Livestock Research for Rural Development 34 (7) 2022 | LRRD Search | LRRD Misssion | Guide for preparation of papers | LRRD Newsletter | Citation of this paper |
L’objectif de notre étude est de contribuer à la connaissance du comportement germinatif de deux espèces emblématiques du Sahara algérien, Acacia tortilis var raddiana et A. nilotica var adstringens. Dans cette optique, des graines des deux espèces, récoltées au massif du Hoggar (Sahara algérien), ont été mises à germer sous trois contraintes habituellement présentes dans leur biotope : la contrainte thermique, saline et osmotique ou hydrique. Les résultats montrent un comportement différent des deux espèces. La vitesse de germination est meilleure chez A. tortilis sous les différents traitements. La capacité germinative (CG) est similaire pour toutes les températures testées à l’exception de 15°C qui fait chuter la germination d’A.nilotica jusqu’à 11 %. Pour la même température, la germination d’Acacia tortilischute jusqu’à 80 % sans que cela soit significatif. A.tortilis tolère un stress salin de 350 mM (avec une capacité germinative de 21,1 %) alors que la germination d’ A.nilotica s’annule pour les concentrations supérieures à 150 mM. La même tendance s’observe pour la contrainte osmotique. A.tortilis présente une capacité germinative de 26,7% à une concentration de PEG de 240 g/l alors que l’A.nilotica ne tolère pas une concentration supérieure à 40 g/l. L’ensemble des données obtenues montre une plus grande capacité adaptative de d’A.tortilis face aux différentes contraintes étudiées. Ces résultats indiquent une capacité adaptative plus importante face aux contraintes du milieu et expliqueraient partiellement sa plus large répartition dans le Sahara algérien. Ils peuvent contribuer à une meilleure maitrise de la multiplication de ces deux espèces in situ ou en ex situ dans le cadre d’un éventuel aménagement agro pastoral des espaces sahariens.
Mots clés : Acacia, Algérie, adaptation, contraintes abiotiques, capacité germinative
The aim of our study is to contribute to the knowledge of the germination behavior of two emblematic species of the Algerian Sahara, Acacia tortilis var raddiana and A. nilotica var adstringens. To this end, seeds of both species, collected in the Hoggar massif (Algerian Sahara), were germinated under three constraints usually present in their biotope: thermal, saline and osmotic or hydric constraints. The results show a different behavior of the two species. The germination speed was better in A. tortiliss under the different treatments. The germination capacity (GC) was similar for all temperatures tested except for 15°C, which decreased the germination of A. nilotica to 11%. For the same temperature, the germination of Acacia tortilis drops to 80% without this being significant. A.tortilis tolerates a salt stress of 350mM (with a germination capacity of 21.1%) while the germination of A.nilotica is cancelled for concentrations above 150 mM. The same trend is observed for osmotic stress. A.tortilis shows a germination capacity of 26.7% at a PEG concentration of 240g/l while A.niloticane does not tolerate a concentration higher than 40 g/l. These results indicate a greater adaptive capacity to environmental constraints and would partially explain its wider distribution in the Algerian Sahara. They can contribute to a better control of the multiplication of these two species in situ or ex situ in the framework of a possible agro-pastoral development of the Saharan spaces.
Key words: Acacia, Algeria, adaptation, abiotic constraints, germination capacity
Dans le Sahara algérien où les précipitations sont rares (moins de 50 mm par an) et très irrégulières, les représentants du genre Acacia constituent des espèces clés de voute. Ils contribuent au maintien d’écosystèmes et d’une biodiversité particulière (Médail et Quézel, 2018).En outre, ces légumineuses arborées procurent aux populations autochtones des services innombrables (fourrage, bois de chauffage et pharmacopée traditionnelle essentiellement). Acacia nilotica (objet de cette étude) est même planté dans les jardins au vu des qualités fourragères de ses graines (observations personnelles ; Sahki et Sahki, 2004). Elles ont été proposées pour être utilisées dans la grande muraille verte africaine (Ba, 2010).
Les sécheresses récurrentes et l’action anthropique rétrécissent leur habitat (Quezel et al 1963, Ozenda 1991, Bensaid et al 1996, Chenoune 2005, Benghanem et al 2016). Les changements climatiques en œuvre et à venir pourraient amplifier ce phénomène de désertification (Mirzabaev et al 2019). Il en est ainsi des habitats des deux espèces objets de cette étude :A. nilotica var. adstringens et d’A. tortilisvar. raddiana. Nous avons observé l’absence de régénération chez le seul peuplement d’A. nilotica existant au Hoggar (Sahki et Sahki, 2004), ainsi que dans beaucoup de stations à A. tortilis (observations personnelles).
De la capacité de ces espèces à s’adapter, dépendra leur survie, notamment lors du stade de développement le plus critique qu’est la germination comme l’ont montré Baskin et Baskin (2014) sur d’autres espèces désertiques. Flores et al (2017) et Fengyan et al (2019) ont indiqué que dans ce type d’écosystèmes, les espèces qui montrent une réponse germinative optimale seraient appelées à devenir dominantes. Une meilleure connaissance des contraintes abiotiques à la germination de ces deux espèces d’Acacia s’ avère donc nécessaire, que ce soit pour comprendre leur dynamique ou bien dans le cadre d’une restauration écologique des espaces à climat aride ou saharien.
La dissémination des graines de ces deux espèces est essentiellement assurée par les mammifères sauvages et domestiques. Cependant leur passage par le tractus digestif de ces animaux n’assure pas la levée de l’inhibition tégumentaire inhérente aux graines de ces deux espèces (Danthu et al 2003).
En Afrique du Nord, la germination de ces deux espèces a été peu étudiée contrairement à l’Afrique sub-saharienne(Argaw et al 1999, Danthu et al 2003, Danthu et al 1992, Teketay 1996, Ndour 1997, Ndour et Danthu 1998, Sy et al 2001). C’est en Tunisie (Parc National de Bouhedma à climat aride) que les contraintes abiotiques à la germination d’A. tortilis ont été le mieux étudiées(Jaouadi et al 2010, Jaouadi et al 2013).
En Algérie, les études consacrées à cette espèce sont fragmentaires. Bensaid (1988) s’est intéressé à l’effet de la lumière et de la température sur la germination d’A. tortilis dans la région de Béchar; Kebbas et al (2013) ont étudié l’action du stress hydrique sur la même espèce. A. nilotica n’a pas fait objet d’études en Algérie, excepté l’étude de Kheloufi et Mansouri (2017) sur la scarification chimique des graines de cette espèce.
C’est pour compléter ces travaux que nous avons entrepris l’étude de la germination des graines d’ A. nilotica var. adstringens et d’A. tortilisvar.raddiana soumises à un stress thermique, hydrique et salin.
La récolte des graines des deux espèces a été réalisée à Tamenrasset précisément au niveau du massif du Hoggar (Sud Algérien). La région d’étude s’étale sur deux stations situées respectivement sur les berges de l’oued Ihenkes (Altitude 1469 m, 22°519N et 5°356 34E) pour l’A. tortilis et l’oued Imzeguene pour l’A. nilotica (altitude1150 m, 22°3469 N et 5° 23 71E) (Figure 1).
X: Station d’Ihenkes X: Station d’ Imzeguene |
Figure 1. Localisation géographique de la zone d’étude |
Pour chaque espèce, dix arbres ont été échantillonnés. Tamanrasset, la ville la plus proche des deux stations se caractérise par un une faible pluviométrie annuelle (49,3 mm), avec de fortes irrégularités annuelles ; la hauteur d’eau variant de 0,9 mm en 1973 à 166 mm en 2005. Prés de 80 % des pluies occurrent de Mai à Octobre. La température moyenne annuelle est de 22,2°C, la maximale de 35,9 °C en juillet et la minimale de 6,8°C en Janvier (source : Office National de la Météorologie ; période : 1969 à 2011).
Le poids de 1000 graines et la teneur en eau ont été mesurés pour caractériser les graines des deux espèces (Photo 2 a, b).
Photo 2a. Photos récoltes des graines d’ nilotica (massifs du Hoggar) | Photo 2b. Photos récoltes des graines d’ l’A. tortilis (massifs du Hoggar) |
On dénombre au hasard 03 répétitions de 100 graines que l’on pèse chacune en grammes par une balance de précision.
On dénombre au hasard trois répétitions de 50 graines pour chaque espèce d’Acacia. Les graines prélevées sont pesées avant et après séchage pour déterminer le poids frais et le poids sec. Le séchage s’effectue à l’étuve réglée à une température de 105°C, pendant 24h.
La formule ci-dessous exprime le pourcentage d’eau rapporté au poids frais (Mazliak, 1998).
Teneur en eau (TE) = (Poids frais-Poids sec) X100 / Poids Frais.
Avant de procéder aux tests de germination, les graines sont trempées dans l’acide sulfurique pur à 98%pour lever la dormance tégumentaire (Danthu et al 1992, Ndour, 1997). Des traitements préliminaires ont montré que l’immersion des grainesd’Acacia nilotica pendant 60 mn et des graines d’ A.tortilis pendant 30 minutes donne les meilleurs taux de germination.Ensuite les graines sont rincées à l’eau distillée.
Les graines traitées sont ensuite soumises aux températures suivantes : 15°C, 30°C, 40°C et 45°C. L’action de la salinité a été étudié en arrosant les graines avec des solutions à différentes concentration de sel (0,50, 100, 150, 200, 250, 300, 350 mMol). Le stress hydrique a été simulé par l’utilisation de solutions à concentrations croissantes de polyéthylène glycol (PEG 6000) : 0 g/l, 10 g/l, 20 g/l, 30 g/l et 40 g/l.
Comme le taux de germination de l’Acacia tortilis était proche de celui du témoin pour les concentrations sus-citées, nous avons testé d'autres concentrations plus élevées de PEG-6000 : 80g/l, 120 g/l, 180 g/l, 240 g/l et 300 g/l; ensuite le potentiel osmotique a été calculé en bars selon l’équation de (Michel et Kaufman, 1973).
Tous les tests concernant le stress salin et hydrique ont été réalisés à 30°C et à l’obscurité. Le comptage des graines (par la sortie de la radicule) s’est effectué quotidiennement pendant 15 jours. Les paramètres retenus sont la capacité germinative ou le taux de germination final et la vitesse de germination. Celle-ci est exprimée en temps moyen de germination en jours (TMG) qui se calcule selon la formule de (Mazliak, 1998).
Tous nos tests ont été réalisés avec trois répétitions de 30 graines. Après analyse au test de normalité de Shapiro-Wilk, une analyse de la variance a été réalisée, suivie d’un test de comparaison de moyennes (Neumann et Keuls) lorsque la différence est significative au seuil de 5 %.
Quand les résultats ne suivent pas la loi normale, il est fait appel à un test non paramétrique (Kruskl-Wallis) suivi du test de Wilcoxon en cas de significativité des résultats. Le logiciel R (version 3.4.1/2017) est utilisé pour tous les tests.
. Capacité germinative (CG) et le temps moyen de germination (TMG) d’ A.tortilis.
· Capacité germinative (CG) et le temps moyen de germination (TMG) d’ A.nilotica.
· Effet de la température sur la capacité germinative (CG) et le temps moyen de germination (TMG) d’A.tortiliset A. nilotica.
· Effet du NaCl sur la capacité germinative (CG) et le temps moyen de germination (TMG)
d’A.tortiliset A. nilotica.
· Effet du PEG6000 sur la capacité germinative (GC) et le temps moyen de germination
(TMG) d’A.tortiliset A. nilotica.
La teneur en eau et le poids de 1000 graines sont donnés dans le tableau 1.Ces résultats montrent que la teneur en eau des graines des deux espèces est relativement proche et permet de les classer dans la catégorie des graines orthodoxes.
Le poids de 1000 graines révèle que les graines d’A.nilotica sont beaucoup plus lourdes que celles d’A.tortilis.
Tableau 1. Caractéristiques des graines d’A.tortiliset A. nilotica |
|||
Espèces |
Teneur en eau (%) |
Poids de 1000 graines |
|
A.tortilis |
6,020 |
46,590 |
|
A.nilotica |
6,773 |
198,590 |
|
Les résultats obtenus révèlent des différences significatives entre les traitements et les espèces, pour les paramètres de comparaison retenus (CG, TMG) (Tableau 2). Les graines des deux espèces ne germent pas à 45°C.
Tableau 2. Effet de la température sur la capacité germinative (CG) et le temps moyen de germination (TMG) d’A.tortilis et A. nilotica |
||||||
Espèces |
Temperature
|
CG
|
Similarité statistique |
TMG (Jours) |
Similarité statistique |
|
A.tortilis |
30 |
93,200±0,093 |
a |
1,880±0,020 |
d |
|
A.tortilis |
15 |
80,000±0,060 |
a |
5,060±0,020 |
bc |
|
A. nilotica |
30 |
92,200±0,001 |
a |
5,571±0,014 |
b |
|
A. nilotica |
15 |
11,000±0,003 |
b |
8,050±0,095 |
a |
|
A.tortilis |
40 |
92,100±0,013 |
a |
4,700±0,044 |
c |
|
A. nilotica |
40 |
96,600±0,016 |
a |
5,470±0,013 |
b |
|
Les chiffres suivis d’indices différents (a, b, c, d) sont différents (p<0,05). |
a capacité germinative des deux espèces (de 92 % à 96 %) est proche pour toutes les températures à l’exception de 15°C où l’A.tortilis montre un meilleur taux de germination (80 %) alors que la germination chez A. nilotica n’est que de11%.Cependant, la vitesse de germination est meilleure chez A. tortilis. A titre d’exemple, à 30°C, elle est de 1.88 jours chez A.tortilis et de 5,57 jours chez A. nilotica. La hausse de la température de germination fait augmenter le TMG chez A.tortilis et mais n’a pas d’effet sur A.nilotica.
La baisse de la température de germination fait augmenter le TMG chez les deux espèces (5,065 jours pour l’A.tortilis et 8,055 jours pour l’ A.nilotica).
Les résultats obtenus révèlent des différences hautement significatives entre espèces et entre traitements au seuil de probabilité fixé (Tableau 3).
Ces résultats montrent que la capacité germinative chute à 25,6% pour une concentration de NaCl de 100 mMol et s’annule à 250 mMol pour l’ A.nilotica alors que pour cette concentration, la CG est de 65,60 % chez l’A.tortilis.
Le TMG augmente avec l’augmentation des concentrations de sel dans la solution d’arrosage chez les deux espèces.
Chez l’A.tortilis, il passe de 1,25 jours pour une concentration de 50 mM à 7,077 jours pour une concentration de 300 mM. Chez l’ A.nilotica, il passe de 5,81jours pour le témoin à 9.427jours pour une concentration de 200 mM.
Tableau 3. Effet du NaCl sur la capacité germinative (CG) et le temps moyen de germination (TMG ) d’A.tortilis et A. nilotica |
|||||||
Concentration |
CG |
Similarité |
TMG |
Similarité |
|||
A.nilotica |
0 |
80,00 ±0,006 |
a |
5,810 ±0,003 |
a |
||
50 |
55,60 ±0,003 |
ab |
7,167± 0,006 |
b |
|||
100 |
25,60 ± 0,000 |
bc |
7,773±0,0138 |
b |
|||
150 |
5,600 ± 0,003 |
cd |
9,427±0,0009 |
c |
|||
200 |
4,400 ±0,003 |
d |
9,000±0,005 |
c |
|||
100 |
94,400±0,012 |
a |
2,603±0,06 |
a |
|||
50 |
93,300±0,006 |
a |
1,250±0,039 |
b |
|||
A. tortilis |
0 |
92,200±0,019 |
ab |
1,773±0,036 |
c |
||
150 |
76,700±0,009 |
abc |
2,614±0,050 |
d |
|||
200 |
72,700±0,006 |
bc |
3,679 ±0,032 |
d |
|||
250 |
65,600±0,014 |
cd |
4,443±0017 |
e |
|||
300 |
24,400±0,003 |
d |
7,077±0,112 |
f |
|||
350 |
21,100±0,006 |
d |
6,010±0,031 |
f |
|||
Les chiffres suivis d’indices différents (a, b,c,d) sont différents (p<0,05). |
Les résultats obtenus révèlent des différences hautement significatives entre les traitements et les espèces, pour les paramètres de comparaison retenus (CG, TMG) (Tableau 4).
Tableau 4. Effet du PEG6000 sur la capacité germinative (GC) et le temps moyen de germination (TMG) d’A.tortilis etA. nilotica |
|||||||
Species |
PEG6000(g/l) |
CG (%) |
Similarité statistique |
TMG (Jours) |
Similarité statistique |
||
A. tortilis |
0 |
92,200±0,009 |
ab |
1,730±0,037 |
a |
||
10 |
94,300±0,006 |
a |
1,580±0,003 |
a |
|||
20 |
88,900±0,006 |
bc |
1,609±0,002 |
a |
|||
30 |
93,330±0,003 |
ab |
3,100±0,058 |
b |
|||
40 |
93,300±0,010 |
ab |
2,560±0,035 |
c |
|||
80 |
86,700±0,006 |
bc |
3,500±0,030 |
c |
|||
120 |
92,200±0,003 |
ab |
2,420±0,001 |
c |
|||
180 |
90,000±0,006 |
b |
2,230±0,052 |
c |
|||
240 |
26,700±0,003 |
c |
3,700±0,14 |
d |
|||
300 |
00,00 |
||||||
A. nilotica |
0 |
80,000±0,012 |
a |
5,810± 0,120 |
a |
||
10 |
68,900±0,006 |
ab |
7,167± 0,077 |
b |
|||
20 |
68,900±0,012 |
bc |
7,773±0,094 |
b |
|||
30 |
34,400±0,009 |
cd |
9,427±0,150 |
c |
|||
40 |
21,100±0,009 |
d |
9,000±0,136 |
c |
|||
Les chiffres suivis d’indices différents (a,b ,c, d) sont différents (p<0,05). |
L’A.tortilis tolère des concentrations plus élevées de PEG dans la solution d’arrosage que l’A. nilotica. Il continue à germer (CG = 26,7%) à une concentration de PEG de 240 g/L alors que chez l’A.nilotica, la germination s’annule pour une concentration supérieure à 40 g/L.
La vitesse de germination diminue avec l’augmentation du stress hydrique exercé par le PEG. Le TMG est de 1,727 jours pour le témoin ; il passe à 3,7jours quand la concentration de PEG est de 240 g/L. La même tendance est observée chez A.nilotica. Le TMG est de 5,81 jours chez le témoin et de 9 jours pour une concentration de PEG égale à 40 g/L.
La germination est plus rapide chez A. tortilis dans pratiquement tous les cas de figure. Ce qui constituerait un caractère adaptatif important dans un milieu où les précipitations annuelles peuvent se concentrer sur quelques jours, voire quelques heures. Des résultats analogues ont été retrouvés par Wilson (1998).
Rappelons que les graines d’A. tortilis sont plus moins lourdes que celles d’A. nilotica (Tableau1).
La relative lenteur de la germination d’A. nilotica peut s’expliquer par une imbibition plus lente par rapport aux graines d’ A.tortilis comme l’a signalé Wilson et Witkowski (1998). Un tégument épais avec un parenchyme palissadique large et sclérifié peut constituer un obstacle à la pénétration de l’eau vers l’embryon comme l’ont montré Venier et al (2012) sur Acacia aroma, A.caven et A.atromentoria.
Nos résultats montrent que la température optimale est de 30°C. Cela correspond aux températures de l’été qui est aussi la saison pluvieuse au Hoggar. Les deux espèces ne supportent pas les températures extrêmes de l’ordre de 45°C ; cependant, elles germent facilement mais plus lentement à 40°C.
A. nilotica est plus sensible à un abaissement de la température puisque sa capacité germinative chute à 11% alors que l’A. tortilis maintient une capacité germinative égale à 80%. Cela peut être un des facteurs explicatifs de l’absence de l’A. nilotica au-dessus de 1200 mètres d’altitude sous forme de peuplement. Les résultats sont en accord avec les études antérieures (Bensaid 1988, Abulfatih 1995,Teketay 1996, 1998; Ndour et Danthu 1998, Danthu et al 2003, Jaouadi et al 2010, Jaouadi et al 2013).
Le sel a un effet inhibiteur sur la germination des deux espèces. Cependant le seuil de tolérance diffère selon l’espèce. L’A.nilotica ne tolère pas une salinité supérieure à 150 mMalors que la capacité germinative d’A.tortilis est de 21% pour une concentration de sel de 350 mM équivalente à 21g/l. En plus de la réduction de la capacité germinative, le sel retarde la germination et ralentit sa vitesse. Cela est surtout visible chez A.nilotica (Tableau 2).
Jaouadi et al (2010, 2013) retrouvent le même type de résultats sur A.tortilis. Le stress salin fait chuter significativement le taux de germination à partir de 9g/l. Mais les graines gardent une capacité germinative de 21% à 22g/l de Nacl. Ndour et Danthu (1998) ont montré dans leur étude sur 9 espèces d’Acacia, qu’A. nilotica var tomentosa et A.nilotica var adansonii ont une germination relative qui chute significativement pour des concentrations de sel de 5 à 10 g/l. La germination d’ A. eherenbergiana, une espèce largement distribuée au Hoggar, chute jusqu’à 11% et celle d’A. seyal s’annule pour une concentration de Nacl de 350 mM (Ben zetta et al 2017). Cette action du sel sur la germination résulterait d’une difficulté des graines à s’hydrater suite à un potentiel osmotique élevé et à l’action négative des ions Na+ et Cl- sur les structures et les complexes enzymatiques cellulaires (Manchanda et Garg 2008, Moraisa et al 2012).
La différence de tolérance entre les deux espèces peut s’expliquer par une concentration plus élevée de l’ion Calcium chez les graines d’ A. tortilis par rapport à l’A.nilotica, comme l’a montré (Rehman et al 2000).
Les deux espèces n’ont pas le même comportement face à un stress hydrique croissant. L’Acacia nilotica baisse sa capacité germinative jusqu’à 21,1% pour une concentration en PEG de 40g/l.
L’A.tortilis montre une résistance plus élevée puis qu’elle ne baisse significativement sa capacité germinative (26,63 %) qu’à 240 g/l, équivalent à -6,26 bars selon la formule de Michel et Kaufman (1973).Sa germination s’annule pour une concentration de PEG de 300 g/l, équivalent à -9,49 bars.
Ces résultats sont en accord avec ceux de Ndour et Danthu (1998) qui retrouvent les mêmes tendances chez les deux espèces. Cependant, par rapport aux nôtres, leurs résultats montrent une plus grande résistance d’ Acacia tortilis qui germe à un potentiel hydrique de -21 bars.
La valeur limite du potentiel hydrique toléré par l’A. tortilis (-8bars),retrouvée par (Jaouadi et al 2010) est plus élevée que le nôtre alors que celle retrouvée par (Kebbas et al2013)(-10 bars) est assez proche de la nôtre. L’A. eherenbergiana semble mieux tolérer le stress osmotique puis que il présente une germination de 21% pour un potentiel hydrique de -10 bars (Ben zetta et al 2017).
Nous tenons à remercier la DGRSDT qui a contribué à financer cette étude, L’INRF et notamment la station de Tamanrasset pour son appui logistique lors de l’échantillonnage et le laboratoire de l’IMEBE (Université d’Aix Marseille) qui a mis à disposition sa base de données lors de notre séjour à Marseille.
A la lumière des résultats de cette étude, il ressort que :
Abulfatih H A, 1995 Seed germination in Acacia species and their relation to altitudinal gradient in south-western Saudi Arabia. Journal of Arid Environments, 9: 171-178.
Argaw M, Teketay D and Olsson M, 1999 Soil seed flora, germination and regeneration pattern of woody species in an Acacia woodland of the Rift Valley in Ethiopia. Journal of Arid Environments 43: 411-435.
Ba A T 2010 Grande muraille verte: choix des espèces végétales.IN: Le projet majeur Africain de la grande muraille verte: concepts et mise en œuvre Marseille: IRD Editions.DOI : https://doi.org/10.4000/books.irdeditions.2106.
Baskin C C and Baskin J M 2014 Seeds: Ecology, Biogeography, and Evolution of Dormancy and Germination, second ed. Academic Press, San Diego, CA.
Ben zetta H, Amrani S and Nacer A 2017 Effects of pre-germination treatments, salt and water stresses on germination of Acacia ehrenbergiana hayne and Acacia seyal del. (mimosoideae): two algerian native species. Applied ecology and environmental research, 15(4): 355-368.
Benghanem A N, Boucheneb N, Benhouhou S, O’Hanrahan B and Medail F 2016 Acacia tortilis var. raddiana communities in the northwestern Algerian Sahara. Botany Letters, 163 (3): 289-306.
Bensaid S 1988 Le genre Acacia Miller en Algérie. Annals INA. El-Harrach (Alger), 12(1): 547-550.
Bensaid S, Ait Mohand Let Echaib B 1996 Évolution spatio-temporelle des peuplements d’Acacia tortilis (Forsk) Hayne raddiana (Savi) Brenan dans les monts Ougarta (Sahara nord-occidental). Sécheresse (Montrouge), 7: 173-178.
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