Livestock Research for Rural Development 22 (8) 2010 Notes to Authors LRRD Newsletter

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Valeur alimentaire et composition floristique des prairies permanentes multi espèces: résultats d’une étude conduite au Nord-est algérien

L Mebirouk-Boudechiche*, L Boudechiche**, A Touati*, A Tahar*** et A Araba****

* Institut d’Agronomie, Centre Universitaire d’El Tarf, B.P 73, 36000. Algérie
Boudechiche_lamia@yahoo.fr
** Institut Vétérinaire, Centre Universitaire d’El Tarf, B.P 73, 36000. Algérie
Boudechiche_lyes@yahoo.fr
*** Département de Biologie, Université Badji Mokhtar, Annaba. Algérie
**** Département de Productions et de Biotechnologies animales, Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, BP 6202, Rabat Instituts, 10101 Rabat, Maroc

Résumé

Les conditions pédoclimatiques et les pratiques de conduite influencent la composition floristique et le rendement des prairies permanentes ; ces dernières, peuplées d’une végétation spontanée, ne font l'objet d'aucune gestion particulière dans la région du Nord-est algérien bien qu’elles restent la source principale alimentaire des ruminants existant dans la zone. En effet, n’étant jamais mises en défens, elles ne permettent pas la pousse d’herbe, contraignant le rendement et de ce fait les productions animales (lait, viande,...). Le but de cette étude est de valoriser ces prairies grâce à la connaissance des peuplements floristiques qui les composent et à l’’évaluation de la variabilité de leur valeur alimentaire en relation avec la variabilité de leur composition botanique au cours des saisons afin d’exploiter les parcelles au stade optimum.

 

Pour ce faire, une étude comparative sur le plan de la biodiversité floristique, de la productivité à l’hectare et de la valeur nutritive de deux prairies l’une mise en défens et l’autre librement pâturée, a permis de conclure qu’une mise en défens minimum de deux ans permettrait d’avoir des rendements supérieurs (1,6 vs. 0,8 T de MS/ ha), que la période de mise à l’herbe la plus adéquate serait à la période automnale (hauteur d’herbe = 10 cm) et que celle de la fauche était à la sortie de l’hiver (hauteur d’herbe= 18 cm). Cependant, afin d’obtenir un meilleur compromis entre rendement et qualité d’herbe, il serait intéressant de les exploiter à la sortie de l’hiver pour optimiser les productions animales.

Mots clés: Algérie, Pâturage, rendement en sec, ruminants, valeur nutritive



Nutritional value and floristic composition of permanent grassland multi species: results of a study conducted in North-eastern Algeria

Summary

Soil and climatic conditions and cultivation affect the floristic composition and yield of permanent grassland, these last, peopled by natural vegetation, not subject to any special management in the north east of Algeria, although they remain the main source of ruminant food existing in the area. In fact, never being closed to cattle, they don’t allow grass growth, constraining yields and livestock production (milk, meat,...). The aim of this study is to develop these permanent grasslands through the knowledge of the flora that stands up to and the variability of their nutritional value in relation to the variability of their botanical composition during the seasons in order to exploit grasslands at the optimum stage.

 

To do this, a comparative study in terms of plant biodiversity, productivity per hectare and nutritional value of two fields into one defends and the other grazed freely, concluded that setting defends minimum of two years would have higher yields (1.6 vs. 0.8 T DM / ha), the period of the grass would be most appropriate to the autumn period (height grass = 10 cm) and that of the hay was end of winter (grass height = 18 cm) However, to obtain a better compromise between yield and quality of grass, it would be interesting to exploit fields end of winter to optimize animal production.    

Keywords: Algeria, dry productivity, nutritive value, pasture, ruminant


Introduction

La prairie naturelle ou permanente est le principal pourvoyeur d'aliments (herbe, ensilage, foin)  pour les ruminants et le pâturage est le mode d’alimentation le plus dominant pour tous les systèmes de production allaitant en raison de son coût réduit (Vigneau-Loustau  2008), l’herbe des pâturages étant sans conteste le fourrage le plus économique. C'est dire l'importance qu'ont une bonne gestion et une bonne utilisation des prairies pour l'économie de l’élevage.

 

Malheureusement,  il semble que culturellement, dans beaucoup de régions d’Afrique du Nord et notamment en Algérie, l’idée de cultiver de l’herbe n’est pas encore passée dans les mœurs. Habitués depuis plusieurs siècles au recours aux unités fourragères gratuites, beaucoup d’agro-éleveurs des pays de la région méditerranéenne ne ressentent pas la nécessité de cultiver de l’herbe pour leurs troupeaux, ce qui limite la valorisation des prairies et le développement du pâturage.

 

Un des gros problèmes que pose la valorisation correcte des prairies est l'évolution très variable de leur capacité de production et de la valeur de cette production au cours des saisons (Paquay 2004).

 

C'est dans cet ordre d'idées que nous avons estimé nécessaire de se pencher sur la valorisation des pâturages du Nord-est algérien par une première étape d’analyse de la biodiversité du cortège floristique, de la prévision de la qualité du fourrage produit par les associations végétales et de la production fourragère permise par ces prairies selon les saisons surtout en année de forte pluviométrie, pour ensuite orienter le mode d’exploitation possible de ces prairies (fauche ou pâture).

 

Enfin, suite aux résultats de notre étude, nous aborderons quelques recommandations pour une éventuelle valorisation des prairies du Nord-est algérien, qui constituent le meilleur moyen pour réduire les coûts d'alimentation des troupeaux.

 

Matériel et méthodes 

Présentation de la zone d’étude 

 

L’étude a été menée au niveau des plaines de la wilaya d’El Tarf, laquelle est située au Nord-est de l’Algérie (8° 11’ de longitude et 36° 47 ’de  latitude). La région est caractérisée par un climat méditerranéen de type subhumide à humide chaud, des hivers doux et des étés secs.

La synthèse climatique réalisée sur les 20 dernières années donne des moyennes de précipitations annuelles de 800-1200 mm caractérisées par une grande irrégularité temporelle (intra annuelle). En effet, l’analyse des hauteurs mensuelles de pluie fait ressortir un maximum aux mois de décembre et janvier (134,34 mm et 136,42 mm respectivement pour chaque mois) et un minimum aux mois de juillet et août (3,97 mm et 13,34 mm).

La moyenne annuelle des températures est de 19,24°C avec un maximum au mois d’août (27,35 °C) et un minimum au mois de janvier (12,96 °C).

 

Relevés phytosociologiques et prélèvements des échantillons

 

Nous avons choisi deux parcelles, non fertilisées, de 7 ha chacune dans une zone représentative des plaines de la région étudiée ; la première (A) est une parcelle qui a été mise en défens deux années au préalable tandis que la deuxième (B) est une parcelle pâturée plusieurs fois dans l’année par des bovins. L’étude a été menée au cours des trois saisons consécutives: automne, hiver et printemps.

 

Sur ces surfaces, encloses, la végétation est uniquement herbacée et hétérogène ; elle comprend plusieurs faciès de végétation. En conséquence, les parcelles ont été cartographiées en différents "secteurs homogènes" ; ce sont des surfaces représentatives limitées et connues : les stations (Ellenberger 1977) ; ce sont des zones où les conditions écologiques sont homogènes du point de vue physionomique et géomorphologique et où la végétation est uniforme (Code écologique du CEPE  in Long 1974).

 

La biodiversité floristique des pâturages a été mesurée par leur richesse floristique (Daget 1982 ; Daget et Poissonet 1997). A cet effet, Le dispositif expérimental a été quadrillé sur une aire de 6262,4 m² de surface à l’intérieur de laquelle plusieurs stations de 25 m2 ont fait l’objet de différents relevés floristiques comprenant inventaire, collecte et pesée. La distance entre les relevés (stations) a été déterminée par un nombre de pas en relation avec la taille du secteur de végétation considéré ; nous avons ainsi opté pour un nombre de 25 pas entre les carrés (Moulin et Sudre 1997) en direction diagonale par rapport à la parcelle.

 

L'importance relative des espèces est exprimée par le coefficient d’abondance-dominance de Braun-Blanquet (1951) et la biodiversité par l’indice de Shannon (H’) exprimé par l’équation suivante :

 

i : une espèce du milieu d’étude

pi : proportion d’une espèce i par rapport au nombre total des espèces (S) dans le milieu d’étude (pi= ni/N où ni est le nombre d’individus pour l’espèce i et N est l’effectif total (les individus de toutes les espèces).

 

Importance de la phytomasse, valeurs nutritive et fourragère des pâturages

 

La production de biomasse aérienne a été estimée par le rendement en sec qui reste une caractéristique très importante chez les fourrages ; en effet, Lemaire (1991) précise que la production d'un peuplement prairial peut être définie comme la quantité de matière sèche produite par une surface. Ce rendement a donc été estimé par fauchage de la totalité des plantes ou touffes dressées dont le point d’enracinement se trouvait à l’intérieur des stations (Boudet et Baeyens 1963). Les coupes sont faites le plus près possible de la surface du sol sur une surface élémentaire de 1 m² à l’intérieur des stations.

 

Les échantillons ont été pesés directement (poids frais) après séparation des fractions morte et vivante puis placés dans une étuve (environ 48 heures à 60 °C) jusqu’à obtention d’un poids constant (poids sec). Les résultats obtenus sont alors extrapolés à l’hectare. Les échantillons de fourrage ont été broyés pour déterminer les teneurs en cellulose brute, en matières azotées totales et en matières minérales selon les méthodes AOAC (1990).

 

Les méthodes de calcul de la valeur nutritive sont basées sur les formules INRA France (Baumont et al 2007a).  

 

Résultats et discussion  

Inventaire des relevés floristiques

 

L’examen des relevés phytosociologiques à la période automnale, montre une prédominance de composées avec une contribution de 85% et 78% respectivement pour les deux parcelles A et B (Tableau 1), une absence de graminées (0%) et une faible contribution de légumineuses (principalement luzerne). Ceci est expliqué par le fait qu’à cette période de l’année, les graminées se trouvent en repos végétatif, les légumineuses au stade végétatif tandis que les composées, étant pour la majorité d’entre elles des plantes bisannuelles ou vivaces, ont tendance à conserver leur feuillage (marguerite, épervière, laiteron,…).

 

A la période hivernale, les légumineuses se développent au détriment des composées dans la parcelle mise en défens, tandis que dans la parcelle B, les plantes à intérêt fourrager se raréfient (graminées et composées) au détriment d’autres espèces vénéneuses comme les renoncules ou indésirables comme le rumex (23%) témoignant d’un pâturage. A cette période coïncidant avec la survenue des pluies, la végétation se développe d’autant plus que l’hiver est doux (HH = 18 cm).

 

Au printemps, correspondant au redémarrage de la végétation, la prairie amorce son cycle annuel de végétation et ceci d’autant plus si elle est en défens (HH = 75 cm) ; les graminées renouvèlent leurs feuilles et se trouvent à cette période en pleine épiaison avec une contribution de 26 % tandis qu’elle n’est que de 18 % dans la parcelle B, ceci en raison de leur appétence (Paquay 2004).

 

La moyenne des relevés floristiques présente une dominante de composées à cette période de l’année qui correspond à la saison de pâturage, que la parcelle soit mise en défens ou pâturée ; ceci serait sans doute imputable à la conduite demeurée traditionnelle des prairies: absence de fertilisation, d’entretien, ... , ce qui cause ce déséquilibre de la flore prairiale dont la composition équilibrée est définie par la présence de 50 à 70% de bonnes graminées.

 

Du point de vue biodiversité exprimée par l’indice de Shannon (H’), il apparait clairement que l’indice est plus élevé à la période printanière du fait de la reprise de la végétation, cependant il est meilleur lorsque la parcelle est mise en défens (2,39 vs. 1,88). La diminution de cet indice dans la parcelle B de l’automne à l’hiver (1,27 vs. 1,12) est la conséquence  du pâturage.


Tableau 1.  Importance de la biodiversité floristique des parcelles pâturée (B) et mise en défens (A) en fonction des saisons

 

Automne

Hiver

Printemps

Contribution, %

HH, cm

H’

Contribution, %

HH, cm

H’

Contribution, %

HH, cm

H’

Parcelle A

Légumineuses

12,5

 

10

 

 

1,36

34,4

 

18

 

 

1,88

22,0

 

75

 

 

2,39

Graminées

00,1

08,9

26,0

Composées

85,0

31,8

49,0

Ombellifères

02,3

02,0

02,0

Autres

00,0

22,9

01,0

 Parcelle B

Légumineuses

22,1

10

1,27

39,9

06

1,12

23,5

34

1,88

Graminées

00,0

01,2

18,2

Composées

77,8

01,5

51,0

Ombellifères

00,0

00,0

00,7

Autres

00,0

57,5

06,2

HH : Hauteur de la parcelle en cm ; H’ : Indice de Shannon


Le diagnostic prairial des relevés floristiques effectués au printemps, atteste que certaines espèces qui sont cataloguées en «diverses fourragères» (Daucus carota, Anethum graveolens, Sonchus oleraceus L), n’appartenant ni à la famille des graminées ni à celle des légumineuses, présentent un intérêt fourrager pour les bovins dans la parcelle B, alors qu’elles semblent gêner le développement des bonnes espèces dites fourragères (graminées et légumineuses) dans la parcelle A, de même que certaines plantes indésirables (Ranunculus arvensis, Rumex acetosa, Galactites tomentosa) (Tableau 2). 


Tableau 2.  Relevé phytosociologique au printemps

Espèces

Parcelle A

Parcelle B

Anethum graveolens

1

+

Anemone hupehensis

+

 

Bellardia trixago

+

 

Borago officinalis 

+

 

Calendula arvensis

2

 

Centaurium umbellatum

+

2

Convolvulus tricolor L

1

2

Daucus carota

+

 

Euphorbia helioscopia L

+

 

Galactites tomentosa

2

 

Hedysarum herbasum

+

 

Hedysarum flexuosum L

+

 

Leucanthemum vulgare Lam

1

2

Lolium sp

2

2

Malva sylvestris

+

 

Medicago ssp

2

2

Melilotus officinalis Lam

+

 

Phalaris bulbosa

2

 

Picris echioides 

2

3

Ranunculus arvensis

+

 

Rumex acetosa

+

 

Sonchus oleraceus L

1

 

Trifolium sp

2

2

Vica sativa

+

 


Sous climat méditerranéen, il convient ainsi pour promouvoir la diversité botanique des pâturages en vue de valoriser les bonnes espèces fourragères d’effectuer une mise en défens et surtout un entretien des prairies (désherbage, fertilisation) de même que d’encourager le pâturage superficiel de l’ensemble des parcelles pour favoriser le tallage des graminées.

 

Production de la phytomasse

 

La production de matière sèche a été variable au cours de l’année (Tableau 3 et Figure 1) ; elle a été maximale au printemps tant pour la parcelle A que B (1,6 et 0,8 t MS/ha respectivement pour les deux parcelles) ; ce pic de production est rendu possible grâce aux températures printanières et à la réserve encore disponible en eau.


Tableau 3.  Production de la phytomasse aérienne des parcelles pâturée (B) et mise en défens (A) en fonction des saisons

 

Automne

 Hiver

Printemps 

 

Matière verte, t  MV/ha(1) 

Matière sèche,
t  MS/ha(1)  

Matière verte,
t  MV/ha(1)  

Matière sèche,
t  MS /ha(1)  

Matière verte, t  MV/ha(1)  

Matière sèche,
t MS /ha(1)  

Parcelle A

7,2

0,6

6,5

1,5

5,5

1,6

Parcelle B

4,7

0,5

1,8

0,4

3,4

0,8

t  MV/ha(1)   : tonne de matière verte par hectare ; t MS/ha(2) : tonne de matière sèche par hectare


Dans le but de combiner gestion optimale du pâturage et performances animales, il serait judicieux dans ces conditions de milieu d’exploiter par pâturage les prairies du Nord-est algérien en automne, ce qui correspond au stade feuillu de la végétation, tandis qu’il est préférable de les exploiter par fauchage à la sortie de l’hiver.

 

En effet avec une hauteur d’herbe de 10 cm en automne, ce qui correspond à une productivité de 600 Kg de MS/ha, les animaux peuvent être mis à l’herbe sans gaspillage dû à une croissance trop rapide (Paquay 2004), ce qui serait sans doute le cas à la sortie de l’hiver (HH= 18 cm).

 

Quant à la hauteur de sortie qui permettra la repousse végétative, elle serait dans ce cas de 5 cm si l’on se base sur les références de l’INRA qui indique une hauteur de sortie cible égale à 0,54 fois la hauteur d’entrée (Belot 2008). Ce coefficient permet d’obtenir le meilleur compromis entre production laitière et maîtrise du pâturage en maximisant l’ingestion journalière d’herbe tout en assurant la production d’une quantité importante d’herbe.



Figure 1.  Pousse de l’herbe en année pluvieuse au Nord-est algérien tout au long de l’année


Valeur nutritive des pâturages 

 

Composition chimique et digestibilité 

 

La teneur en matière sèche des prairies connait une augmentation graduelle au fur et à mesure des saisons. Elle est d’une moyenne de 10 vs. 11% pendant la saison automnale respectivement pour les parcelles A et B, ce qui correspond à la phase végétative des graminées et des légumineuses ; 23,41 vs. 20, 58 % pendant la saison hivernale, respectivement pour les parcelles A et B, ce qui correspond au stade montaison des graminées et début formation des boutons des légumineuses et enfin 24 vs. 23 pendant la saison printanière, respectivement pour les parcelles A et B, ce qui correspond au stade épiaison des graminées et floraison des légumineuses (Tableau 3). C’est à cette dernière phase que la valeur de la MS est la plus importante.

 

Les taux de matière minérale et de protéines brutes ont tendance à baisser, étant en relation étroite avec les stades phénologiques des espèces composant la masse végétale ; pour les MM, la valeur maximale est ainsi atteinte en automne ce qui correspond au stade feuillu de la végétation (12,5 et 13 % respectivement pour les deux parcelles A et B) (Tableau 4), et la valeur minimale au printemps (9,69 et 9,84 % respectivement pour les deux parcelles A et B)  correspondant au stade épiaison des graminées.

 

Les teneurs en MAT diminuent dans la parcelle A de 3,5 % entre l’automne et le printemps, alors qu’elles ne baissent que de 1 % dans la parcelle B, cette dernière étant continuellement pâturée, ce qui favorise des repousses végétatives feuillues ; la prairie est ainsi constituée d’une très grande partie de feuilles jeunes qui représentent la partie la plus riche de la plante. En revanche, dans la parcelle A (en défens), les plantes suivent leurs cycles phénologiques : ainsi cet écart en MAT (3,5 %) serait du au fait que la teneur en protéines varie dans des proportions considérables en fonction du stade de végétation. Selon Jarrige et al (1995), les plantes fourragères s’appauvrissent en MAT au cours de leur croissance avec la sénescence de leurs organes aériens.

 

D’après Andrieu et Demarquilly (1987) et Hnatyszyn (1988), les teneurs en MAT et en cendres diminuent avec la phase de développement et l’âge de la plante.


Tableau 4.  Composition chimique et valeur nutritive des pâturages du Nord-est algérien en fonction des saisons

 

Automne

Hiver

Printemps

Parcelle A

Parcelle B

Parcelle A

Parcelle B

Parcelle A

Parcelle B

MS, %

10

11

23,4

20,6

24

23

MM, %MS

12,5

13

10,3

11

9,69

9,84

MAT, %MS

14

15

11

14,6

10,5

14

CB, %MS

27

28

31

30

32,5

30

UFL, /kg MS

0,82

0,81

0,76

0,80

0,74

0,80

UFV, /kg MS

0,75

0,74

0,69

0,73

0,66

0,73

PDIN, g/kg MS

93

101

73

96

69,6

92,6

PDIE, g/kg MS

96

100

84

98

81

96

dMO, %

70,4

71,0

65,5

68,5

64

68

MS :   Matière sèche ; MM :  Matière minérale ; MO :   Matière organique ; MAT : Matières azotées totales :

CB :    Cellulose brute ; UFL et UFV: Unités fourragères Lait et Viande

PDIN et PDIE : Protéines Digestibles Intestinales permises par l’azote et l’Energie


Le taux de cellulose brute évolue d’une manière inversement proportionnelle au taux de MAT ; ce taux est maximal (32,5 % vs. 30 % respectivement pour les parcelles A et B) au printemps (épiaison des graminées) et minimal au démarrage de la végétation (27 % vs. 28 % respectivement pour les parcelles A et B).

 

L’évolution de la cellulose brute augmente de façon importante et régulière avec l’âge de la plante (Jarrige et al 1995). C’est à la phase végétative où on enregistre la plus faible teneur (27 et 28 % respectivement pour les deux parcelles A et B) (Tableau 4). Le taux en cellulose brute croit de 5,5 % du départ de végétation à l’épiaison au niveau de la parcelle A  et de 2 % dans la parcelle B ; cet écart est du au fait que la prairie est constituée d’une grande partie de repousses feuillues, lesquelles sont pauvres en cellulose brute.

 

La digestibilité est négativement liée à la hauteur d’herbe, ainsi, dans la parcelle A, elle passe de 70,4 % au départ en végétation (HH= 10 cm) à 64 % à l’épiaison des graminées

(HH= 75 cm), ce qui confirme l’intérêt d’un pâturage ras pour préserver la qualité des repousses (Peyraud et Baumont  2002).

 

Valeurs fourragères

 

Au niveau de la parcelle A, l’évolution des valeurs fourragères suit la même tendance que celle de la dMO qui constitue le meilleur critère d’estimation de la valeur énergétique des fourrages (Andrieu et Demarquilly 1987) ; les UFL atteignent des valeurs maximales au stade départ en végétation 0,82 ; 0,76 et 0,74 respectivement pour l’automne, l’hiver et le printemps. Il en est de même pour les valeurs protéiques 93 ; 73 et 69,6 g/kg de MS de PDIN respectivement pour les trois saisons (Tableau 4). Ces valeurs fourragères restent tout de même supérieures au niveau de la parcelle pâturée (B) surtout en hiver et au printemps 0,80 vs. 0,76 et 0,80 vs. 0,74 UFL/kg de MS, respectivement.

 

L’explication pourrait résider dans le fait que plus la hauteur d’herbe est faible, plus la partie consommée de l’herbe est feuillue et donc riche. En effet, la qualité, autrement dit la valeur alimentaire de l’herbe, est proportionnelle au ratio feuille/tige. Au fur et à mesure que la hauteur d’herbe augmente, le ratio feuille /tige diminue et provoque donc une légère diminution de la valeur alimentaire. Celle-ci s’effondre dès l’apparition des premiers épis

Toutefois, ces valeurs restent faibles par rapport aux résultats trouvés par Baumont et al (2007b) avec 0,72 UFL, et 72 et 82 g/kg de MS respectivement pour les PDIN et PDIE de prairies permanentes de plaine au stade épiaison.

 

Par ailleurs ces valeurs, au niveau de la parcelle pâturée, sont supérieures à celles d’une prairie mise en défens du fait que la valeur nutritive du fourrage diminue lorsque l’intensité d’utilisation baisse, principalement parce qu’il est récolté à un stade tardif (Daccord 1991cité par Huyghe et al 2005).

 

Conclusion 

Pour obtenir cela, l’important est de faire pâturer les parcelles au stade optimum.

 


Références bibliographiques

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Braun-Blanquet J 1951 Pflanzensoziologie (2ème édition), Springer, Vienne, 631 P.

 

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Hnatyszyn M 1988 Les fourrages et l’éleveur. Edition Lavoisier France, 439 P

 

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Lemaire G 1991 Productivité des peuplements prairiaux : Caractérisation et diagnostic. Fourrage, 127 :259-272.

 

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Received 23 April 2010; Accepted 7 May 2010; Published 1 August 2010

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