent du poids. Néanmoins, la diminution de la consommation de MS de chaumes  s’explique aussi par les fortes chaleurs des mois d’août à septembre qui, fait bien connu, fait diminuer l’ingestion des fourrages (Morand-Fehr et Doreau 2001).

 

Comme pour les chaumes, les mêmes variations s’observent pour la jachère où la prise de poids maximale se situe au mois de mai (Tableau 3). Les animaux ont pu alors, consommer 0,75 UFL (BE-E30). Selon Yahiaoui (2010), à cette période, la végétation (33 % de légumineuses, 42 % de graminées et 25 % d’autres espèces) est au stade végétatif, et montaison, plus abondante, riche en azote (13,4 % ± 5,2), raisonnablement pourvue en cellulose (32,2 % ± 9,4) et de digestibilité de l’ordre de 60 %. Tedjari et al (2008) pour la plaine de Sétif, et Landau et al (2000) pour toute la région méditerranéenne ont indiqué des digestibilités de la matière organique comparables.

 

Cette consommation est tombée à 0,55 UFL/j/animal au mois de juin et était de 0,66 au mois d’avril. Ramos et al (2010) observent les mêmes variations de consommation d’UFL sur jachère et préconisent une amélioration de la végétation par ensemencement, d’espèces, notamment : Moricandia arvensis, Vicia ervilla et Medicago sativa notamment. Néanmoins, la quantité d’UFL ingérée sur jachère est plus régulière et est en moyenne supérieure à celle consommée sur chaumes. Dans ces conditions, aucune perte de poids n’a été enregistrée comme ce fut le cas pour les chaumes. Pour ces derniers, une complémentation apportant 0,25 UFL/sujet/j pourrait être envisagée dès la fin du 2ème mois de séjour ceci d’autant plus que beaucoup d’éleveurs sortent les animaux des chaumes au mois d’octobre et même novembre et que certaines brebis sont gestantes.

 

Sur la capacité productive en ULF des chaumes et de la jachère

 

La production en UFL des soles de chaumes et de jachère n’a pas à notre connaissance fait l’objet d’études à partir de mesure directe de la consommation des animaux. Les valeurs officielles habituellement utilisées (Nedjraoui 2002) obtenues par une approche phytoécologique (Hirche et al 1999) sont de 320 UFL et 250 UFL par hectare, respectivement pour les chaumes et pour la jachère. Il s’agit d’UF Leroy en vigueur en Algérie. L’expression en UF lait porterait ces valeurs à 350 et à 275. Le niveau alimentaire et la charge animale à l’hectare ne sont pas indiqués.

 

Les résultats de calculs de la productivité des  supports alimentaires que nous avons présentés sont compris ici comme la quantité d’unités fourragères à l’hectare que l’ovin peut valoriser dans les conditions d’un besoin en UFL pour l’entretien de 0,03/kgP0,75 d’un GMQ de 60 et de 20 g respectivement pour le support jachère et chaumes, d’une charge de 7 sujets à l’hectare, en année de pluviométrie moyenne et pour des niveaux de besoins d’énergie d’entretien variant de 100 à 130 %.

 

Dans ces conditions, on voit qu’en moyenne, pour un GMQ d’environ 60 g sur jachère et selon le niveau des BE-E, la quantité d’UFL que doit fournir la sole par hectare et pour un séjour de 72 jours est respectivement de 384 ; 412 et 464. De même, pour un GMQ sur chaumes, de 20 g (proche de l’entretien), la productivité sera de 348; 374 et 415 UFL par hectare (pour un séjour de 91 jours) avec un maximum de près de 600 UFL/hectare au mois de juillet.

 

Pour valider  ces valeurs de productivité, les dépenses d’activité physique (marche et mastication) qui génèrent des dépenses de BE-E supplémentaires doivent être précisées. De nombreux travaux dans ce domaine ont été effectués dans les pays à grande tradition de pâturage semi arides afin de pouvoir mieux ajuster les apports complémentaires d’aliments aux besoins des animaux : Farrell et al (1972) (Australie); Cañas et al (2003) (Perou) ; Lachica et Aguilera (2005) (Espagne); Animut et al (2005) (USA); Landau et al (2006) (Israël). Le regroupement des résultats obtenus donne en moyenne : 3,08 joules/kg de poids/m de distance parcourue en horizontal et 29,52 joules en marche verticale.

 

Pour un poids moyen des animaux du troupeau de 320 sujets de 32 kg, un BE-E de 0,03 UFL/kgP0, 75 et pour des animaux pâturant dans une zone de 5 km de l’enclos, soit 10 km de marche par jour en terrain horizontal, la dépense énergétique supplémentaire est de  0,14 UFL par animal, soit 35 % des BE-E de base de 0,41UFL d’un sujet de 32 kg. Les besoins totaux sont donc de 0,55 UFL. Il est intéressant de constater que ces 35 % de besoins supplémentaires en BE-E est très proche de l’hypothèse de 30 % de départ. Cependant, même en terrain plat, ces besoins peuvent atteindre 70 % (Landau et al 2000 ; Landau et al 2006).

                                                                                                                       

En terrain vertical, les distances parcourues restent limitées  et la descente n’est pas consommatrice d’énergie supplémentaire. Néanmoins, l’allocation peut atteindre 100 % des besoins de base (INRA 1978). On peut ici retenir par défaut l’hypothèse BE-E30 pour calculer la productivité des deux soles. En moyenne, sur une centaine de jours d’exploitation, pour un GMQ de 55 g/j et pour une densité de 7 brebis à l’hectare, la productivité en UFL est de 464 pour la jachère. Pour les chaumes, elle sera de 415 UFL/ha pour des animaux proches de l’entretien (20 g de GMQ).

 

Ces résultats sont supérieurs de 25 % et de 34 % aux valeurs habituellement données : 350 et 275 UFL (Nedjraoui 2002), respectivement pour la jachère et pour les chaumes. Si l’on souhaite seulement maintenir les animaux à poids constant sur jachère, 128 UFL supplémentaires seront libérées par hectare, soit une augmentation de la charge de 4 moutons par hectare. La charge totale sera donc de 11 sujets sur toute la période de séjour sur jachère.

 

Le même raisonnement en moyenne pour les chaumes montre que pour maintenir les animaux à poids constant, la charge sera de 15 au mois de juillet, 9-10 au mois d’août et seulement 5 au mois de septembre.


Conclusion


Références bibliographiques

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Received 10 August 2010; Accepted 22 September 2010; Published 1 October 2010

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