Livestock Research for Rural Development 31 (3) 2019 Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Facteurs de variation de la croissance et la viabilité d’agneaux D’Man en oasis algériennes

A Boubekeur, M T Benyoucef1, A Bousbia2, A Slimani, A Maaraf et M Lounassi

Institut National de la Recherche Agronomique INRAA, Station d’Adrar, Adrar, Algérie
ma.boubekeur@gmail.com
1 Département Zootechnie, Ecole Nationale Supérieure Agronomique ENSA, Alger, Algérie
2 Département de science naturelle et de vie, Université 8 mai 1945, Guelma, Algérie

Résumé

Les performances de croissance et de viabilité de 232 agneaux D’Man ont été collectées entre 2012 et 2018 à la station INRAA d’Adrar afin de déterminer les facteurs qui influencent ces performances. Les agneaux mâles ont réalisé des poids et des GMQ plus élevés que les femelles. Les agneaux simples ont été plus lourds à différents âges et ont cru plus rapidement que les agneaux nés doubles et multiples. L’effet de ce facteur s’atténue avec l’augmentation de l’âge des agneaux. Cependant, l’âge de la mère et la saison d’agnelage n’ont pas exercé d’effet significatif sur leur croissance. La mortalité globale entre la naissance et 90 jours d'âge a été de 10,3% avec une forte concentration de pertes pendant les 10 premiers jours. Elle a été significativement plus élevée en été (13,3%) qu’au printemps (9,4%), en automne (7,8%) et en hiver (8,0%). Aussi, 38,5% des mortalités ont été observées chez les agneaux de faible poids à la naissance (moins de 1,5 kg). Les naissances en été, les portées multiples, les faibles poids à la naissance et le sexe constituent des facteurs de risque importants pour la croissance et la viabilité des agneaux D’Man. Le choix de la saison d’agnelage (éviter les fortes chaleurs), l’amélioration alimentaire en périodes critiques et l’amélioration sanitaire devraient améliorer la croissance et réduire la mortalité des agneaux.

Mots-clés: mortalité, mouton, prolificité, saison


Factors of variation in growth performance and viability of D'Man lambs in Algerian oases

Abstract

The growth and viability performances of 232 D'Man lambs were collected between 2012 and 2018 in the experimental INRAA Adrar to determine the factors that influence their growth and viability. The male lambs achieved higher weights and GMQ than females. Single lambs were heavier at different ages and grew faster than double and multiple born lambs. The effect of this factor diminished with increasing lamb age. However, the age of the mother and the lambing season did not have a significant effect on the growth of the lambs. The overall mortality from birth to 90 days of age was 10.3% with a high concentration of loss during the first 10 days after birth. It was significantly higher in summer (13.3%) than winter (8.0%), spring (9.4%) and fall (7.8%). 38.5% of mortalities were observed in lambs with low birth weight (less than 1.5 kg). Births in the summer, multiple litters and low birth weights were important risk factors for the growth and viability of the D'Man lambs. The choice of the lambing season (avoid hot temperatures) and improved alimentation at critical times and sanitary conditions should improve the growth and reduce the lamb mortality.

Keywords: mortality, prolificacy, season, sheep


Introduction

La race ovine D’Man est la race locale des oasis du Sud marocain et du Sud-ouest algérien. C’est l’une des principales races ovines prolifiques au monde (Boujenane 2003). En Algérie, son berceau est situé dans les palmeraies du Touat, Gourara et Tidikelt (Bouix et Kadiri 1975). Le but de l’élevage de cette race est la production d’animaux de boucherie surtout pour les fêtes religieuses et familiales ; mais les faibles taux de croissance et de viabilité des agneaux entravent l’évolution de cette spéculation dans cette région (Boubekeur et Benyoucef 2012).

Plusieurs études ont montré que l’augmentation du nombre des agneaux nés par mise bas affecte négativement le taux de croissance et de viabilité de l'agneau surtout au cours de la période périnatale (Scales et al 1986, Analla et al 1997, Gootwine et al 2008). L’amélioration des taux de croissance et de viabilité des agneaux augmente la rentabilité au niveau des élevages et cela ne peut être réalisé qu’après identification des facteurs associés à cet effet (Kirk et Anderson 1982).

Le but de ce travail est ainsi d’évaluer les performances de croissance et de viabilité des agneaux D’Man en station expérimentale et de déterminer les facteurs qui influencent ces paramètres pour pouvoir améliorer les performances des ovins de cette race en Algérie.


Matériel et méthodes

Sources de données

Cette étude a été effectuée dans la station expérimentale d’Adrar de l’Institut National de la Recherche Agronomique d’Algérie, située à environ 5 km au sud-ouest du chef-lieu de cette wilaya à la latitude 27° 49 N et la longitude 0° 11 E, et à l’altitude de 279 m. Elle est localisée dans l’étage bioclimatique hyperaride avec une pluviométrie négligeable de moins de 50 mm par an.

Entre 2012 et 2018, 232 agneaux de race D’Man ont été suivis pour évaluer les performances de croissance et de viabilité. Ces agneaux sont issu d’un troupeau de race D’Man exploité dans un système d’agnelage accéléré, avec une mise à la reproduction de tout le troupeau tous les 8 mois (3 agnelages en 2 ans). L’alimentation des agneaux a été uniquement lactée au cours du 1er mois de leur vie. À partir du 2ème mois, les agneaux ont reçu à volonté un mélange de concentré composé d’orge, de son du blé, de rebuts de dattes et de CMV (complément minéral vitaminé). Les agneaux ont été vaccinés contre l’entérotoxémie à l’âge d’un mois et à 90 jours.

A la naissance, les agneaux ont été pesés, identifiés et leur date de naissance, sexe et mode de naissance ont été enregistrés. Ils ont encore été pesés une fois par semaine jusqu’à l’âge de 3 mois. Les agneaux sont restés entiers; ils n’ont subi ni castration ni caudectomie. Le sevrage, pratiqué en une seule fois pour l’ensemble des agneaux, a été fait 70 jours après la naissance et les mâles ont été séparés des femelles au plus tard à 3 mois.

Les paramètres de croissance mesurés ont été : le poids à la naissance (PN), à 30 jours (P30J), et à 90 jours (P90J), le gain moyen quotidien entre 10 et 30 jours (GMQ10-30) et entre 30 et 90 jours (GMQ30-90), ainsi que la viabilité des agneaux entre la naissance et 3 mois. La mortalité des agneaux a été enregistrée et l’on a essayé d’en préciser la cause principale.

Analyses statistiques

Toutes les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel de statistique SPSS / PASW 20. Les statistiques descriptives pour les variables étudiées ont été calculées. Toutes les moyennes des résultats ont été calculées avec leur écart-type. L’analyse des résultats de mortalité des agneaux exprimés en pourcentage (%), a été réalisée suivant le test de khi-carré (χ2). La différence statistique significative a été déclarée à P < 0,05. Une analyse de la variance des effets fixes a été faite pour identifier les sources importantes de variation, en utilisant la procédure du modèle linéaire général de SPSS. Les effets fixes incluent la saison d’agnelage avec 4 niveaux (automne, hiver, printemps et été), le sexe de l’agneau avec 2 niveaux (mâle, femelle), le rang d’agnelage des brebis avec 7 niveaux (1 à 7) et le mode de naissance avec 4 niveaux (simple, double, triple et quadruple).


Résultats et discussion

Performances de croissance

Les paramètres statistiques des variables de croissance des agneaux D’Man sont récapitulés dans le Tableau 1. Les poids moyens des agneaux étaient de 2,6 kg à la naissance, 7,6 kg à 30 jours et 17,7 kg à 90 jours. La vitesse de croissance a été de 165 g/j entre 10 et 30 jours et 181 g/j entre 30 et 90 jours. Les différents paramètres étudiés ont montré une variabilité remarquable avec des coefficients de variation supérieurs à 18%. Les performances moyennes obtenues dans notre étude confirment plusieurs résultats avancés auparavant sur cette race dans d’autres régions d’élevage (Kerfal et al 2005, Ibnelbachyr et al 2007, Chniter et al 2011 et Chniter et al 2014).

Tableau 1. Paramètres statistiques des variables de croissance des agneaux D’Man étudiés.
Variables Effectif Moyenne Ecart-type CV (%) Minimum Maximum
Poids à la naissance (kg) 232 2,6 0,7 27,7 1,0 5,2
Poids à 30 jours (kg) 210 7,6 1,5 19,8 3,9 12,7
Poids à 90 jours (kg) 208 17,7 3,2 18,1 9,0 26,3
GMQ 10-30 (g/j) 210 164 42 25 69 296
GMQ 30-90 (g/j) 208 181 44 24 57 300
GMQ: Gain Moyen Quotidien, CV: Coefficient de Variation
Facteurs de variation des performances de croissance

Les moyennes ajustées des poids à la naissance, à 30 jours et à 90 jours et des GMQ 10-30 jours et 30-90 jours par facteur de variation sont résumées dans le Tableau 2.

Tableau 2. Effet du sexe, de la saison, de mode de naissance de l’agneau et de l’âge de la mère sur les performances de croissance des agneaux D’Man
Facteurs N PN P30J P90J GMQ1030 GMQ3090
Sexe F 0,71 7,58 4,80 10,7 3,25
Signification ns *** ** *** *
Femelle 89 2,57 7,21 17,1 153 177
Mâle 143 2,65 7,80 18,1 172 184
Mode de naissance F 58,7 35,9 11,9 7,44 2,22
Signification *** *** *** *** ns
Simple 59 3,31 8,79 19,2 184 186
Double 119 2,58 7,47 17,7 161 182
Triple 38 2,04 6,31 16,4 154 180
Quadruple 16 1,79 5,87 14,2 135 149
Saison de naissance F 0,77 0,80 2,89 1,25 3,32
Signification ns ns * ns *
Automne 77 2,60 7,81 18,5 173 191
Eté 98 2,57 7,46 17,4 162 177
Hiver 25 2,72 7,49 17,9 162 186
Printemps 32 2,76 7,44 16,6 157 163
Rang d'agnelage F 1,48 2,09 4,77 1,82 5,97
Signification ns ns *** ns ***
1 51 2,57 7,39 16,9 160 171
2 58 2,73 8,05 19,3 174 199
3 40 2,62 7,45 18,6 162 200
4 25 2,80 7,96 17,0 175 162
5 28 2,30 7,15 17,3 165 181
6 17 2,65 6,95 16,1 140 163
7 13 2,65 7,70 16,0 169 148
*** p<0,001; **p<0,01; *p<0,05; ns: corrélation non significative (p>0,05)

Chez les agneaux des différences de poids entre mâles et femelles, pour les poids à âge types (30 et 90 jours) et pour les différents GMQ étudiés ont été observées. Néanmoins le facteur sexe ne semble pas avoir eu d’effet sur le poids à la naissance des agneaux (2,6 kg en moyenne). Cette valeur similaire est due au nombre élevé des agneaux mâles nés multiples par rapport aux femelles. Après la naissance, les agneaux mâles ont enregistré des poids supérieurs aux femelles à l’âge de 30 et 90 jours. Cette supériorité pondérale pour les agneaux mâles est reflétée également par le gain moyen quotidien à différentes périodes: 172 g/jour contre 153 g/jour pour les GMQ 10-30 j et 184 g/j contre 177 g/jour pour les GMQ 30-90 j.

Ces résultats relatifs à l'effet significatif du sexe de l'agneau sur les performances de croissance des agneaux sont conformes aux résultats rapportés par Bouix et Kadiri (1975), Analla et al (1997), Kerfal et al (2005), Chniter et al (2011) et Ibnelbachyr et al (2014).

De façon générale, l’alimentation des agneaux est exclusivement lactée et leur croissance dépend uniquement des performances laitières de leurs mères durant la période naissance - 30 jours au cours de laquelle le sexe n’a pas d’effet significatif. Par contre, la supériorité des mâles a augmenté à partir de l’âge d’un mois avec le début d’ingestion d’aliments solides. Cela est dû aux différences dans les profils hormonaux entre les mâles et les femelles pendant le jeune âge, favorisant des taux de croissance différents par la suite (Ebangi et al 1996).

Les agneaux nés simples ont réalisé des poids et des GMQ plus élevés que ceux nés doubles, triples et quadruples. Ces différences évoluent en fonction des âges types (Tableau 2). A titre indicatif, des différences observées en faveur des agneaux simples ont été de l’ordre de 2,9 kg à 30 jours et de 5,0 kg à 90 jours. Cette situation est reflétée par les gains des poids correspondant aux différents âges-types. Cependant, Chniter et al (2011) ont signalé que l’effet du mode de naissance sur le poids est plus prononcé durant la période 10-30 jours d’âge où les agneaux sont en compétition pour le lait maternel. Le lien négatif entre la taille de la portée et la croissance de l'agneau est la plupart du temps attribué à une réduction de la quantité de lait disponible par agneau (Zidane et al 2015). Ceci est probablement dû au fait que pour les brebis ayant une mise-bas multiple, bien qu’elles produisent plus de lait, la quantité en surplus n’est pas suffisante pour compenser l’augmentation des besoins. Cette moindre croissance des agneaux nés multiples s’atténue un peu quand les agneaux approchent de l’âge de 90 jours, ce qui s’explique par une croissance compensatrice durant la période post-sevrage (Analla et al 1997). Cela montre que les agneaux nés multiples ont tendance à compenser le retard de croissance enregistré au début de leur vie. Cette tendance a été également observée sur les agneaux de race D'Man par Boujenane et al (1991), Kerfal et al (2005) et Chniter et al (2011).

La saison a influencé significativement le poids des agneaux D’Man à l’âge de 90 jours et le GMQ à cet âge et n’a pas eu d’effet significatif sur les autres paramètres. Ce résultat n’est pas en accord avec ceux rapportés par Boujenane et al (1991), Chniter et al (2011) et Rekik et al (2008) qui ont montré que la saison de naissance a un effet significatif sur la croissance des agneaux D’Man. Les résultats rapprochés entre les quatre saisons pourraient être une forme d’adaptation aux pratiques d’élevage dans la région d’étude où les animaux restent en stabulation permanente; ils sont toujours protégés du froid et de la chaleur estivale.

A l’âge de 90 jours, les agneaux nés en été sont déjà en plein automne et ils profitent des conditions de climat favorables pour leur développement. Par contre, le gain de poids pour les agneaux nés au printemps diminue avec les grandes élévations de température durant la période estivale. Lahlou-Kassi et al (1988) ont rapporté que la croissance post-sevrage est déprimée quand elle se produit pendant l'été, mais surtout lorsque l'animal est exposé au soleil. Cet effet n'a pas été causé par une diminution de la prise alimentaire, mais par une diminution de l'efficacité de la conversion alimentaire.

Les brebis du troupeau D’Man étudié avaient un rang d’agnelage variant de 1 à 7. L'âge de la mère ne semble pas avoir eu d’effet significatif sur les paramètres de croissance étudiés excepté le poids à 90 jours et le GMQ 30-90 jours du fait du nombre élevé des mises bas multiples observées chez les brebis âgées par rapport au jeunes brebis de moins de 24 mois. Cette observation ne semble pas rejoindre celle faite par d’autres auteurs parmi lesquels Chniter et al (2011) et Analla et al (1997) qui ont rapporté une influence significative de l'âge de la mère sur le poids de l'agneau. Les agneaux issus de mères de moins de deux ans (moins de 3 mise-bas) ont eu des poids plus faibles, du fait que leurs mères n’étaient pas encore arrivées à leur pleine maturité (Analla et al 1997). Quant à Duguma et al (2002) ils ont signalé que les jeunes brebis sont encore en croissance, de sorte que la concurrence entre la croissance fœtale et maternelle pourrait être une explication pour donner naissance à des agneaux plus petits.

Mortalité des agneaux D’Man

Les résultats de l’étude indiquent que la mortalité globale des agneaux D'Man a été de 10,3% durant la période naissance - 90 jours (Tableau 3). Ce taux de mortalité enregistré est légèrement élevé par rapport à celui rapporté par Ibenelbachyr et al (2007) pour la même race dans les oasis du Sud marocain (9%). Par contre ce taux est plus faible par comparaison au taux (13,4) signalé en Tunisie par Chniter et al (2014).

Tableau 3. Répartition du taux de mortalité des agneaux D’Man selon leur âge
Classe d’âge 0-90 j Mort-nés 1-10 j 11-30 j 31-90 j
Agneaux morts 24 2 15 6 1
Taux de mortalité (%) 10,3 0,9 6,4 2,6 0,4
% des mortalités 100 8,3 62,5 25,0 4,2

La distribution de fréquence des mortalités des agneaux D’Man par classes d'âge montre que le taux de mortalité a diminué avec l’âge. Les agneaux qui ont disparu à la naissance et entre la naissance et 10 jours ont représenté plus de 70% de la mortalité totale. Ce taux confirme les résultats de Chniter et al (2011) qui ont avancé un pourcentage de l’ordre de 41% de mortalité des agneaux entre la naissance et 10 jours. D’après Nowak et al (2000), la mortalité de la progéniture chez les moutons est invariablement plus élevée dans les premiers jours après la naissance, ce qui reflète les problèmes de transition entre la vie intra-utérine totalement protégée à une existence extra-utérine imprévisible. Après la naissance, la survie du nouveau-né dépend largement de la qualité des interactions avec la mère, la prise du colostrum, la quantité de lait disponible, de la concurrence avec les frères et sœurs, et des maladies (Nowak et Poindron 2006).

Facteurs de variation de la mortalité des agneaux D’Man

L’analyse du poids des agneaux morts entre la naissance et 90 jours permet de penser que ce sont surtout les agneaux les plus légers qui disparaissent. L’alimentation des brebis joue donc un rôle fondamental sur ce paramètre. Chikhi et Boujenane (2003) et Chniter et al (2014) ont montré l’influence d’un haut niveau alimentaire en fin de gestation sur le poids à la naissance des agneaux et leurs chances de survie.

La répartition des agneaux par classes de poids croissants a permis de constater qu’en dessous d’un poids de 1,5 kg, le taux de mortalité était plus élevé, de l’ordre de 38,5%, la mort survenant surtout le jour de la naissance ou dans les jours qui suivent (Tableau 4). Cette mortalité précoce importante, montre l’influence des portées multiples dans un système d’élevage où les brebis allaitent la totalité de leur portée. La mortalité des agneaux de portées multiples semble liée étroitement à leurs faibles poids à la naissance, spécialement dans le cas de paires hétérogènes où le plus faible est souvent appelé à disparaître. L’allaitement artificiel des agneaux nés multiples peut améliorer en partie cette situation.

Selon Bouchriti (1985), la mortalité qui peut être presque de 100% pour les agneaux chétifs, peut diminuer très sensiblement avec l’augmentation de leurs poids à la naissance. Les petits agneaux de moins de 2 kg sont très menacés par la mort et nécessitent une attention particulière. L’isolement des agneaux nouveau-nés et de leur mère pendant quelques jours dans des cases individuelles, permet de maintenir le taux de mortalité à un très bas niveau à condition que le poids à la naissance des agneaux soit supérieur à 2,5 kg (Prud’hon et al 1968). En effet, les agneaux de poids normal sont capables d’accroître leur production de chaleur pour maintenir leur température corporelle. En revanche les agneaux de faible poids, ont une déperdition calorifique supérieure, et des réserves corporelles réduites qui ne leur permettent pas d’assurer longtemps, les dépenses simultanées de thermorégulation et d’énergie de tétée (Benyounes et al 2013).

Le taux de mortalité dans les agnelages d’été a été significativement plus élevé, soit 13,3%. Les agneaux de printemps, d’automne et d’hiver ont enregistré des taux plus faibles. La région d’étude (Adrar) connaît des écarts de température considérables ; la température dépasse parfois les 50°C en été. Cette situation peut expliquer en grande partie les fortes mortalités enregistrées pour cette saison. Elle justifie aussi en général la concentration des agnelages en automne et au printemps dans les élevages familiaux de race D’Man dans cette région (Boubekeur et Benyoucef 2014). Ce qui est en commun accord avec ce qui a été rapporté par Bouchriti (1985) au Maroc, dont les pertes les plus importantes ont été observées en mai-juin, surtout chez les agneaux nés multiples.

Par ailleurs, les femelles ont toujours été plus fragiles que les mâles, surtout pour les portées multiples où les pertes ont souvent été des femelles. Ces résultats sont en accord avec les observations de Prud’hon et al (1968) sur des agneaux de race Mérinos. Cependant, Boujenane et al (1991) ont conclu que le sexe de l’agneau n’a pas eu d’effet sur le taux de mortalité et ont avancé des pertes de 7% pour les mâles et de 8% chez les femelles à l’âge de 3 mois.

Tableau 4. Mortalités des agneaux D’Man entre la naissance et 90 jours d’âge selon la saison,
le sexe, le mode de naissance et le poids à la naissance.
Source de variation Agneaux
nés
Agneaux
morts
Taux de
mortalité (%)
Sexe
Mâle 141 11 7,8
Femelle 89 13 14,6
Mode de naissance
Simple 59 2 3,4
Double 119 10 8,4
Triple 38 7 18,4
Quadruple 16 5 31,2
Saison de naissance
Automne 77 6 7,8
Eté 98 13 13,3
Hiver 25 2 8,0
Printemps 32 3 9,4
Poids à la naissance
PN ≤ 1,5 kg 13 5 38,5
1,5 < PN ≤ 2,5 kg 98 15 15,3
2,5 < PN ≤ 3,5 kg 95 4 4,2
PN > 3,5 kg 26 0 0,0
Total 232 24 10,3
PN: Poids à la Naissance


Conclusion

A l'issue de cette étude, il apparaît que le faible poids des agneaux à la naissance (≤1,5 kg) et le mauvais choix de la saison d’agnelage représentent les principaux facteurs de risque qui affectent négativement la survie et la croissance des agneaux D’Man en Algérie. Cette constatation met en évidence la nécessité d’améliorer la viabilité des agneaux qui naissent souvent sous différents modes. L’idée qui peut être suggérée consiste à améliorer les conditions sanitaires et alimentaires du troupeau pendant la lutte (flushing), en fin de gestation (steaming) et pendant la lactation pour avoir des agneaux vigoureux et viables à la naissance et pour assurer des performances de croissance appréciables. L’éleveur est appelé aussi à chercher à regrouper les agnelages en dehors des périodes de fortes chaleurs estivales.


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Received 12 January 2019; Accepted 12 February 2019; Published 4 March 2019

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