Livestock Research for Rural Development 23 (8) 2011 | Notes to Authors | LRRD Newsletter | Citation of this paper |
Le fait que l’Algérie soit classée parmi les premiers pays importateurs en poudre de lait n’était pas problématique, mais la donne a changé, ce qui a conduit les pouvoirs publics à opter pour de nouvelles stratégies pour la filière lait en Algérie avec le lancement en l’an 2000 du plan national de développement agricole (PNDA), puis l’élargissement du PNDA à la dimension rurale PNDAR à partir de juin 2002.
Le présent travail a pour objectif de procéder à un état des lieux de la situation de la filière lait en Algérie sur la base de données statistiques recueillies au niveau de différentes institutions (Ministère de l’Agriculture, Ministère du commerce, etc).
Mots clés: collecte, filière, importation, poudre de lait, stratégie
The fact that Algeria is ranked among the top importers of powdered milk was not problematic, but the data have changed, which led the government to opt for new strategies for the dairy sector in Algeria with the launch in 2000s of the National Plan for Agricultural Development (NPAD) and the expansion of NPAD to the rural dimension NPARD from June 2002. This work aims to conduct an inventory of the situation of the dairy sector in Algeria based on statistical data collected at different institutions (Ministry of Agriculture, Ministry of Commerce).
Keywords: collection, import, milk powder, sector, strategy
La mise en œuvre d’une politique alimentaire en Algérie a montré ses limites; le recours à l’importation a engendré des dépenses croissantes en raison du soutien des prix à la consommation ; ceci a été possible grâce à une certaine aisance financière résultant des recettes pétrolières dont les effets pervers ont rendu difficile d’une part la relance de la filière lait et d’autre part la mise en place de son instrument de régulation qui est l’ONIL (Office National Interprofessionnel du Lait) à partir de 2007. Par ailleurs; il faut préciser que les importations liées à la filière lait ne portent pas uniquement sur les matières premières (poudre de lait et matière grasse du lait anhydre) destinées à l’approvisionnement des laiteries mais également sur les produits finis tels que le lait en poudre instantané, les fromages, les pâtes à fromages, le beurre et autres produits laitiers pour la consommation courante.
Dans cette optique, le but de ce travail consiste à réaliser une approche analytique du contexte d’évolution de la filière lait en Algérie durant la période 2000-2007, pour tenter de contribuer à faire ressortir les contraintes et les possibilités de son développement.
La production du lait cru dépend des effectifs du bovin laitier moderne, amélioré et local et des modes de conduite de ces derniers.
L’élevage bovin reste cantonné dans le nord du pays avec quelques incursions dans les autres régions. Les parcours steppiques sont le domaine de prédilection de l’élevage ovin et caprin avec plus de 90% des effectifs qui y vivent (FAO 2001).
En Algérie le cheptel bovin est réparti en trois types distincts dont deux sont orientés vers la production laitière :
Ce type de bovin est conduit en intensif et localisé dans les zones généralement à fort potentiel d’irrigation autour des agglomérations urbaines.
Le cheptel est constitué par des races à haut potentiel de production importées essentiellement d’Europe (Frisonne Française, Pie noir, Montbéliarde, Holstein et la Simmental). Ces races sont orientées vers la production laitière et représentent en moyenne durant la période comprise entre 2000 à 2007 les 25, 4% de l’effectif national.
Ce type de bovin est issu soit de croisements non contrôlés entre la race locale et la race importée, ou entre les races importées elles mêmes. Il est conduit en extensif et concerne des ateliers de taille relativement réduite (1 à 6 vaches). Ce cheptel est localisé dans les zones peu favorisées à couvert végétal pauvre (montagnes et forêts).
Les performances zootechniques (notamment de production) du BLA restent en deçà des résultats escomptés en dépit des facultés d’adaptation qui lui sont prêtées.
Conduit en extensif, ce type de bovin est constitué essentiellement par la Brune de l’Atlas et ces rameaux (la Guelmoise, la Sétifienne, la Chélifienne). Selon Kerkatou (1989), il existe d’autres populations mais avec des effectifs plus réduits telles que la Djerba qui peuple la région de Biskra, la Kabyle et la Chaouia qui dérivent respectivement de la Guelmoise et de la Cheurfa.
Le Bovin Laitier Local est caractérisé par son faible rendement laitier ; il occupe une place importante dans l’économie familiale ; il est localisé soit dans les régions des collines et des montagnes peu arrosées du nord, le bas des pentes des chaînes montagneuses à la lisière des plaines côtières et les vallées à l’intérieur des massifs montagneux, soit au niveau des zones montagneuses humides et boisées du nord où on retrouve des troupeaux de 10 à 20 vaches qui pâturent l’espace collectif boisé et les petites superficies de clairières (Boukir 2007).
L’effectif du bovin laitier moderne est passé de 254 mille têtes en 2000 à 223 mille têtes en 2007; les effectifs du bovin laitier local (BLL) et du bovin laitier amélioré (BLA) sont passés de 743 mille têtes à 656 mille têtes de 2000 à 2007 (Tableau 1).
Malgré un taux de croissance annuel évalué à environ 6%, le rythme d'évolution numérique du cheptel bovin par rapport au nombre d'habitants s'avère lent. Ainsi, le taux moyen de croissance du nombre de têtes bovines par 100 habitants n'est que de 0,5% (Yakhlef 1989).
Tableau 1. Evolution des effectifs bovins durant la période 2000-2007 |
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Années |
Milliers de têtes |
Pourcentage (%) |
||||
Total Bovins |
Total Vaches |
Bovin laitier moderne (BLM) |
Bovin laitier local et Bovin laitier amélioré (BLL+BLA) |
BLM/ Total Vaches (%) |
BLL+BLA/ Total Vaches (%) |
|
2000 |
1595 |
997 |
254 |
743 |
25,5 |
74,5 |
2001 |
1613 |
1 008 |
267 |
741 |
26,5 |
73,5 |
2002 |
1511 |
842 |
205 |
637 |
24,3 |
75,6 |
2003 |
1539 |
882 |
223 |
659 |
25,3 |
74,7 |
2004 |
1546 |
853 |
210 |
643 |
24,6 |
75,4 |
2005 |
1584 |
850 |
213 |
637 |
25,1 |
74,9 |
2006 |
1614 |
743 |
217 |
526 |
29,2 |
70,8 |
2007 |
1657 |
879 |
223 |
656 |
25,4 |
74,6 |
Source : (MADR 2007) |
L’essentiel de l’alimentation du cheptel est assuré par les milieux naturels (steppe, parcours, maquis…) et artificiels (jachères, prairies…) notamment en hiver et au printemps. Le déficit fourrager est de 58% en zone littorale, 32% en zone steppique et 29% au Sahara (Adem 2002). Selon Merouane (2008), les ressources fourragères en Algérie se composent essentiellement des chaumes des céréales, de la végétation de jachères pâturées, des parcours steppiques, forêts, maquis et d’un peu de fourrages cultivés qui sont répertoriés dans le Tableau2.
Tableau 2. Les ressources fourragères en Algérie |
|||
Ressources fourragères |
Superficie (hectares) |
Productivité moyenne UF/ ha |
observations |
Parcours steppiques |
15 à 20 millions |
100 |
Plus ou moins dégradés |
Les forêts |
Plus de 3 millions |
150 |
- |
Chaumes de céréales |
Plus de 3 millions |
300 |
Nécessité d'améliorer la qualité des chaumes |
Végétation de jachères pâturées |
Moins de 2 millions |
250 |
Nécessité d'orienter la végétation |
Fourrages cultivés |
Moins de 500 millions |
1000 à 1200 |
Orge, avoine, luzerne, trèfle, vesce avoine et sorgho |
Les prairies permanentes |
Moins de 300 millions |
- |
Nécessité d'une prise en charge |
Source : Merouane 2008. (Ha : hectare, UF : unité fourragère) |
Ces insuffisances dans les ressources fourragères constituent un obstacle au développement de l’élevage bovin en Algérie, ce qui conduit à des insuffisances dans les productions animales. L’élevage algérien subit des contraintes alimentaires qui limitent non seulement la production fourragère au niveau des exploitations agricoles mais également la fabrication d’aliments concentrés destinés aux cheptels laitiers. Cette fabrication industrielle est elle-même très dépendante des approvisionnements en matières premières sur le marché extérieur qui se traduisent par des coûts d’importations élevés.
L’évolution de la production de lait cru n’a pas suivi celle des capacités de transformation dans l’industrie, malgré l’accroissement enregistré durant la période 2000-2007, la production laitière nationale est restée faible (Tableau 3).Cette progression observée ces dernières années est le résultat direct de l’augmentation de l’effectif bovin par l’importation de génisses pleines à partir de 2004 et l’amélioration progressive des techniques de production. Par ailleurs; nous constatons sur le terrain les efforts de certains éleveurs pour une meilleure qualité du produit.
Tableau 3. Evolution de la production nationale du lait cru de 2000 à 2007 |
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Désignation |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2007 |
Moyenne 2000-2007 |
Ecart-type 2000-2007 |
||
Production nationale (106 litres) |
1 550 |
1637 |
1544 |
1610 |
1915 |
2092 |
2244 |
2185 |
1 847,12 |
297 |
Source :(MADR 2007) |
La production laitière est passée de 1,5 milliards de litres en 2000 à 2,2 milliards de litres en 2007, soit une augmentation de presque 1/2 milliard de litres de lait (Tableau3). Cet accroissement dans la production peut s’expliquer par la mise en œuvre des mesures incitatives engagées à travers les instructions établies dans le cadre du PNDA, ainsi que l’augmentation de l’effectif bovin par l’importation de génisses pleines. Toutefois, bien que la production laitière ait enregistré cette progression positive entre 2000 et 2007, elle demeure faible eu égard aux potentialités génétiques notamment du bovin laitier moderne (BLM), qui peut développer en moyenne entre 5000 et 6000 kg par lactation dans son pays d’origine, comme par exemple la montbéliarde et la normande en France ; compte tenu aussi du potentiel des bassins laitiers existants et de l’essor de la demande en lait et produits laitiers, qui ne cesse d’augmenter en relation avec le soutien de l’état aux prix à la consommation du lait industriel.
La multiplicité des systèmes d’élevages se différenciant par le mode de conduite, la nature du cheptel et les systèmes d’affouragement renseigne sur la disparité de l’offre laitière sur le territoire national. Celle-ci dépend de la répartition et de la disponibilité des ressources fourragères et donc des conditions agro-écologiques, ce qui conduit à distinguer trois zones distinctes du point de vue du potentiel de productions (Figure1):
Zone I :
Elle renferme 60 % des effectifs de vaches laitières qui sont répartis au nord à travers la bande côtière et dans l’aire sublittoral: il s’agit de la zone littorale et sublittorale à climat humide et subhumide. Elle couvre 63 % de la production laitière, un taux de collecte bas égal à 6,5% de la production de lait cru total en 2006 mais qui reste relativement le plus élevé. Cette zone englobe près de 61% des superficies fourragères. Lesquelles sont en compétition avec les autres cultures.
Zone II :
26 % des effectifs sont compris dans cette zone qui occupe les régions à vocations agropastorale et pastorale et à climat semi-aride et aride. Cette zone classée deuxième renferme le tiers des superficies fourragères et se caractérise par un faible taux de collecte 3%.
Zone III :
Cette dernière renferme un peu plus du dixième des effectifs (14%) qui se localisent en région saharienne à climat désertique ; elle se caractérise par un très faible taux de collecte et un apport fourrager ne dépassant pas les 7,3% de l’ensemble des superficies.
Figure 1. Répartition des potentialités de production laitières par zones. |
Le montant des primes octroyées aux éleveurs pour la production du lait cru a connu une évolution significative de 2000 à 2007 ; il est passé de 500 millions DA à 1,38 milliards DA, soit une augmentation de 63,7 % ; cela représente un peu plus de la moitié (53,8%) du montant global octroyé aux différents agents de la filière lait en 2007 (Tableau4).La prime d’encouragement et d'incitation à la production locale de lait livré à la transformation est passée de 5 DA pour un litre de lait cru produit et vendu aux unités de transformation en 2000 à 7 DA le litre à partir de l’année 2005.
Tableau 4. Evolution des mesures de soutien à la production par le fonds de l’Etat |
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Dotations |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
Prime totale filiere Lait (103 DA) |
867967 |
939901 |
911993 |
958 522 |
1 238 004 |
1903051 |
2587652 |
2 537 941 |
Prime producteurs (103 DA) |
500598 |
520858 |
578915 |
632 932 |
796 698 |
1136169 |
1399042 |
1 380 516 |
Charriot trayeurs (DA) |
2757000 |
41642 000 |
45386000 |
23915000 |
28269000 |
2 255500 |
1151800 |
- |
Nombre d'unité |
58 |
667 |
582 |
321 |
409 |
298 |
133 |
- |
Source :(MADR 2007) |
Toutefois, il existe aussi d’autres subventions pour l’investissement à la ferme octroyées aux éleveurs qui disposent de plus de 6 vaches : ces derniers peuvent bénéficier d’un financement pour des équipements d’irrigation, des primes de 5000 DA/ha pour la production fourragère, ainsi que des primes pour la construction de silo et pour la production d’ensilage. En plus des promotions de l’investissement à la ferme, la prise en charge globale de l’insémination artificielle au niveau des exploitations est appliquée depuis une décennie déjà.
La majeure partie du lait est produite par de petits éleveurs qui possèdent en général moins de cinq animaux (système extensif dominant en Algérie) ; les unités de production sont largement dispersées dans les campagnes, tandis que la plupart des marchés se situent dans les villes; sachant que le lait ne se conserve pas longtemps et peut être à l'origine de zoonoses, tout ceci complique les difficultés logistiques à surmonter pour relier les producteurs aux unités de transformation.
En 2000, la part de chaque intervenant dans la collecte s’est présentée comme suit :
- Filière GIPLAIT (Groupe Industriel Professionnel du Lait) (46 millions de litres soit 45%)
- Producteurs laitiers (40 millions de litres soit 39,6%)
- Collecteurs privés (15 millions de litres soit 14,6%) ; soit un total de 101 millions de litres de lait (Benyoucef 2005).
La collecte devait avoir un rôle clé dans le cadre de la politique de développement de la production laitière nationale ; elle constitue la principale articulation entre la production et l’industrie laitière. Or, nous constatons que malgré l’augmentation de la production de lait cru, qui est passée de 1,55 milliards de litres en 2000 à 2,18 milliards de litres en 2007, le taux de collecte demeure très faible (soit un taux moyen de 9%) (Tableau 5). La collecte n’a pas pu progresser d’une manière durable et significative ; elle a subi des variations importantes d’une année à l’autre durant la période 2000 - 2007.
Tableau 5. Evolution des quantités de lait collecté et du taux de collecte en Algérie de 2000 à 200 |
|||
Années |
Production locale (106 Litres) |
Collecte de lait cru (106Litres) |
Taux de Collecte (%) |
2000 |
1 550 |
100 |
6,52 |
2001 |
1 637 |
93 |
5,71 |
2002 |
1 544 |
129 |
8,41 |
2003 |
1 610 |
120 |
7,46 |
2004 |
1 915 |
200 |
10,4 |
2005 |
2 092 |
163 |
7,83 |
2006 |
2 244 |
221 |
9,86 |
2007 |
2 185 |
197 |
9,02 |
Source :(MADR 2007) |
D’après les chiffres du Tableau 6 recueillis au niveau du Ministère de l’agriculture concernant les centres de collecte, ces derniers sont répertoriés dans le Tableau 6, sur l’ensemble du territoire national en 2006 :
Tableau 6. Classification des Zones en Algérie en 2006 |
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Indicateurs |
Zone 1 |
Zone 2 |
Zone 3 |
Collecte de lait cru (Unité : %) |
6,50 |
3,01 |
0,50 |
Centres de collecte |
57 |
27 |
16 |
Source :(Ministère de l’Agriculture et du développement rural, 2008) |
Ces centres de collecte, réalisés dans le but de promouvoir la collecte de lait cru, sont représentés par un nombre relativement important au niveau de la zone classée première (Zone 1) ; il s’agit de la zone littorale et sublittorale avec 57 centres de collecte; 27 centres de collecte sont implantés dans la zone agropastorale et pastorale (Zone 2) et 16 centres de collecte sont implantés sur le territoire saharien (Zone 3).
Afin d’encourager la collecte, une prime de 4 DA par litre livré à l’usine est assurée pour les collecteurs livreurs ; l’éleveur qui livre son lait à la transformation est encouragé avec 7 DA par litre de lait cru livré et le transformateur est encouragé avec 2 DA par litre de lait cru réceptionné. Le montant des primes accordées aux collecteurs a plus que triplé pendant ces sept années, passant de 240 millions de DA à 774 millions de DA (Tableau 7). Des montants relativement importants ont permis l’achat des cuves de réfrigération, dont le nombre d’unités est passé de 32 en 2000 à 132 en 2006 ; les montants en dinars algérien (DA) alloués à l’achat de ces cuves, sont passés de 3 millions en 2000 à 20 millions en 2007. Malgré les efforts déployés par l’Etat pour promouvoir la collecte du lait cru, celle-ci est restée relativement faible et cela s’explique par:
la mise en place du réseau de petits collecteurs en trop grand nombre sans suivi;
la concurrence déloyale exercée par les circuits informels de distribution du lait cru et de ses dérivés (lait caillé, petit lait, beurre);
les règlements trop tardifs des primes de collecte pour les livraisons effectuées au profit des laiteries avec le tracas administratif au niveau des guichets de payement;
le prix payé aux producteurs qui est resté longtemps en dessous du seuil requis par ce dernier;
les avantages que confère le recours à la poudre de lait importée;
l’articulation laiteries/éleveurs insuffisante.
Tableau 7. Mesures de soutien à la collecte par les fonds de l’Etat |
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Dotations |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
Prime collecteurs (Unité: DA) |
239848 |
252220 |
333078 |
325590 |
407120 |
662962 |
856070 |
774245 |
Cuves Réfrigération (Unité: DA) Nombre d'unités |
3011100 32 |
4448000 457 |
53803000 455 |
146097000 259 |
2512900 326 |
50906000 6236 |
20839000 132 |
- - |
Source :(Ministère de l’Agriculture et du développement rural, 2008) |
La facture alimentaire globale est évaluée à environ 4,5 milliards de dollars (USD) équivalent à environ 333 milliards de DA et les produits laitiers à eux seuls représentent le ¼ de cette facture alimentaire, avec 1 milliard USD l’équivalent de 74 milliards de DA (soit 22,2% de la facture alimentaire en USD). L’équivalent de 294 240 tonnes de lait et produits laitiers ont été importés en 2007, sur 7 999 492 tonnes de produits alimentaires (soit 3,67 % des importations des produits alimentaires en tonnage).Les importations des animaux vivants en 2007 ont atteint 1,5 milliards de DA dont 305 millions de DA pour les génisses et vêles ; la même année, les importations d’’aliment du bétail s’élevaient à 15 milliards de DA (MADR, 2008).
Les importations de bovins obéissent aux changements des politiques entreprises; suite à une interdiction d’importations à cause des épidémies qui avaient frappé le cheptel européen, principale source d’approvisionnement de 2000 à 2003, le nombre de têtes importées durant cette période était relativement faible, comparé aux importations des années suivantes; dans le but d’augmenter la production laitière avec la venue des nouvelles directives du PNDAR (plan national de développement agricole et rural), les importations de génisses et vêles ont repris à partir de 2004.
De 2000 à 2003, le nombre de bovins laitiers importés est passé de 8 513 têtes à 9 147 têtes. En 2002. Les importations de bovins laitiers ont atteint leur niveau le plus bas sur la période analysée soit 262 génisses pleines et vêles. En 2004, elles sont beaucoup plus importantes atteignant les 38 448 têtes. L’effectif total de génisses pleines introduites en Algérie depuis 2000 est de 89 613 têtes pour un montant de 10 milliards DA (soit 140 millions USD).
Les importations des aliments du bétail sont en grande partie destinées aux producteurs de volailles ; la part destinée à la fabrication du concentré pour les bovins laitiers est moins importante et souvent ce sont les éleveurs eux-mêmes qui procèdent au broyage et au mélange des grains. Les prix de ces intrants alimentaires ont augmenté au cours de ces dernières années ; les experts de l’aliment du bétail prédisent même des insuffisances pour les exportations du tourteau de soja et du maïs pour les années à venir, en raison de certains effets conjoncturels, entre autre le développement des biocarburants. Les quantités des matières importées, ainsi que les sommes versées par l’Etat ont augmenté de 2000 à 2007, passant de 2 x109 kg en 2000 à 3x109 kg en 2007 pour 328 millions de USD en 2000, puis 750,6 millions de USD en 2007 (Tableau 8).
Tableau 8. Evolution des importations d’aliments du bétail en Algérie |
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Années |
Poids (millions tonnes) |
Valeur (milliards DA) |
Valeur (millions USD) |
2000 |
2,40 |
24,7 |
328 |
2001 |
2,46 |
27 |
350 |
2002 |
2,95 |
32,8 |
424 |
2003 |
2,07 |
25,9 |
335 |
2004 |
2,43 |
36,6 |
508 |
2005 |
3,15 |
39,4 |
537 |
2006 |
2,94 |
37,8 |
521 |
2007 |
3,01 |
52 |
750 |
Source : (CNIS 2008) |
En créant l’office national du lait, l’Etat s’est engagé à prendre en charge son approvisionnement en matière première, qui jusque là reste le principal problème auquel fait face l’industrie laitière. Le prix de la tonne de la poudre de lait ne cesse d’augmenter; ceci est dû principalement à la production laitière mondiale, qui n’augmente que de 1 à 2 % par an ces dernières années, ce qui n’est plus suffisant pour couvrir la demande des pays importateurs. Passant de 1 550 USD la tonne de la poudre du lait en 2000, le prix de cette dernière oscille entre 2 400 et 2 500 USD de 2000 à 2006, puis atteint 3000 USD en 2007 (FAO 2007). Ces hausses des prix résultent d’un fort déséquilibre entre une offre mondiale réduite et une demande soutenue. La limitation de l’offre s’explique par la forte chute des exportations des deux principaux pays très présents sur le marché mondial suite à des conditions climatiques désastreuses, sécheresse de 2006 en Australie et inondations en Argentine.
De même, au niveau européen, le climat particulièrement défavorable pénalise la production laitière en 2007, après une faible collecte en 2006 et plus particulièrement en France (Agreste Conjoncture 2007). La facture d’importation de la poudre de lait a atteint 1,064 milliards USD en 2007. Les importations de poudre de lait ont connu des augmentations de 2000 à 2007 que ce soit en quantité ou bien en valeur, passant de 188x106 kg de poudre de lait importée en 2000 à 252 x106 kg en 2007 ; ayant coûté 28 milliards de DA au trésor public en 2000 équivalent à 373 millions USD, ils atteignent 69,8 milliards de DA soit 1 milliard USD en 2007.
L’industrie de transformation demeure fortement dépendante des importations. Ce constat est corroboré par l’analyse de la structure des approvisionnements des entreprises, qui se caractérise par l’importance relative du poids des matières premières importées, pour les différentes activités. Les taux de dépendance à l’égard des approvisionnements extérieurs sont élevés pour toutes les activités du secteur de l’industrie laitière. Cette dépendance tient essentiellement à la faiblesse de la production nationale de lait cru, obligeant les fabricants à recourir à la poudre de lait importée. L’infrastructure industrielle a été conçue dans le but de répondre à une demande galopante pour le lait et les produits laitiers avec la perspective de développer la production laitière et d’en faire la principale source d’approvisionnement en matière première et de l’intégrer dans le processus de transformation. La production industrielle a connu des fluctuations de 2000 à 2007, où elle est passée de 900 millions de litres en 2000 à 1 milliard de litres en 2005 pour régresser ensuite (904 millions en 2006), puis 917 millions de litres de lait en 2007 (Tableau 9).
Tableau 9. Evolution de la production industrielle et du taux d’intégration du lait cru dans la transformation de 2000 à 2007 |
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Années |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
Production industrielle (103 litres) |
900 000 |
850 000 |
1 302 000 |
1 230 000 |
1 280 000 |
1 344 000 |
904 610 |
917 420 |
Taux d'intégration du lait cru dans la transformation (%) |
11,1 |
11 |
10 |
10 |
11 |
12 |
10 |
13 |
Source :(Ministère de l’Agriculture et du développement rural, 2008) |
La production industrielle n’a pas progressé, comparée à l’évolution de la population, de la consommation et au nombre d’entreprises privées qui ont émergé; plusieurs faits économiques ont contribué à cette situation, entre autres :
l’augmentation des prix de la poudre de lait et des matières grasses sur le marché international ;
les quantités de poudre de lait importée, ainsi que celles de matières grasses, utilisées par la plupart des transformateurs dans la fabrication de produits dérivés, tels que les yaourts, fromages, crèmes fraîches et autres produits dérivés du lait qui sont plus rémunérateurs que le lait pasteurisé ;
les filiales GIPLAIT semblent confrontées à des contraintes d’exploitation de leurs capacités.
Le taux d’intégration du lait cru collecté localement dans la transformation industrielle demeure d’un niveau dérisoire, oscillant autour de 10% à 11% et ne dépassant pas les 13% (Tableau 9).
Les sommes totales des primes accordées aux transformateurs, ont connu une évolution positive importante entre 2000 et 2007 (Tableau 10). La prime de 2 à 4 DA par litre de lait versée aux unités de transformation à la réception du lait cru local dépend des quantités achetées (2 DA pour 5 000 litres; 2,5 DA pour une quantité de 5 000 à 10 000 litres et de 3 DA pour 10000 à 15000 litres et enfin à 4 DA pour l’achat de 15 000 à 20 000 litres de lait cru. Pour inciter les producteurs à améliorer la qualité du lait livré aux usines de transformation, une réfaction ou bonification de 0,50 DA par gramme de matière grasse est appliquée au seuil de 34 grammes par litre. Pour encourager la mise en place des laiteries, un financement de 40 % de l’équipement des mini-laiteries de capacité de 5000 à 10000 litres est accordé par l’Etat et 60% lorsque les investissements sont réalisés par des producteurs organisés en coopératives.
Tableau 10. Evolution des mesures de soutien a la transformation du lait cru par le fonds de l’Etat |
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Dotations |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
Prime transformateurs (unité : 103 DA) |
127 521 |
166 823 |
- |
- |
34 186 |
103 920 |
332 540 |
383 180 |
Source :(Ministère de l’Agriculture et du développement rural, 2008) |
Suite à l’ouverture de l’économie algérienne sur le marché international, il existe trois types de circuits de mise en marché et de distribution du lait et des produits laitiers :
Il s’agit de l’autoconsommation ou de la vente de proximité du lait cru et dérivés fabriqués au niveau des fermes de manière artisanale (lait caillé, petit lait…), ainsi que la collecte injectée dans les centres de transformation au niveau des petites laiteries et des entreprises privées, difficile à évaluer.
C’est la production issue des entreprises de transformation qu’elles soient étatiques ou privées à travers les distributeurs et les détaillants, ainsi que les produits importés (poudre de lait et farines lactées), pour être revendues en l’état. La formule la plus répandue dans la livraison des produits, est celle assurée de façon conjointe par le producteur et le distributeur-grossiste (système mixte). La part des entreprises assurant le transport par leurs propres moyens est aussi importante. Ainsi, le colportage s’impose dans le marché comme le facteur clé de succès. Une grande partie des produits fabriqués dans les usines est livrée par les producteurs. Ainsi, les moyens de transport constituent un investissement important pour les entreprises du secteur laitier. Le poids des entreprises fabriquant des yaourts, fromages et glaces dont la distribution est assurée sur une base nationale est important, contrairement aux laits liquides dont la distribution est régionale voire même locale.
Il s’agit des entreprises privées engagées dans l’importation et la distribution spécialisée en commerce de gros. Ces entreprises ont amplement investi la gamme des produits de longue conservation (poudre de lait et lait infantile), ainsi que les fromages à pâtes dures, beurre, etc.…, assurant le relais dans ce segment d’activité des ex-entreprises du secteur public. Des firmes internationales interviennent aussi directement en Algérie dans l’activité de distribution. C’est le cas du distributeur officiel des produits de Nestlé (Général Best Food) implanté à Alger.
D’après le ministère du commerce (2008), la consommation globale du lait et de ses dérivés en Algérie a atteint 3,4 milliards de litres, soit près de 115 litres/habitant/an en 2007, en raison principalement de la croissance démographique et du prix du lait qui est resté accessible tout au long de cette période. L’Algérie est le plus gros consommateur en lait et produits laitiers au niveau maghrébin. A titre de comparaison, cette moyenne est respectivement de 87 litres/habitant/an pour la Tunisie et de 50 litres/habitant/an pour le Maroc. Cependant, le consommateur algérien reste loin derrière le consommateur européen, qui consomme plus de 300 litres/an en 2007 et bien loin du consommateur français, qui atteint les 406 kg équivalents lait par an (FAO 2007). Les chiffres du Tableau 11 indiquent que la consommation fluctue entre 100 et 115 litres par habitants et par an. L’année 2007 est celle ou la consommation enregistrée par le ministère du commerce est la plus élevée.
Tableau 11. Evolution de la consommation de lait et produits laitiers entre 2000 et 2007 |
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Années |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
Population (Million habitant) |
30 416 |
30 879 |
31 357 |
31 848 |
32 364 |
32 600 |
33 200 |
33 800 |
Consommation (Litres/habitant/an) |
100 |
113 |
105 |
102 |
114 |
110 |
112 |
115 |
Source : (MC 2008) |
Le taux de couverture de la consommation par la production nationale de lait cru, s’élève en 2007 à environ 30 %. Durant la dernière décennie, il s’est situé autour de 40 % (MADR, 2008). Afin de combler ce déficit dans la couverture des besoins de la population en lait, le secteur de l’industrie laitière en Algérie a toujours fonctionné avec de la poudre de lait importée. Pour soutenir le prix du lait ordinaire vendu à 25 DA le sachet d’un litre, l’Etat consacre une subvention de l’ordre de 15 milliards DA en 2007 (MADR, 2008). Le développement des entreprises privées, après l’ouverture de l’économie dans le contexte de la mondialisation, a permis une diversification croissante de la gamme mise sur le marché à la grande satisfaction du consommateur.
L’examen des principales données relatives à la production laitière en Algérie permet de conclure que malgré les efforts consentis dans le cadre du plan national de développement agricole (PNDA) depuis l’année 2000, suivi du plan national de développement agricole et rural (PNDAR) en 2002 afin d’encourager l’élevage, d’améliorer ainsi la production laitière et développer la collecte du lait cru, les importations de matières premières nécessaires au fonctionnement de l’industrie laitière restent toujours prédominantes. Aujourd’hui, la consommation laitière dépend de l’étranger pour plus de 70% de son volume.
Les actions menées pour le développement de la production laitière ont été multiples et des fonds publics importants ont été mobilisés dans cette perspective, mais force est de constater qu’au-delà des efforts indéniables développés, ici et là, la production et la collecte du lait cru tardent à se développer. Le taux d’intégration industriel de la production locale demeure faible (13%).
L’intensification de la production laitière au niveau des exploitations aurait dû constituer l’élément de base de la stratégie de l’Etat au niveau de la filière, laquelle aurait requis l’extension des périmètres irrigués et des superficies fourragères, ceci avec un encadrement des éleveurs par un système de crédit efficient et des actions de vulgarisation dans un domaine où précisément le professionnalisme est exigé en raison de la complexité de l’activité.
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Received 3 May 2011; Accepted 18 July 2011; Published 3 August 2011