Livestock Research for Rural Development 30 (9) 2018 Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Relation entre le régime alimentaire, la note d'état corporel et la production de lait chez les vaches Holstein et Monbéliarde dans l'est de l'Algérie

L Merdaci, M Zeghdoudi, S Madi et M Chemmam1

Université Chadli Benjedid, Faculté des sciences de la nature et de la vie, Département des sciences vétérinaires, El-Tarf, Algérie
beliletlatifa@hotmail.com
1 Université 8 Mai 1945, Faculté des sciences de la nature et de la vie et sciences de la terre et de l’univers, Département écologie et génie de l’environnement, Guelma, Algérie

Résumé

La production de lait des vaches laitières hautes productrices importées en Algérie pose un sérieux problème aux éleveurs. Le but de cette étude est de déterminer l’existence de la relation entre la ration alimentaire et la production et la composition du lait en matières utiles en rapport avec la note d’état corporelle (NEC). Deux lots de génisses, 20 de race Prim’Holstein (PH) et 20 de race Montbéliarde (MB), gestantes de 5,6 ± 0,4 (PH) et 5,5 ± 0,4 (MB) mois ont été suivies dans les mêmes conditions d’élevage sur 3 lactations successives. Les aliments comme l’ensilage d’orge, le trèfle en vert, l’orge en grain et le son de blé ont constitué l’alimentation de base alors que le concentré a été consommé deux fois par jour durant la traite, sauf en période de tarissement. L’état des réserves corporelles s’est dégradé progressivement au cours des 3 lactations pour atteindre des valeurs de la NEC en dessous de 2 points. La production laitière a été de 4 211 ± 340 kg (MB) et 3 965 ± 328 kg (PH) en 1ère lactation, 5 024 ± 360 kg (MB) et 4 660 ± 420 kg (PH) en 2ème lactation, 5 700 ± 530 kg (MB) et 5 180 ± 400 kg (PH) en 3ème lactation. La comparaison des TB et TP moyens entre les races PH et MB a révélé un TB de 4,65% vs 4,42% et un TP de 3,48% vs 3,22%. Au pic de lactation, les valeurs ont varié entre 3,30- 3,18% et 2,94–2,72% de TP vs 31,4–31,2% et 28,6–25,4% de TP respectivement pour la PH et la MB. Au 90 ème jour PP, les augmentations ont été plus élevées pour les TB que les TP. Ainsi, la perte d’état exagérée liée à l’alimentation (dont l’absence de concentré pendant le tarissement) a été préjudiciable aux performances. L’amélioration des performances dépend de la race, l’âge à l’introduction en élevage, l’âge au premier vêlage, la qualité de l’aliment et la maîtrise de la reproduction.

Mots-clés: ingestion alimentaire, lactation, NEC, suralimentation, tarissement, TB, TP


Relationship between diet, body condition score and milk production in Holstein and Monbéliarde cows in Eastern Algeria

Abstract

The performance of high producing dairy cows imported in Algeria represents a serious problem for the farmers. The purpose of this study was to determine the existence of the relationship between diet, and milk production and  composition in relation to body condition score (BCS). Two lots of heifers, 20 Prim'Holstein (PH) and 20 Montbeliarde (MB), pregnant with 5.6 ± 0.4 (PH) and 5.5 ± 0.4 (MB) months were followed under the same conditions on three successive lactations, except during the dry period. Feeds such as barley silage, clover green, barley grain and wheat bran were the staple foods while the concentrate was consumed twice daily during milking. The state of body reserves deteriorated progressively during the three lactations to reach values ​​of the BCS below 2.0. Milk production was 4,211 ± 340 kg (MB) and 3,965 ± 328 kg (PH) in first lactation, 5,024 ± 360 kg (MB) and 4,660 ± 420 kg (PH) in 2nd lactation, 5,700 ± 530 kg (MB) and 5 180 ± 400 kg (PH) in the 3rd lactation. The comparison of % milk fat  (MF) and % milk protein (MP) in the milk between the PH and MB revealed that MF was 4, 65% vs 4,42% and MP 3,48%vs 3,22 %. At the peak of lactation, the values ​​varied between 3,30-3,18 % (MF) and 2,94-2,72 % (MP) vs 3,14-3,12 % (MF) and 2,86-2,54% (MP) respectively for PH and MB. At day 90 post-partum, increases were higher in MF than in MP. Thereby, the exaggerated loss of BCS related to feed quality (including the absence of concentrate during the dry period) was detrimental to performance. Performance improvement depends on the breed, the age at first calving, the quality of the feed and the control of reproduction.

Keywords: BCS, dry period, lactation, overfeeding, protein


Introduction

En Algérie, la consommation de lait occupe une place très importante dans l’alimentation journalière de la population afin de combler le manque en protéines d’origine animale et à cause du prix réduit subventionné par l’état (Makhlouf et al 2015). Une bonne production laitière est conditionnée par une alimentation riche et équilibrée ainsi que par d’autres facteurs comme la race, la conduite d’élevage, le bâtiment d’élevage et la maitrise sanitaire et hygiénique. Le péri-partum constitue une période très importante au cours du cycle physiologique d’une vache laitière qui se caractérise par des besoins spécifiques et une stricte adaptation du métabolisme énergétique (Enjalbert 1998). Cette période importante correspond à deux périodes physiologiques qui sont très différentes, à savoir la fin du tarissement caractérisée par des besoins alimentaires faibles et le début de la lactation caractérisé par des besoins énergétiques élevés (Beam et Butler 1998). Ceci entraine inévitablement un bilan énergétique négatif pour les vaches très hautes productrices (Morel et al 2010). L’estimation régulière de la note d’état corporel en vue de l’obtention de profils constitue un outil d’intérêt non seulement dans une approche individuelle par la détection des sujets à risque, mais aussi à l’échelle du troupeau pour l’évaluation et la correction éventuelle de l’alimentation énergétique distribuée aux vaches laitières (Hady 1994). Durant la période de transition entre l’état de gravidité et l'état de lactation, la note de l’état corporel reste un très bon indicateur pour juger le statut nutritionnel de l’animal, ce qui nous permet d’apporter des solutions à certaines carences pour l’amélioration des performances chez les vaches. L’objectif de la présente étude est de déterminer chez des vaches de races Holstein et Montbéliarde importées et aux performances en production de lait en-dessous des normes requises, les relations entre l’alimentation, la production de lait, la composition du lait en matières utiles (TB, TP) et la note de l’état corporel.


Matériels et méthodes

Site d’étude et animaux

Cette étude a été réalisée au niveau d’une exploitation agricole appartenant à un propriétaire qui pratique l’élevage de vaches laitières depuis une trentaine d’années. La ferme est située dans l’Est algérien, à la périphérie de la ville de Guelma qui se caractérise par une végétation abondante et un climat subhumide avec des températures douces en hiver et chaudes en période estivale. Le bâtiment d’élevage d’une capacité de 50 vaches est doté d’un sol en béton recouvert d’une litière de paille renouvelée tous les trois jours. L’hygiène de la stabulation, l’aération et l’état de propreté des animaux sont assurés par un entretien régulier et un personnel qualifié. Notre échantillonnage est représenté par les deux races de vaches laitières les plus répandues en Algérie : 20 de race Prim’Holstein (PH) et 20 de race Montbéliarde (MB), toutes importées d’Europe. Ces vaches en stabulation entravée dans la même étable avec une aire d’exercice d’1/2 hectare sont soumises aux mêmes conditions d’élevage. A l’introduction en élevage, l’âge des vaches était de 18,6±0,9 mois pour la PH et 26,5±0,9 mois pour la MB ; par ailleurs l’état de gestation était de 5,6±0,4 mois pour la PH et 5,5±0,4 mois pour la MB. Les notes d’état corporelles moyennes ont été au début de 3,0±0,2 pour les génisses PH et de 3,2±0,2 pour les génisses MB.

Alimentation

La ration de base distribuée aux vaches est composée d’ensilage d’orge, de trèfle en vert, d’orge en grain et de son de blé. Le concentré était consommé matin et soir durant la traite et a été estimé selon la durée de cette dernière à raison de 3 à 4 kg/vache/jour. Les vaches taries n’ont reçu que du foin de vesce-avoine ou de la paille de céréales, mais pas de concentré. Les niveaux de consommation de matière sèche de fourrages et de concentré ont été estimés aux 30 ème et 60èmejours de lactation à partir des quantités distribuées et des refus.

Note de l’état corporel

La notation de l’état des réserves corporelles (NEC) a été effectuée à l’aide de grilles de notation standardisées (Ponsart et al 2007 ; Vasseur et al 2013) adaptées pour les vaches de race Prim’Holstein et Montbéliarde (Bazin 1989). La note d’état corporel est attribuée à l’animal sur la base de l’apparence des tissus recouvrant les proéminences osseuses des régions lombaires et caudales. Les zones anatomiques évaluées comprennent les processus transverses et épineux des vertèbres lombaires, les tubérosités iliaques et ischiatiques, le détroit caudal, la base de la queue et la ligne du dos ainsi que les zones intermédiaires. La NEC a été enregistrée au vêlage, au 30ème jour, au 60ème jour de lactation et au tarissement. Pour être constant dans la notation, l’observation de toutes les vaches a été faite dans la même position.

Production laitière

La production laitière initiale (PI) ou 1er contrôle a été établie à partir des contrôles journaliers du 4ème, 5èmeet 6èmejours de lactation et la production laitière maximale (PL Max) à partir des contrôles du 1erjour de la 7ème, 8ème et 9èmesemaines. Des échantillons ont été prélevés pour doser les proportions de matières utiles (% de matières protéiques et % de matières grasses).

Dosage du Taux Butyreux dans le lait

La méthode employée pour la détermination de la matière grasse est celle de Gerber (Grappin et Jeunet 1979), les résultats sont exprimés par convention en grammes. Cette méthode est basée sur la dissolution des éléments autres que la matière grasse par de l'acide sulfurique avec addition d'une petite quantité d'alcool amylique qui favorise le rassemblement de la matière grasse.

Dosage de la matière protéique du lait de vache par la méthode de Kjeldahl

Les protéines du lait représentent 95% des matières azotées totales du lait. Les 5% restant sont constitués d’acides aminés libres, de petits peptides, d’azote non protéique (essentiellement de l’urée : 0,3 à 0,4 g/l) mais aussi de créatinine et d’acide urique ( Ndiaye N.P. 2002).

Analyses statistiques

Les données collectées ont été soumises à une analyse de la variance des résultats intra race et comparés entre les deux races.


Résultats

Alimentation et réserves corporelles

Le calendrier fourrager fait apparaitre 3 périodes alimentaires avec des rations de base types. La ration R1 à base d’ensilage d’orge (EO) et foin de vesce-avoine (FVA) ou paille de céréales (PC) durant la période entre septembre et décembre, la ration R2 à base de trèfle en vert (TV) et FVA ou paille de céréales (PC) entre janvier et mai et la ration R3 à base de FVA ou de paille de céréales (PC) entre juin et août (tableau 1).

Les apports en concentré constitués de mélange d’orge concassée (OG) et de son de blé (SB) ont été administrés au poste de traite deux fois par jour. Dans l’ensemble, les niveaux de matière sèche ingérée (MSI) sont réduits en début de lactation et augmentent durant les lactations successives jusqu’au 60ème jour de lactation. La comparaison entre les deux races a révélé que la MB a ingéré plus de MS que la PH particulièrement en 1ère lactation (p<0,05), mais aussi au cours des lactations suivantes. Par rapport aux besoins énergétiques moyens au 30 ème et au 60ème jour, le bilan énergétique a été souvent négatif même au-delà du 60ème jour (tableau 2). Au cours des 30 premiers jours de la première lactation, la mobilisation des réserves corporelles a été de 0,5 points pour la PH et 0,4 points pour la MB, par contre à 60 jours la PH a mobilisé plus de réserves que la MB respectivement 0,8 et 0,6 point (P<0,05) (figure 4).

Tableau 1. Valeurs alimentaires des aliments de la ferme

Aliment

Valeurs/Kg de MS

Période de disponibilité

Total

UFL

UEL

PDIE

PDIN

P

Ca

EO

1,12

0,75

80

69

3

2

Sept-oct-nov-déc

R1

TV

0,89

0,93

97

156

13,7

3

Jan-fév-mars-avr-mai

R2

FVA

1,1

0,68

70

78

2,6

6

Toute l’année

R1 R2 R3

PC

1,45

0,42

44

22

1

2

Juil-aout-sep

R3

OG

-

1,09

101

79

4

1

Toute l’année

R1 R2 R3

SB

-

0,92

87

107

11,2

1,6

Toute l’année

R1 R2 R3

(EO = ensilage d’orge ; TV = trèfle en vert, FVA = foin de vesce avoine, PC = paille de céréale, OG = orge en grain)



Tableau 2. Apport énergétique (UFL) par stade (30ème et 60ème jour), par race et par rang de lactation et consommation de la MS (kg /jour)

Stade

Race

Rang de lactation

L1

UFL

L2

UFL

L3

UFL

30ème

PH

9,5±2,2 a

7± 1,2

11± 3b

8± 1

11,6 ±2,3b

8±1,4

MB

10,4±1,4b

8± 0,6

12,5±1,7bc

8,6± 0,4

12±2b

8±1,4

60ème

PH

12±2a

10±0,8

14,5±3b

10±1,2

14,5±2b

10±0,8

MB

14,5±1,6b

11±1

15,5±2,6

12±1,4

15b±1,4b

12±0,6

Les résultats dans la même ligne et la même colonne suivis de lettres distinctes sont différents au seuil de P <0,05 (L1, L2, L3 : première, deuxième et troisième lactations ; PH = PrimHolstein, MB = Montbéliarde



(MSI=matière sèche ingérée, 30ème= 30ème jour de lactation, 60ème= 60ème jour de lactation,
90 ème=90ème jour de lactation, PH = PrimHolstein, MB = Montbéliarde)

Figure 1. Consommation de la matière sèche kg/jour par stade et par rang de lactation



(B=Besoins, E=énergie, 30ème= 30ème jour de lactation, 60ème= 60ème jour de lactation,
90 ème=90ème jour de lactation, PH = Prim Holstein, MB = Montbéliarde)
Figure 2. Courbes des besoins énergétiques au cours des lactations successives


(B=Besoins, PDI=protéines digestibles dans l’intestin, 30ème= 30ème jour de lactation, 60ème= 60ème jour
de lactation, 90ème=90 ème jour de lactation, PH = Prim Holstein, MB = Montbéliarde)
Figure 3. Courbes des besoins en PDI au cours des lactations successives


(NECV = note de l’état corporel au vêlage, NEC30 = note de l’état corporel au 30ème jour, NEC60 = note de l’état
corporel au 60ème jour, NECT = note de l’état corporel au tarissement, PH = Prim Holstein, MB = Montbéliarde)
Figure 4. Courbes de variation de la NEC au cours des lactations successives 
La production laitière

Les résultats moyens de la production laitière sont reportés au tableau 3.

Durant les 3 lactations d’une durée de 10 mois chacune, la MB a produit successivement 4270 kg, 5128 kg et 5810 kg de lait par rapport à la PH qui a produit 4016 kg, 4780 kg et 5384 kg de lait (p<0,05). Pour les deux races, la production laitière initiale (PI) a varié entre 10,0 kg et 14,3 kg/jour et la moyenne de production des 3 lactations a été de 12,1 kg/jour. La différence en production de lait a été en faveur de la race MB et ce durant les 3 lactations successives (tableau 4). Durant les trois lactations, l’augmentation de la production laitière au 30èm ejour a été en moyenne de 16,4 ± 1,7 pour la PH et de 17,3±2,0 chez la MB.

Tableau 3. Résultats moyens de la production laitière (kg) au cours des 3 lactations par stade (1er contrôle, 30ème, 60ème et 90è me jour), troupeau (T), race (PH, MB) et par rang de lactation (L).

Stade

Race

L1

L2

L3

Moyenne

Moyenne
totale

PI

PH
MB

10,0±2,0
12,0±3,0

12,0±1,8
12,5±2,1

11,7±2,1
14,3±2,1

11,2±2,0
12,9±2,4

12,1±2,2

30ème

PH
MB

16,0±2,0
17,0±2,0

16,9±2,0
17,0±2,0

16,4±1,2
18,0±2,0

16,4±1,7
17,3±2,0

16,9±1,8

60ème

PH
MB

17,7±1,4a
18,8±2,6b

18,0±3,0a
19,4±2,2b

18,0±2,0a
22,0±3,0b

17,9±21
20,1±2,6

19,0±2,3

90ème

PH
MB

15,3±1,6a
17±2b

16±1,5
17,5±2,5

15,4±1,2a
19,2±2,6b

15,6±1,4a
17,9±2,4b

16,8±1,9

PLT (Kg)

PH
MB

4016±427a
4270± 460b

4780± 486a
5128± 450b

5384±500a
5810±480b

4727±471
5069±463

4898±467

DL (d)

PH
MB

328±11
317±17

345±15
327±23

360±25
337±26

345±17a
327±22b

336±19

PL/j (d)

PH
MB

12,2±1,3
13,5±1,5

13,8±1,4
15,7±1,4

15±1,4
17,2±1,4

13,7±1,4
15,5±1,4

14,6±1,4

Matières utiles

Les teneurs moyennes en matières utiles sont reportées au tableau 4. Sur les 3 lactations et sur les résultats des premiers contrôles successifs les TB et TP moyens ont été variables entre races et rang de lactation.

Tableau 4. Résultats moyens des TB et TP (‰) au cours des 3 lactations par stade (1er contrôle, 30ème, 60ème et 90ème jours), race (PH, MB) et par rang de lactation (L).

Stade

Race

Rang de lactation

L1

L2

L3

Moyenne

TB

TP

TB

TP

TB

TP

TB

TP

1er C

PH
MB

46,5±2,2a 44,2±1,6b

34,8±3,4a
32,2±2,1b

47,0±2,0
46,5±2,7

35,2±3,6
33,4±1,7

48,2±2,6 48,0±2,0

35,7±2,8 34,8±2,6

47,2±2,3 46,2±1,8

35,3±3,3 33,5±2,1

30ème

PH
MB

36,4±2,2a 34,2±2,6b

30,2±2,6 29,3±1,5

33,0±2,5 32,2±2,1

29,5±1,7
28,4±2,7

32,8±2,6 32,4±2,7

29,2±2,8 28,5±1,7

34,1±2,4 32,9±2,4

29,6±2,4 28,7±2,0

60ème

PH
MB

32,4±2,2 31,2±1,8

29,4±2,4 28,6±2,3

33,0±1,5
31,2±1,6

26,5±2
25,4±1,7

31,8±2,2 31,4±2,2

27,2±1,6 26,5±1

32,4±2,0 31,3±1,9

27,7±2,0
26,5±1,7

90ème

PH
MB

37,2±1,6a 34,0±2,0b

29,8±2,9
29,0±3,0

36,2±2,6 37,8±2,4

28,3±2,3 28,2±1,6

35,2±2,1
34,6±2,3

28,4±2,2
28,2±2,4

36,2±2,1
35,5±2,2

28,8±2,5
28,5±2,3

/kg/L

PH
MB

38,3±2,0
37,4±1,4

30,9±1,8 30,3±1,6

37,1±2,0
36,3±2,0

30,2±3,6 30,6±1,8

37,9±2,8 37,7±1,8

29,5±1,8 30,2±1,6

37,8±2,3 34,6±1,7

30,2±1,7
30,4±1,7

M U/j

PH
MB

467±50 505±56

377±40 409±46

512±45 570±51

417±42
481±43

568±53 649±53

443±41 520±43

518±53 536±48

413±42
471±43

Les résultats dans la même ligne et la même colonne suivis de lettres distinctes sont différents au seuil de p<0,05

Durant les trois lactations, les premiers contrôles ont montré que les TB et TP moyens sont variables par rapport aux races et au rang de lactation. Au 1er contrôle, la comparaison intra-race des TB et TP durant les trois lactations a fait ressortir une augmentation progressive de ces taux ; TB‰ : 46,5-47-48,2 vs 44,2-46,5-48 et TP ‰ : 34,8-35,2-35,7 vs 32,2-33,4-34,8 respectivement pour la PH et la MB. La comparaison des TB et TP moyens pour les deux races, a révélé des différences significatives en 1 ère lactation ; TB‰ : 46,5 vs 44,2 et TP‰ : 34,8 vs 32,2. Au 1er contrôle et pour l’ensemble des lactations, la PH a produit plus de matières utiles que la MB respectivement TB‰ : 47,2 vs 46,2 et TP ‰ : 35,3 vs 33,5. Au 2 ème contrôle, indépendamment de la race et du rang de lactation, les TB et TP ont diminué pour atteindre des moyennes à 30 jours de : TB ‰ 36,4-32,8 et TP ‰ 30,2-29,2 pour la PH contre TB‰ 34,2-32,2 et TP‰ 29,3-28,4 pour la MB. Au 3ème contrôle (PL max), les TB et TP sont à leurs valeurs minimales et ont atteint respectivement pour la PH et la MB des moyennes variant entre TB‰ 33- 31,8 et TP ‰ 29,4–27,2 vs TB‰ 31,4–31,2 et TP‰ 28,6–25,4. Au 4 ème contrôle (90ème jour), les TB et TP ont augmenté pour les deux races sans tenir compte du rang de lactation. Comparativement aux niveaux atteints au pic de lactation, les augmentations ont été plus élevées au niveau des TB par rapport aux TP, atteignant respectivement des moyennes variant entre TB‰ 37,2-35,2 et TP ‰ 29,8-28,4 vs TB‰ 37,8–34 et TP‰ 29-28,2 pour la PH et la MB.

L’analyse des données relatives au rapport TB/TP (tableau 5) a montré des valeurs moyennes de 1 point au 30ème jour (pic de lactation) suite au déficit énergétique. Le redressement des apports énergétiques au 90ème jour a permis une augmentation des taux butyreux et protéiques.

Tableau 5. Evolution du rapport TB/TP par stade (1ercontrôle, 30ème,
Pl max et 60èmejour), race (PH, MB) et par rang de lactation (L).

Stade

Race

Rang de lactation

L1

L2

L3

1erC

PH
MB

1,34
1,37

1,34
1,39

1,35
1,38

30ème

PH
MB

1,21
1,17

1,12
1,13

1,12
1,14

60ème

PH
MB

1,10
1,09

1,25
1,23

1,17
1,18

90ème

PH
MB

1,25
1,17

1,18
1,34

1,24
1,23


Discussion

L’ingestion de matière sèche montre ce qui est déjà établi par un grand nombre d’auteurs en l’occurrence le déphasage entre la capacité d’ingestion et l’augmentation intense et brutale des besoins énergétiques du début de lactation jusqu’au 30 ème jour de lactation. Les aliments distribués en début de lactation présentent une faible densité énergétique (0,7 à 0,8 UFL/kg de MS) et ne peuvent compenser la diminution de la quantité de MSI pour combler les besoins durant cette période. La densité énergétique moyenne des rations ingérées est nettement inférieure à celle habituellement recherchée en début de lactation qui est de 0,95 UFL/kg de MS. Ceci reste difficile à réaliser car les très bons fourrages dépassent rarement 0,9 UFL/kg MS alors que les concentrés énergétiques courants comme les céréales ne dépassent pas 1,2 UFL/kg MS (Enjalbert 2003). Après le vêlage, les besoins en protéines et en énergie ont doublé ; cependant, la quantité de matière sèche ingérée par jour n’a augmenté que de 25% dans les 30 premiers jours et de 60% au 60ème jour après le vêlage. Ceci est en accord avec les résultats de Hayirli et al (2002) qui ont détecté que le maximum de l’IMS est atteint 2 à 4 mois après le vêlage.

Pour limiter l'ampleur du déficit énergétique, la matière sèche ingérée (MSI) constitue l'un des enjeux du peripartum. Dans cette étude, la conduite alimentaire axée sur des fourrages secs comme le foin de vesce-avoine (FVA) ou la paille de céréales (PC) lors du tarissement module la quantité de MSI. Cette chute de l’ingestion peut atteindre 30% dans les jours qui précédent le part (Goff et Hordt 1997 ; Rousseau 2013 ; Salat 2012) pour qu’ensuite elle augmente progressivement (Aubadie-Ladrix 2011) atteignant son maximum entre la 10ème et la 12 èmesemaine de lactation (Ferre et Aubadie 2004). Cette baisse d’ingestion est une cause majeure du déficit énergétique de fin de gestation et de début de lactation. SelonHayirliet al (2011), l'objectif est d'avoir une vache laitière avec une capacité d'ingestion la plus importante possible et une bonne intégrité hépatique ce qui dénote que la sévérité de la stéatose hépatique est inversement proportionnelle à la quantité de MSI. Nous avons constaté que la NEC au vêlage est de 3 points pour la MB et de 2,8 points pour la PH, ce qui est en dessous des notes préconisées. L’objectif est d’avoir une note de 3,5 points au tarissement et que celle-ci reste stable jusqu’au vêlage (Duffield et al 1998). En revanche, certains auteurs préconisent une note légèrement plus basse à 3,25 points au vêlage (Walsh et al 2008 ; Seifi et al 2011).

Dans le cas d’une vache qui vêle trop maigre (NEC < 3 points) et qui va mobiliser 3 à 4 fois moins de ses réserves (Enjalbert 1998), le déficit ne sera pas comblé, ce qui ne va permettre à l’organisme de mobiliser du tissu adipeux. Cet état est physiologique à ce stade où nous assistons souvent à un déséquilibre exacerbé entre les entrées (ingestion) et les sorties (production). Par conséquent, ce problème d’adaptation des mécanismes de régulation peut entrainer des troubles comme la stéatose et la cétose. La quantité de matière sèche ingérée en début de lactation diminue en fonction de l’état corporel au vêlage (Broster et Broster1998) d’où une relation proportionnelle pour un état corporel situé entre 1,6 et 3,8 au vêlage (échelle 1 à 5). La différence de matière sèche ingérée par jour est de 1,3 kg entre deux groupes de vache ayant un écart de NEC d’un point ; une vache ayant une note de 3,5 points au vêlage consomme 1,3 kg de moins par jour qu’une vache ayant une note de 2,5 points. Au 1er vêlage, il est admis une NEC moyenne variant entre 3,5 et 3,2 (Seifi et al 2011 ; Walsh et al 2008 ; Enjalbert 1998). La faible PL chez les deux races par rapport à leurs potentialités s’explique par le déficit énergétique qui se prolonge jusqu’au 60ème jour pour toutes les lactations. Waltner et al (1993) rapportent une baisse de 322 kg de lait dans les 90 jours suivant le début de lactation causée par une diminution de la NEC au 1er vêlage de 3 à 2 points. Au cours de la première phase, une diminution significative de l’état corporel a été observée avec une perte de 0,5 point, ceci est en accord avec les résultats observés par Drame et al (2004), Edmonson et al (1989), Ferguson et al (1994) qui notent en moyenne une diminution de 2,8 à 2,5 points durant les 60 premiers jours de lactation. Cette perte de l’état corporel est une manifestation de l’utilisation intense des réserves corporelles après le vêlage. Une mobilisation de 20 à 70 kg de lipides a été rapportée au cours des 60 jours suivant le vêlage (Otto et al 1991). Les raisons de la mobilisation des réserves graisseuses et donc de la diminution de l’état corporel observée en début de lactation sont liées à la balance énergétique négative. La production laitière moyenne augmente après le vêlage pour atteindre un maximum alors que la consommation d’énergie reste faible par rapport à la quantité d’énergie nécessaire pour la production laitière. La seconde phase observée sur la courbe d’état corporel se situe au-delà du 60ème jour postpartum avec une augmentation de la NEC (Drame et al 2004). Celle-ci traduit la reconstitution des réserves énergétiques de l’animal liée au rétablissement de sa capacité d’ingestion de matière sèche ainsi qu’à l’activation de la lipogenèse au détriment de la lipolyse qui diminue. Les excédents de nutriments absorbés seront ainsi stockés dans les tissus de réserve qui sont à l’origine d’une augmentation de la note d’état corporel. La note d’état corporel à la fin de la lactation redevient égale à celle du vêlage (Waltner et al 1993), ce qui n’est pas le cas dans notre étude où la NEC des vaches n’est jamais revenu au niveau d’engraissement du vêlage.

Waltner et al (1993) rapportent qu’à la 3ème lactation, les vaches Holstein à Washington aux Etats -Unis atteignent leur niveau d’état corporel le plus bas au 60è me jour après le vêlage. La Montbéliarde en vêlage tardif à 32 mois a produit plus de lait que la PH en vêlage précoce à 24 mois soit 246 kg, 364 kg et 520 kg de lait, respectivement en 1ère, 2ème et 3 ème lactations. Ces résultats sont en adéquation avec ceux de Abeni et al (2000), Dobos et al (2004), Fisher et al (1983) et Lin et al (1987) qui citent qu’un vêlage tardif permet aux primipares une PL supérieure en 1ère lactation quelle que soit la race et la stratégie d’alimentation ; ces augmentations varient entre +34 kg et +70 kg de lait pour 10 kg de différence dans le poids vif au 1er vêlage. Pour la PH en vêlage précoce à 24 mois, les besoins supplémentaires de croissance nécessaires à son développement corporel sont en compétition avec ceux de la lactation (Le Cozler et al 2009), ce qui s’explique par la mobilisation de réserves plus élevée chez cette race en 1 ère lactation. Les meilleurs niveaux de PL de la MB sont dus à sa meilleure capacité d’ingestion qui est liée à l’âge (Hazel et al 2013 ; Heins et al 2008) et au poids vifau 1ervêlage (Veerkamp et al 2000 ; Le cozler et al 2009). La faible PL chez la PH et la MB en 1ère lactation est liée à une faible mobilisation corporelle d’où une perte de la NEC de 0,5 point. La croissance importante qui est en concurrence avec les besoins de lactation (Le cozler et al 2009) a été chez la PH en 1ère lactation de 45 kg et en 2ème lactation de 25 kg. La MB a enregistré une croissance de 27 kg en 1èrelactation et 13 kg en 2ème lactation (Le Cozler et al 2009). Dans les mêmes conditions alimentaires et face au déficit énergétique, les effets négatifs sont plus intenses chez la PH par rapport à la MB, ce qui est conforté par les constats de Cutillic et al (2011).

Les analyses de la laiterie nous ont permis de connaitre la tendance du troupeau pour la production et la couverture énergétique grâce aux taux de matières utiles. Dans l’ensemble, les profils d’état corporel ont été insuffisants en début de lactation particulièrement en 2ème et 3 èmelactation (≤2). A ce stade, les TP sont compris entre 25,4 %0 et 29,4 %0 différents de ceux obtenus par Ponsart et al (2007) qui notent que les états de réserves insuffisants sont fréquemment associés à des TP au pic de lactation inférieure à 28 %0 pour la race Prim Holstein. Aussi, Enjalbert (2003) rapporte qu’il existe une liaison hautement significative entre le TP et la NEC et que le principal facteur conditionnant le TP est l’apport énergétique qui permet la synthèse des matières protéiques par la mamelle. Bien que l’évaluation du déficit énergétique en début de lactation passe traditionnellement par la notation de l’état corporel, la notion de TP minimum à savoir le TP le plus bas enregistré au cours des trois premiers contrôles reste de plus en plus retenue dans ce but (Martinot 2006). Les niveaux protéiques relativement bas confirment le déficit énergétique apparu jusqu’au 60ème jour de lactation.

L’évolution des valeurs du TB et du TP révèlent qu’en plus du déficit énergétique, il existe aussi une suspicion d’acidose chez certaines vaches. Si nous combinonsces valeurs tout en calculant le rapport TB/TP, il apparait qu’au cours de la 1èresemaine de lactation, ce rapport est proche de 1,5, indice révélateur d’une suspicion de cétose avec déficit énergétique. De même, aux 30 ème et 60ème jours de lactation, ce rapport était proche de 1, ce qui conforte la suspicion d’une acidose. Les mêmes tendances ont été rapportées par Enjalbert (2003).


Conclusion

Le déficit énergétique post-partum représente un facteur de risque majeur dans la dégradation actuelle des performances des vaches laitières Prim’Holstein et Montbéliarde au niveau local. L’intensité et la durée de ce déficit après la mise bas dépendent des apports alimentaires et des réserves corporelles au moment du vêlage. En l’absence de concentré pendant le tarissement de vaches laitières fortement productives, l’évaluation du déséquilibre énergétique par la méthode de la notation de l’état corporel a montré qu’au cours du post-partum la perte d’état exagérée a été préjudiciable aux performances. Les résultats enregistrés au cours de ces 3 années montrent que le déficit énergétique a engendré une baisse des taux butyreux et protéiques du lait avec suspicion d’acidose chez les deux races d’où des performances en dessous de leur aptitude de production. L’alimentation, surtout pendant le tarissement doit être revue dans cet élevage. La maitrise de la composition du lait est en relation avec différents facteurs comme l’apport énergétique, l’animal ou la saison. Ces deux derniers étant des paramètres fixes, l’amélioration des performances de production dépend donc de la race, l’âge à l’introduction en élevage, l’âge au premier vêlage, la qualité de l’aliment et la maîtrise de la reproduction.


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Received 30 July 2018; Accepted 23 August 2018; Published 3 September 2018

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