Livestock Research for Rural Development 22 (12) 2010 | Notes to Authors | LRRD Newsletter | Citation of this paper |
La présente étude a pour objectif d'analyser l'introduction de l'élevage bovin dans les régions sahariennes. L'analyse de la conduite d'élevage dans la région de Guerrara (Sahara algérien) fait ressortir que cette dernière possède une potentialité assez importante en matière de productions bovines, notamment du lait avec une production annuelle de 3 000 000 kg (20 kg/vache/jour en moyenne), une production de viande de 6642 q et un effectif total de 1400 têtes.
Cependant, cet élevage mené en intensif, se trouve confronté à de multiples obstacles qui maintiennent son développement encore lent. En effet, de multiples contraintes ont été observées ; (i) alimentaire : indisponibilité de fourrages et non maitrise du rationnement, (ii) environnementale : difficulté d’adaptation des animaux, (iii) sanitaire : non respect des normes hygiéniques, (iv) économique : dépendance plus ou moins grande envers les approvisionnements en aliment. Par ailleurs, il ne parait pas utopique de prévoir que l’élevage laitier soit appelé à prendre une place prépondérante au cours des prochaines années, par l’adoption des stratégies efficaces, qui prendront comme principaux maillons une bonne maîtrise de l'alimentation avec disponibilité fourragère en permanence et des animaux sains qui évoluent dans un élevage sain.
Mots clés: Algérie, contraintes, désert, développement, vache laitière
The current study aims at analyzing the introduction of bovine breeding into the Saharan areas. The analysis of the control of breeding in the area of Guerrara (Algerian Sahara), emphasizes that the latter has a rather important potentiality as regards to the bovine productions, in particular that of milk with an annual production of 3.000.000 kg (an average of 20 kg/cow/day), a meat production of 6642 q and a total staff complement of 1400 heads.
However, this intensively carried out breeding, is confronted with multiple barriers which maintain its development still slow. In fact four types of constraints have been observed: (i) alimentary : fodder non-availability, and non mastery of rationing, (ii) environmental : animals adaptation difficulties, (iii) health: no respect of the hygienic standards, (iv) economic : a more or less large dependence on the food supplies. In addition, it does not appear utopian to forecast that the dairy breeding has to take a dominating place during the next years, by the adoption of the effective strategies, which will take as principal links a good food control with permanent folder availability and healthy animals that grow within a healthy livestock.
Key words: Algeria, constraints, dairy cow, desert, development
La vache a toujours été et continue d'être la ressource préférentielle et principale du lait. Ce dernier constitue un produit de base dans le modèle de consommation algérien (Senoussi 2008). Sa part dans les importations alimentaires totales du pays représente environ 22 %. L’Algérie se place ainsi au troisième rang mondial en matière d’importation du lait et produits laitiers, après l’Italie et le Mexique (Amellal 2000). Les besoins globaux en lait de l’Algérie sont estimés à 5 milliards de litres en 2007, avec une consommation moyenne de l’ordre de 130 litres/habitant/an (I.T.E.L.V. 2007). L’Algérie consomme plus de 3,3 milliards de litres d’équivalents lait par an, soit un taux de couverture par la production locale estimé à 40 %. Ceci implique que le pays s’aquitte d’une lourde facture, estimée à plus de 600 millions de $ afin de couvrir le déficit laitier (Adem 2006).
En Algérie, l’élevage bovin demeure concentré dans le nord du pays (400 mm de pluies) ; c’est ce que confirmait Nedjraoui (2003) en rapportant qu’il y a une spécialisation des zones agroécologiques en matière d’élevage. L’élevage bovin reste cantonné dans le Nord du pays avec quelques incursions dans les autres régions. En effet, On retrouve dans les régions Nord du pays environ 80 % de l’effectif bovin avec 59 % à l’Est, 14 % à l’Ouest et 22 % au centre (Tableau 1).
Tableau 1. Importance et répartition du cheptel bovin en Algérie (M.A.D.R. 2003) |
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Région |
Effectifs, têtes |
Proportion |
Centre |
338 800 |
22 % |
Ouest |
215 600 |
14 % |
Est |
908 600 |
59 % |
Sud |
77 000 |
5 % |
Total |
1 540 000 |
100 % |
Par ailleurs, la progression observée ces dernières années est le résultat direct de l’augmentation des effectifs par l’importation de génisses pleines et l’amélioration progressive des techniques de production. C’est dans cette perspective que le Plan National de Développement Agricole initié en 2000, à travers la rubrique élevage bovin laitier, s’est répercuté positivement sur l’espace saharien. En effet 77 000 têtes bovines sont recensées dans les régions sahariennes sur les 1 560 000 têtes qui constituent le cheptel national ; soit une proportion de 5 % du total.
C’est ainsi qu’un nouveau système de type intensif s’est installé à travers des fermes d’élevage spécialisées, à l’image de la région de Gardaïa (Sahara Septentrional Algérien) qui connait une véritable dynamique. Cependant ce système inédit fait face à de multiples obstacles qui, bien que surmontables, constituent un frein quant à la réalisation de performances zootechniques.
La présente étude tente par ailleurs de proposer des actions fécondes dans la perspective d’enclencher un développement local largement durable.
L'espace d’investigation est représenté par la région de Guerrara dont l’oasis fut fondée depuis les années quarante du dix-septième siècle, au fond d'une grande dépression qui occupe le lit d'Oued Zegrir. Elle est située à 120 km du chef lieu de Wilaya Ghardaïa, à 32°50’ Nord de latitude, 4°30’ Est de longitude et une altitude moyenne de 350 m. La commune de Guerrara couvre une superficie totale de 2900 km².
La démarche investigatrice adoptée incarne l’approche systémique qui permet d’établir un état des lieux, de situer les contraintes et les atouts concernant le système d’élevage et de dresser des axes d’interventions pratiques. Dans cette optique, Guerrara a été choisie comme région d’étude en raison de l’émergence rapide de l’élevage bovin laitier. Pour une logique de travail on a opté pour un mode de zonage raisonné, c’est ainsi que la région a été découpée en 6 zones bien distinctes (Figure 1).
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Le choix des zones est dicté par la vocation de l’élevage, à savoir le bovin laitier, où toutes les exploitations recensées dans chacune des zones étudiées ont été approchées. La phase exploratoire de terrain nous a permis de parcourir la région d’étude à travers les 6 zones retenues où nous avons relevé une nette hétérogénéité entre exploitations du point de vue de la variabilité de la taille du cheptel. Par ailleurs, et à partir de cette donne, on a pu classer les exploitations étudiées en trois grandes catégories, prenant comme paramètre de base la taille du troupeau bovin laitier et la vocation de l’exploitation (Tableau 2).
Tableau 2. Catégorisation des exploitations étudiées |
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Catégories Exploitations |
Nombre d'éleveurs |
Catégorie I : > 25 V.L*. |
12 |
Catégorie II : [11 - 25 V.L.] |
19 |
Catégorie III : < 10 V.L. |
11 |
Total |
42 |
* : Vache Laitière |
L’étude a pour objectif principal l’analyse des résultats enregistrés par les exploitants élevant des animaux importés à haut potentiel de production, à l’image de la vache Holstein. Les paramètres étudiés concernent le matériel animal : Bovin Laitier Moderne, adaptation des animaux au contexte saharien, les conditions d’élevage : provenance et disponibilité du fourrage, conduite de l’alimentation et les aspects sanitaires outre de la dimension économique : charges ayant trait à la main-d’œuvre, coût liés à l’aliment et rentabilité de l’exploitation.
Les 42 exploitations enquêtées sont des propriétés privées, totalisant un effectif de 948 têtes bovines dont 550 vaches laitières. L’approche de personnes ressources (personnels des structures technico-administratives et vétérinaires) a permis de toucher 42 éleveurs sur les 81 recensés dans la région d’étude, soit 52,5 % du total (Tableau 3).
Tableau 3. Les 6 zones retenues dans la région d’étude |
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Périmètre |
Nombre d'éleveurs étudiés |
L'Amied |
21 |
Aghzou |
10 |
Chihia |
07 |
Foussaa |
02 |
Saad Allah |
01 |
Tikmamine |
01 |
Total |
42 |
En Algérie du Nord, la nature des troupeaux est fonction de l’altitude ; dans les plaines et les vallées, l’élevage bovin est prédominant; jusqu’à 1500 m, on rencontre plutôt des ovins et des caprins; au delà de 1500 m, les prairies d’altitude des massifs ne sont fréquentées que par les bovins qui ne transhument vers les piedmonts qu’en hiver à la fonte des neiges. L’élevage est inégalement réparti d’Est en Ouest en relation avec la richesse des pâturages; l’élevage bovin domine à l’Est tandis qu’à l’Ouest c’est l’élevage ovin associé au caprin qui est privilégié. Par ailleurs, le territoire Sud demeure marqué par la présence de la chèvre qui constitue la tradition en matière d’élevage dans les régions sahariennes (Senoussi 2004), mais également le dromadaire, espèce bien adaptée à la rudesse écologique locale. Ces deux espèces sont considérées comme d’authentiques pourvoyeurs en divers produits vitaux.
Orienté vers la production laitière et localisé essentiellement dans les zones littorales, le système intensif (à travers les races améliorées) représente 30 % de l’effectif bovin et assure près de 20 % de la production bovine nationale.
Le bovin laitier moderne a gagné différentes régions agro-écologiques sahariennes incarnant ainsi un système d’élevage inédit. Des fermes d’élevages ont émergé dotant ces régions d’une nouvelle dynamique agricole. C’est ainsi que Ghardaïa a fini par devenir un grand bassin laitier, notamment à travers Guerrara, deuxième ville de la wilaya du point de vue concentration d'habitants (plus de 60 000 habitants), où l'introduction des bovins remonte à 1963 par deux exploitants locaux, en l’occurrence Kerroume et Benaissa, et ce à titre d'essai. Il a ensuite commencé à évoluer grâce aux conditions microclimatiques favorables des palmeraies.
Aujourd'hui, l'effectif bovin à Ghardaia compte plus de 1400 têtes avec une production laitière annuelle qui varie d'une année à l'autre, de 2 500 000 kg à 3 000 000 kg. S’inscrivant dans cette même tendance, la région d’étude, Guerrara, révèle qu’en l’espace d’une décennie à peine [1996-2006] des évolutions bien marquées ont caractérisé cet élevage, le nombre de vaches laitières passant de 134 à 840 têtes (soit 6 fois plus), alors que l’effectif total, toutes catégories confondues, a atteint les 1340 têtes au terme de 2005 (Figure 2).
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A l’échelle nationale, on note des flux de génisses importées estimées à 31 000 têtes durant 2004 après la levée de l’interdiction d’importation (entre 2000 et 2003) dûe notamment aux épidémies qui ont frappé le cheptel européen (Benachenhou 2004).
De 1996 à 2001, la production laitière est passée de 272,2 tonnes à 3225,4 tonnes (soit 12 fois plus), c’est ainsi que Guerrara est devenu un grand bassin laitier qui approvisionne des marchés potentiellement preneurs en produits laitiers. Le secteur de l'industrie agroalimentaire est marqué par l’existence de deux laiteries baptisées CHIHIA et KHOBZI qui signent davantage la vocation régionale, en l’occurrence commerciale par excellence (Figure 3).
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En raison de l'absence d'un contrôle laitier systématique au niveau des élevages d'une part et de la variabilité des quantités consommées par les veaux d'autre part, la détermination précise de la production laitière par vache de l'ensemble de notre échantillon s'avère difficile. Raison pour laquelle on s’est basé sur des relevés quotidiens de la production laitière auprès de six éleveurs des trois catégories échantillonnées (2 éleveurs par catégorie choisis en fonction de la taille du troupeau laitier. En moyenne, elle n’excède pas 20 litres par vache et par jour. Par ailleurs, la production moyenne calculée pour 233 vaches laitières (soit 42 % de l'ensemble des vaches laitières de l'échantillon) au cours de 10 mois de lactation est de 1 518 000 litres, soit une production laitière par lactation standard et par vache de l’ordre de 6 515 litres. Au-delà de dix mois, elle régresse de manière substantielle (moins de 15 litres par vache et par jour). Il faut aussi souligner que certains éleveurs ignorent l'importance du tarissement gardant des vaches en production plus de 12 mois ; la production s'étale encore plus si l'écart vêlage-saillie fécondante dépasse les 6 mois.
Nos investigations de terrain mettent en relief les principales contraintes rencontrées dans les exploitations étudiées de la région d’étude et qui se résument principalement en :
L'alimentation distribuée est basée essentiellement sur le concentré, le troupeau recevant une ration très énergétique (65 % de concentré). Pour le fourrage vert, les quantités distribuées ne dépendent pas des besoins des animaux mais plutôt de la réserve en fourrages dont dispose l'éleveur. La composition de la ration diffère d’un éleveur à un autre : elle est constituée de fourrage vert, de foin, d’ensilage parfois, et du concentré. Les aliments distribués apportent en moyenne 13 UFL et 1 100 g de PDI. L'excès d'énergie influe indirectement sur la production laitière ; un aliment très énergétique entraine à terme l’engraissement de la vache laitière, ce qui provoque une baisse de la fertilité de l’animal et par conséquent une chute drastique de la production laitière. En effet le syndrome d’une vache grasse est révélé par l'excès d'énergie qui aura pour conséquence l’engraissement de la vache, chose qui est corrélée négativement avec la production laitière
Tandis que l'excès des PDI dans la ration est observé surtout au printemps où on enregistre une abondance de fourrages verts. L’excès d'azote est gaspillé sans profit. Par ailleurs, les petites exploitations utilisent beaucoup plus du foin de céréales, du Drinn, plante spontanée saharienne, appelée Stipagrostis pungens et du son d'orge, alors que les grandes exploitations utilisent le foin de vesce avoine et l'ensilage de sorgho dans leur rationnement.
Cependant les contraintes les plus pesantes se résument comme suit :
Certains éleveurs, notamment ceux de la catégorie III (26 % du total), ne tiennent pas compte de la qualité des aliments et recourent à un mode de rationnement rudimentaire ; ils s’approvisionnent en ressources pastorales, notamment le Drinn (Stipagrostis pungens), le Diss (Imperata cylindrica), l’Agga (Zygophyllum album) et le chiendent (Synapsis arvensis) voire même de toutes espèces appétées par le bovin sans prendre en considération leurs valeurs nutritives ;
Le peu de surfaces destinées à la production fourragère d'une part et le manque d'eau d'irrigation d'autre part contraint les éleveurs à s’approvisionner en aliment sec depuis le marché ;
La cherté des aliments concentrés (son, VL15, maїs, etc.);
La rareté des aliments pendant l'hiver notamment les fourrages verts, amène les éleveurs à distribuer une alimentation strictement concentrée (rebuts de dattes + son + VL15) ; c’est le cas des catégories I et II (soit près de 74 % du total enquêté).
Le contexte saharien agit aussi bien sur les possibilités fourragères que sur les performances des bovins introduits. En effet, les cultures les plus répandues dans la région de Guerrara sont l'orge (98 ha), l'avoine (65 ha), suivi par le sorgho (52 ha), la luzerne (35 ha) et enfin les autres cultures telles que la vesce avoine et le ray-grass avec (20 ha). La dominance des cultures d’orge et d’avoine est expliquée par l’espace qui leur est réservé principalement dans trois exploitations où elles sont menées sous pivots d’irrigation. Pour le sorgho et la luzerne, la plupart des éleveurs les cultivent sous palmiers ce qui explique le peu de surfaces qui leur sont accordées. Alors que les autres cultures telle que la vesce avoine et le ray-grass sont à titre d’essai.
A leur tour, les facteurs climatiques, agissent négativement sur les bovins de races importées. Ces dernières, introduites pour l'amélioration de la production se trouvent confrontées à des conditions écologiques tout à fait différentes de celles de leurs pays d'origine. Importées pour leur fort potentiel génétique, elles voient leurs performances diminuer, puisqu'une grande partie de leur métabolisme est utilisé pour leur adaptation aux facteurs environnementaux (Nedjraoui 2003). En effet, le climat saharien exerce un effet défavorable en privant les animaux d’une alimentation abondante du fait de l’inexistence de pâturages périurbains. La chaleur estivale qui dépasse la moyenne de 34°C influe sur la production laitière ; au dessus des intervalles thermiques [+27°C - +30°C], la productivité des animaux baisse considérablement (Senoussi 2008).
Les bovins laitiers modernes sont à la fois sensibles et exigeants ; sensibilité vis-à-vis de certaines maladies et exigence à l’égard des conditions d’élevage (entretien de l’animal et du local). Nos investigations auprès des services vétérinaires révèlent l’existence de troubles sanitaires ; les plus fréquemment relevés sont regroupés en quelques syndromes :
des troubles digestifs occasionnés principalement par les parasitoses ;
des météorisations (gonflement du rumen) ;
des mammites (inflammation des mamelles) ;
des cas brucelliques (fièvre).
En effet, en l’absence d’un plan prophylactique adéquat et de mesures hygiéniques systématiques, on a relevé dans 63 % des exploitations enquêtées des cas d’avortements qui se manifestent généralement au cours des 6ème et 7ème mois de gestation.
Les pathologies induisent des pertes de production et de commercialisation entrainées par l’interdiction légale de livraison consécutive aux traitements médicamenteux, et l’éleveur supporte davantage de charges supplétives ayant trait à la remise en l’état des vaches laitières.
L’alimentation représente le paramètre le plus important des charges opérationnelles de la production laitière, mais également l’un des outils les plus efficaces pour maitriser la production de lait, tant en termes de volumes, de qualité et aussi de rentabilité. Alors que l’aliment fourrager demeure le principal facteur limitant, près de 97 % des exploitations étudiées ne sont pas autosuffisantes en fourrages. C’est ainsi que les charges ayant trait à l’alimentation sont assez élevées, comme le révèle un simple calcul basé sur l’estimation du coût du litre de lait produit permise à partir de l’analyse des chiffres collectés auprès des éleveurs :
coût d'un ouvrier estimé à 350 D.A /jour (Chiffre considéré comme norme locale) [1 $ U.S = 75 Dinars Algériens], alors que le nombre d’ouvriers affectés à la production animale varie d'une exploitation à une autre. Un ouvrier pour 8 vaches (chez 98 % des exploitations étudiées)
le coût de la main-d'œuvre d'un kg de lait = 350 D.A./(8 x 20 kg). C'est-à-dire 350 DA/ 160 kg = 2,19 DA / kg de lait produit ;
le coût des aliments pour la production d’un kg de lait produit : on a pris comme référence de calcul une vache de 600 kg de poids vif qui produit 20 kg du lait par jour avec 40 g de taux butyreux, soit des besoins totaux de 2230 g de PDI et 23,2 UFL. La ration nécessaire est de 8 kg MS de luzerne + 5 kg MS de sorgho + 12 kg de VL15, soit (8 kg x 5 DA) + (5 kg x 16DA) + (12 kg x 25 DA) = 580 DA. / 20 kg = 29 DA / kg de lait produit ;
Le prix de vente d'un litre du lait produit est de 30 DA + 7 DA (aide de l'Etat) = 37 DA / litre ;
Le coût net : 37 DA - 2,19 DA = 34,81 DA.
le bénéfice : 34,81 DA - 29 DA = 5,81 DA / kg de lait produit.
Que peut-on déduire ? Sans l’aide de l’Etat, relative à la production du litre de lait, l’éleveur se retrouve dans une situation déficitaire = - 1,19 DA ==> (30 DA – 2,19 DA) – 29 DA. Ainsi donc, le lait de vache s’avère désormais non rentable.
Lié surtout aux charges affectées à l’alimentation, le coût du litre de lait de vache finit par devenir élevé, et ces résultats convergent avec ceux d’autres études entreprises par Ouarfli (2007) et Mayouf (2008).
Le développement du système d’élevage bovin dans la région d’étude doit tenir compte d’un certain nombre d’actions. Pratiquement faisables, elles ne pourront se solder que par des retombées positives ; ces actions doivent toucher à trois grands maillons et à travers différents aspects résumés en :
Maillon 1: l’aliment ; entre disponibilité et valorisation
En Algérie, le problème de l’alimentation du bétail se pose avec acuité, ce qui oblige l’Etat à recourir à l’importation de grandes quantités d’aliment, surtout des concentrés (maïs, orge…etc.) pour palier à ce déficit (Chehma et al 2002).
Le palmier dattier offre des quantités appréciables de sous produits qui peuvent être valorisés en alimentation du bétail. Parmi ces sous-produits, les rebuts de dattes sont considérés comme aliments énergétiques, caractérisés par leur richesse en sucres cytoplasmiques et leur déficience en azote, qui rendent leur utilisation par les ruminants plus ou moins compromettante quant aux risques d’indigestions et de météorisations. Pour palier à cela, la fabrication et la distribution de blocs multi nutritionnels (BMN) à base de rebuts de dattes présente l’avantage de pallier à la déficience en azote par l’adjonction d’urée et d’équilibrer les sucres simples par la cellulose fournie par l’aliment grossier, avec en plus, le mode de présentation de ces blocs, très pratique d’utilisation (Chehma et Senoussi 2010))
Par ailleurs, l’amélioration des performances zootechniques des animaux passe par la réalisation d’actions complémentaires telles que l’installation de périmètres fourragers destinés exclusivement à l'élevage à vocation laitière, le choix des espèces fourragères adaptées aux conditions locales, la récolte des fourrages à des stades appropriés, la valorisation de produits et sous produits phoenicicoles et leur incorporation dans la ration quotidienne des vaches laitières, la pratique de l’ensilage…(Photos 1 et 2) .
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Il a été démontré un effet notable des facteurs sanitaires sur la production laitière, et à l’inverse des conséquences pathologiques suite à des niveaux élevés de production. Les caractéristiques de l’habitat dans lequel évolue l’animal sont également très importantes. Ainsi, c’est donc à deux niveaux bien distincts mais indissociables que des mesures hygiéniques doivent être impérativement prises en compte ; elles se résument principalement aux éléments suivants :
Hygiène
du local : le lieu d’accueil des animaux doit être en mesure de répondre aux
exigences des animaux et de la vocation laitière (Photos 3
et 4). C’est ainsi qu’il va
falloir procéder par :
Une modernisation et normalisation des étables ;
ne désinfection systématique du matériel d’élevage et des salles d’élevage afin d’épargner les animaux d’éventuels problèmes pathologiques ;
Prévoir des pédiluves à l’entrée de la ferme et de l’étable.
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Hygiène de l’animal : un animal sain doit évoluer dans un élevage sain ; il faut donc :
éviter de mettre ensemble des animaux d’âges différents dans un même endroit ;
procéder par un pansage régulier des vaches ;
assurer une hygiène de la traite qui prenne en compte certaines actions primordiales telles que : laver la mamelle avec de l’eau tiède pour stimuler la traite, se débarrasser des premiers jets, faire une traite complète pour que le lait restant au niveau de la mamelle ne soit pas un milieu de culture pour les germes et tremper les trayons à la fin de la traite dans une solution antiseptique.
Il faut aussi prévoir la mise en place d’un plan prophylactique annuel. Par ailleurs certaines mesures d’accompagnement s’imposent à plus d’un titre, notamment à travers le rôle des services d’appui qui doivent marquer davantage leur présence en renforçant l’encadrement et l’assistance des éleveurs par une meilleure prise en charge de la formation-vulgarisation.
Il s’agit du principal maillon, considéré comme la pierre angulaire en matière de développement de l’élevage bovin. Présente sous quatre variétés, en Algérie la principale race bovine locale n’est autre que la brune de l’Atlas : la Guelmoise à pelage gris foncé vivant en zone forestière ; la Cheurfa à robe blanchâtre que l’on rencontre en zone préforestière ; la Chélifienne à pelage fauve et la Sétifienne à pelage noirâtre adaptée à des conditions plus rustiques. Cette dernière demeure par excellence le principal favori à gagner l’espace saharien. Certes, elle est moins performante mais très bien adaptée aux rudes conditions du milieu. Elle résiste à la chaleur et à la siccité de l’air, comme elle peut consommer et valorise très bien les produits et sous produits agricoles locaux.
Cette étude illustre les particularités de l’élevage bovin dans une région saharienne qui présente certes des atouts, mais qui est confrontée à des contraintes qui peuvent toutefois être surmontées. En effet, en l’espace d’une décennie à peine, on note à travers un examen sommaire des données statistiques collectées des évolutions bien marquées aussi bien quant à l’effectif bovin qu’à la production laitière. Cependant, par rapport aux potentialités existantes et aux normes d’élevage requises, ces chiffres demeurent en dessous des attentes et ce en l’absence d’une tradition d’élevage intensif, au sens plein du terme. Ceci rend difficile l’exploitation du potentiel génétique des vaches laitières vu la non maîtrise de la conduite d’élevage, reflétée par le manque de qualification et de spécialisation des éleveurs.
L’alimentation demeure le problème névralgique pour l’élevage bovin : on constate une distribution exagérée de concentrés par rapport aux fourrages grossiers, ce qui engendre une suralimentation énergétique qui, outre de l’élévation du coût de l’alimentation, peut entrainer des effets négatifs sur la production laitière (syndrome de vaches grasses, acidoses…etc.). Une alternative important consiste en la diversification des fourrages par l’installation des cultures à hauts rendements et à valeur alimentaire optimale. En effet, il faudrait une révolution fourragère, appropriée à la région d’étude, basée sur la culture intensive des fourrages (sous palmiers). Car il est inutile, voire dangereux, de fabriquer des « machines animales » perfectionnées si la région ne peut pas mobiliser ou produire en parallèle des aliments pour les faire fonctionner.
Si les races importées ont été introduites pour objectif principal l'amélioration de la production, elles se trouvent confrontées à des conditions écologiques tout à fait différentes de celles de leurs pays d'origine. Il serait alors plus facile d’opter pour la vache locale aisément adaptée au contexte local tout en valorisant au mieux les sous produits locaux permettant à la fois une réduction des apports de fourrages concentrés et de baisser les coûts de production.
En somme, si toute action de développement fait appel aux compétences et au savoir-faire, elle demeure tributaire de certaines mesures et d’actions d’accompagnement, gages de viabilité et de rentabilité du système d’élevage bovin. Entre autres, l’innovation doit permettre aux éleveurs de participer à la gestion ainsi qu’à la création de biens collectifs. Et pour aspirer à une production laitière à bas coûts, il faut développer une stratégie globale de la ferme d’élevage. Des éléments-clés de cette stratégie se résument en ce qui suit:
Vaches laitières adaptées au milieu saharien;;
Race fertile et à grande longévité ;
Race allaitante aux bonnes capacités laitières ;
Valorisation des produits et sous produits agricoles locaux ;
Ration équilibrée basée sur la conjugaison entre fourrages et résidus du dattier ;
Faibles frais de construction de stabulations ;
Parc de machines simple ;
Formations cycliques des éleveurs en matière de conduite et maitrise de l’élevage.
Adem R 2006 Analyse du fonctionnement de la filière lait et son articulation aux exploitations laitières en Algérie. Cas des exploitations encadrées par le circuit des informations zootechniques. Mémoire de Magister, I.N.A. El-Harrach. 136-137.
Amellal R 2000 La filière lait en Algérie : entre l'objectif de la sécurité alimentaire et la réalité de la dépendance. In CIHEAM Options Méditerranéennes, Série B / n°14, 1995 - Les agricultures maghrébines à l'aube de l'an 2000. 229-238. http://ressources.ciheam.org/om/pdf/b14/CI960052.pdf
Benachenhou S 2004 Enquête sur le mode d’élevage dans la région de MITIDJA, Thèse de Doctorat Vétérinaire. Université Saad Dahlab – Blida. 35p.
Chehma A, Longo H F, Bada A et Mosbah M 2002 Valeur alimentaire des sous produits du palmier dattier, de la paille d’orge et du Drinn chez le dromadaire. "Journal Algérien des Régions Arides" 1 : 33-44. http://www.crstra.dz/Publication/revues/revue02.htm#9
Chehma A et Senoussi A 2010 Production of multi nutrient blocs (MNB) based on date palm by-products and urea. Livestock Research for Rural Development 22 (04) 2010, from http://www.lrrd.org/lrrd22/4/cheh22073.htm
I.T.E.L.V. 2007 Enquête, coût et productivité des élevages bovins laitiers en Algérie – cas des régions Est de l’Algérie (2006-2007), Station régionale d’Annaba, Document multigraphié.
M.A.D.R. 2003 Ministère de l’agriculture et du Développement Rural ; Statistiques Agricoles, superficies et productions, Séries A et B, Alger, 18 p.
Mayouf R 2008 Diagnostic de l’alimentation des bovins laitiers en Algérie – cas de la région de Tébessa -, Mémoire de Magister en Agronomie Saharienne, option : gestion des agrosystèmes sahariens, Département des sciences Agronomiques, Faculté des Sciences et Sciences de l’Ingénieur, Université de Ouargla. – Ouargla – Algérie. 132 p.
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Received 22 June 2010; Accepted 6 October 2010; Published 9 December 2010